Heero courait entre les arbres, suivi de près par Trowa, tous deux indifférents
aux branches basses qui leur fouettaient le visage et les bras, esquintant au
passage les beaux uniformes de Oz qui n'étaient pas prévu pour
les cavalcades en forêt.
Ils étaient sortis sans encombre du gigantesque complexe après
avoir reçu un discret bip de leur émetteur signifiant que les
autres avaient rempli la mission, et étaient déjà à
l'abri lorsque l'alarme générale s'était déclenchée.
Ils en étaient encore à se demander s'ils allaient aller voir
de quoi il retournait lorsqu'ils avaient vu... un machin vert, scintillant sous
le soleil s'élancer du haut d'un des plus hauts bâtiments au-dessus
du lac et planer en direction de l'autre rive. S'ils n'avaient pas réussi
à identifier avec précision l'engin volant -une aile delta ? Un
parachute modifié ? Un planeur ?- ils avaient en revanche parfaitement
reconnus les beuglements de joie d'un Duo vraisemblablement au mieux de sa forme
et une petite tignasse blonde qui ne pouvait appartenir qu'à l'arabe.
Le japonais refusait de même songer à ce qui était devenu
Wufei. Il faudrait qu'ils aient une sacrée discussion tous les cinq.
Tous deux s'étaient mis à courir pour rejoindre le point d'arrivée
-ou plutôt de chute- du groupe volant et finirent par arriver dans une
petite clairière ensoleillée entre les sapins, des fougères
se dressant jusqu'à mi poitrine dans leur lutte pour capter le moindre
rayon de soleil.
La première chose que Heero et Trowa identifièrent fut le rire
de l'américain qui, assis sur un tas de grandes feuilles vertes et le
rouge aux joues, rigolaient et babillait comme un gamin :
- C'était génial ! Il faudra qu'on remette ça une fois,
wouaaaaa mieux que le grand huit presque mieux que voler avec les Gundams, hé
sérieux Wu, tu aurais pu prévenir, je crois que Quatre s'en remettra
pas et...
Il fut interrompu dans sa phrase par un ados japonais se jetant à son
cou et le serrant contre lui au risque de l'étouffer. Duo mit quelques
secondes à capter que OUI Heero était bien en train de le serrer
contre lui, songea un instant que le pilote de Wing ne lui en voulait pas de
sa connerie, et changea d'avis en sentant ses côtes grincer sous la prise
calamaresque dont il était la victime. Heero avait peut-être bien
décidé de le tuer finalement...
- Heero, j'étouffe ! Réussi à articuler Duo d'une voix
rauque.
Aussitôt, le japonais le lâcha et s'écarta, plus rouge qu'une
tomate bien mûre et entreprit d'essayer de s'excuser et de justifier son
geste en bégayant tant et si bien que l'américain ne réussi
pas à reconnaître des mots entiers dans les sons incohérents
sortant de la gorge de son camarade. Ou alors, c'est qu'il y avait eu une réforme
du japonais sans qu'il le sache.
Duo s'écarta un peu, laissant à Heero la possibilité de
retrouver son calme, et se releva pour voir comment Quatre tenait le choc. Le
petit arabe n'avait pas eu l'air d'apprécier la balade à sa juste
valeur. L'américain retrouva le blond dans les bras de Trowa, qui, le
serrant contre lui et frottant doucement son dos, tentait de le calmer. Bizarre
quand même. Quatre avait peut-être l'air fin et fragile, c'était
tout de même un pilote de Gundam, un terroriste ; il ne devrait pas être
aussi... impressionnable.
- Qua-man, ça va ? Fit Duo en avançant tant bien que mal entre
les hautes fougères pour rejoindre son ami, quand un grognement venant
du sol le fit sursauter ; baissant les yeux, il s'aperçut qu'il avait
failli marcher sur Wufei.
Allongé sur le dos, les bras en croix, le chinois avait l'air plus décontracté
qu'il ne l'avait jamais été. Avait l'air, seulement : son front
était plissée et ses dents serrées, comme s'il avait mal
quelque part, et Duo s'aperçut aussi que sa respiration était
un peu trop rapide.
- Wuffy ? Appela doucement l'américain.
- Maaaaaaaaaaaaaaaaaaaaxwell... Soupira Wufei en grimaçant.
- Bah, ça va, t'es encore vivant ! Rigola-t-il en s'accroupissant à
ses côtés. Qu'est-ce que tu as fait de tes ailes ? Vachement chouette,
au fait !
Le chinois lui dédia un regard mi courroucé mi apeuré,
appréciant guère que Duo parle de cette
particularité
à voix haute, et surtout craignant ce qui pourrait arriver si les autres
apprenaient qu'il n'était pas humain.
- Hem.
Duo se releva, lançant un regard interrogatif à Heero qui s'était
approché et fixait Quatre et Trowa d'un air dubitatif. Il suivi le regard
du japonais, et resta muet de surprise (*si c'est possible ^_^ ;;;*), tandis
que Wufei se relevait tant bien que mal en ménageant ses épaules
comme il le pouvait, regardant lui aussi les deux autres pilotes à quelques
mètres d'eux.
Quatre les regarda tour à tour sans comprendre. Qu'est-ce qu'ils avaient
tous à le fixer ainsi ? Car c'était lui qu'ils regardaient, et
pas Trowa. L'arabe se tourna vers son brun perso, cherchant une explication
quelconque. Pour toute réponse, son amant leva doucement la main sur
son visage et commença à tracer le tour de son il gauche,
toujours aussi bleu, mais cerclée d'une grande tache noire qui descendait
jusque sur sa pommette, et remontait sur sa tempe.
L'arabe poussa un petit cri et s'écarta brusquement, secouant plusieurs
fois la tête et respirant fortement, jusqu'à ce qu'il soit sûr
que la tâche ait bien disparu, puis jeta un coup d'il rapide et
inquiet en direction de ses coéquipiers.
Duo avait un grand sourire, semblant prêt à éclater de rire.
Wufei frottait ses épaules endolories en fronçant les sourcils.
Heero se grattait pensivement la tête.
Trowa était égal à lui-même : aussi expressif qu'une
pierre sur le bord du chemin. Mais le petit blond réussi à sentir
qu'il n'était pas dégoûté ou effrayé par ce
qu'il venait de voir. Il semblait juste comprendre. Comme s'il savait...
Ils restèrent plusieurs interminables secondes ainsi, jusqu'à
ce que le japonais se décide à parler.
- Je crois qu'on va avoir une petite discussion tous les cinq. Fit-il d'un ton
étrangement ennuyé.
Les cinq garçons firent un tour méticuleux autour de leur nouvelle
planque, vérifiant avec toute la force de l'habitude qu'elle était
saine de mouchards et de pièges quelconques. Une fois que tout fût
vérifié, Duo lança le sac avec ses analyses sur la table
de la cuisine et se précipita vers la salle de bains en hurlant quelque
chose comme :
- De l'eau chaude ! Du savon ! ! Si vous saviez comme vous m'avez manqué
! ! !
Une fois la tornade Maxwell disparue, les quatre restants commencèrent
à se regarder d'un air gêné, à piétiner d'un
pied sur l'autre, ne sachant pas par quel bout prendre le problème. Et
quel problème...
Suite au bruit d'eau venant de la salle de bain, des hurlements ressemblant
vaguement à de l'anglais chanté s'élevèrent, faisant
trembler les meubles et les vitres comme si le métro passait sous la
maison. Ça aurait d'ailleurs été étonnant, la baraque
où ils se trouvaient étant en rase banlieue.
- Chanter aussi mal pour une sirène, ça devrait pas être
permis. Marmonna Heero en retenant un sourire.
- Heero Yuy faisant de l'humour aussi. Ricana Wufei en s'asseyant avec précaution
dans un des canapés.
Trowa releva un sourcil.
Quatre à ses côtés éclata de son rire cristallin.
Heero se gratta pensivement le crâne.
Duo répéta pour la deuxième fois le refrain de Queen qu'il
était en train de massacrer. [1]
Wufei soupira.
Le chinois massa pensivement ses épaules endolories par son récent
vol. Il manquait décidément d'entraînement dans ce domaine,
et se demanda s'il pourrait vraiment voler avec ses quatre ailes, ou s'il ne
pouvait que planer comme il l'avait fait un peu plus tôt. Enfin, étant
donné qu'il avait réussi à seulement planer avec les deux
autres dans les bras, il pouvait très probablement voler sans poids mort.
Malgré lui, il sourit à cette idée. Dire que pendant des
années il avait refusé de se transformer... C'était si
agréable ! Si naturel. Si... si normal pour lui...
Quatre finit par se lancer.
- Wufei tu... tu es quoi ? Fit le petit arabe en murmurant presque et en baissant
la tête.
- Un dragon, répondit simplement l'asiatique sans se retourner. La bouche
de Quatre s'ouvrit pour dire quelque chose, resta ouverte quelques instants,
et se referma dans un grand plop.
- Ça n'existe pas les dragons. Fit remarquer Heero. Wufei soupira d'agacement.
- Il y en a trop dans la mythologie chinoise et les légendes d'autres
pays pour qu'ils soient uniquement un mythe. Expliqua-t-il. Je vais vous expliquer,
mais on va attendre que Maxwell revienne. M'évitera de répéter.
Quelques secondes s'écoulèrent.
Et simultanément, quatre têtes se tournèrent vers la salle
de bains et hurlèrent :
- DUOOOOOOOOOOOOOOO !!!!!!!!
L'américain se laissa tomber dans le canapé aux côtés
de Heero, les cheveux enroulés dans une serviette qu'il frottait vigoureusement,
et il dévisagea avec un de ses grands sourires ses quatre compagnons.
Wufei dans le canapé en face du sien se frottait toujours doucement les
épaules, les lèvres pincées, semblant réfléchir.
Le chinois cherchait dans sa mémoire des bribes d'histoires et de légendes
contant la généalogie de sa famille, se demandant en même
temps s'il avait le droit de révéler tout ça. Mais après
tout, il était à présent le dernier puisque tous les membres
du clan des dragons, lui excepté, se trouvait sur L5 lors de sa... destruction.
Il n'y avait plus personne pour venir le réprimander d'avoir révélé
des secrets de famille ancestraux.
Trowa s'assit à ses côtés et attira Quatre sur ses genoux,
le petit blond s'y blottissant avec reconnaissance. Il était tendu, remarqua
le chinois, comme s'il redoutait ce qui allait arriver, comme s'il ne voulait
surtout pas qu'ils sachent ce qu'il était en vérité, et
Wufei se demanda un instant ce que Quatre était, la tache sombre qui
était apparue autour de son il n'étant pas d'une grande
aide dans ce genre de devinettes.
Duo finit de frotter ses cheveux et, penchant la tête en avant, les enroula
en turban dans sa serviette.
- Bon, alors, par quoi on commence ? Ou plutôt par qui ? Fit-il en regardant
Heero. Le japonais tourna à demi la tête vers lui et croisa son
regard, frissonnant à demi en constatant que Duo lui faisaient une moue
à la Réléna-yeux-humides-et-bouche-en-coeur qu'il connaissait
que trop bien.
- Nani ? Fit-il d'un ton plus sec qu'il ne l'aurait voulu.
- Ben, tu es le numéro un, non ? Duo agrandit encore son sourire. Tu
fais Heero l'oiseau stepléééééééé
?
- Heero l'oiseau ? S'exclama Wufei en ouvrant de grands yeux surpris
- Vip ! C'est un piaf.
Duo se prie une baffe à l'arrière du crâne et s'écroula
de rire en partant en arrière sur le canapé, tandis que Heero
cachait son visage entre ses mains en se demandant pourquoi ça lui arrivait
à lui. L'américain rigolait toujours quand un membre plein de
plumes le frappa de plein fouet, l'envoyant valdinguer sur le sol.
Il se releva, hébété, et croisa le regard du japonais surplombé
de ses plumes noires à la place des cheveux, un regard amusé,
vaguement moqueur, vachement humain. Ça faisait bizarre un regard pareil
dans le visage de Heero mais il fallait bien avouer que ça lui allait
bien. Duo fut debout d'un bond, la serviette retenant ses cheveux glissant sur
le sol, et il s'élança sur Heero en s'écriant :
- Oh, toi !
L'oiseau s'écarta vivement en riant et entreprit de fuir devant l'américain
faussement furibard, étrangement nullement gêné par les
grands voiles de plumes qui lui dépassaient du dos.
Sous le choc, Wufei releva enfin sa mâchoire et, indifférent à
la cavalcade qui se déroulait tout autour de la salle de séjour,
tourna doucement la tête vers le couple, croisant le regard -enfin le
seul il visible- de Trowa qui semblait aussi surpris que lui. Et pour
une fois, ça se voyait. Quatre, lui, suivait des yeux Duo et Heero qui
se couraient toujours après, sautant par-dessus les meubles, criant et
riant comme deux gosses en manque d'exercice enfermé dans une maison
un jour de pluie, les cheveux mouillés de l'américain volant tout
autour de lui.
Heero fini par sauter au sommet d'une grande armoire, s'aplatissant contre le
plafond pour passer avec ses ailes et tira la langue -tira la langue !!- à
Duo qui, pour le coup, se renfonça au fond du canapé en faisant
mine de bouder. Pendant à peine trois secondes. Il se tourna vers les
autres et leur fit un clin d'il :
-Il est quand même plus cool comme ça, non ?
Mais à part Quatre qui hocha doucement la tête, trop surpris pour
sortir un son cohérent de sa gorge, aucun ne releva vraiment la remarque
de l'américain. Tous trois fixaient Heero qui se trouvait toujours accroupi
sur l'armoire, les serres fortement enfoncées dans le bois du meuble,
l'une des ailes aux trois quart étendue contre le plafond, et qui leur
rendait leur regard avec petit sourire au coin des lèvres. Comme s'il
avait l'air... content de leur surprise.
- Bon, alors. Fit Duo en frappant ses deux mains, faisant sursauter les trois
jeunes terroristes. Je précise pour ceux qui n'ont pas encore compris
et pour Trotro qui ne m'a pas vu : je suis un... sirein. Ça se dit ?
- On dirait plutôt triton, je crois. Proposa Wufei après un temps
de retard.
L'américain haussa les sourcils d'un air un peu dégoûté.
- Bah, j'aime pas ce mot, il me fait penser au papa d'Ariel. Ou à une
espèce de bestiole gluante. Non, sirein c'est pas mal !
- Si tu veux. Soupira le chinois. Je suis un dragon. Précisa-t-il à
l'adresse de l'américain.
- Ah ? J'croyais qu't'étais un lézard volant !
- Maaaaaaaxwell...
-Et vous, vous êtes quoi ? Demanda Duo au couple sans plus se soucier
de Wufei.
Quatre baissa la tête de... de honte? Et se cacha le visage contre la
poitrine de Trowa.
- Je ne sais pas exactement. Fit le pilote de Heavy Arm de sa voix grave et
impersonnelle. Je ne me suis... transformé
qu'une seule fois. Et...
Je n'avais rien contrôlé.
Quatre leva la tête vers lui et le regarda d'un air à la fois surpris
et blessé signifiant mais-pourquoi-tu-ne-m'en-avais-pas-parlé-je-croyais-qu'on-n'avait-aucun-secret-l'un-pour-l'autre-tu-ne-me-fais-donc-pas-confiance-à-ce-point,
etc., etc.... Le français se détourna légèrement.
Ce n'était pas qu'il ne faisait pas confiance à Quatre mais ça...
De toute façon depuis qu'il savait ce qui se terrait au fond de lui,
il se gardait bien de le laisser sortir. Tout ce sang, tous ces morts autour
de lui quand il avait repris le contrôle... L'enfant qu'il était
alors s'était enfermé dans un cocon, puis une armure dressée
jour après jour, mois après mois, année après année,
l'enfermant avec lui pour être sûr qu'il ne ressortirait plus jamais.
Il n'en avait jamais parlé à personne.
Il songea toutefois avec un temps de retard qu'il aurait pu partager ce poids
avec son petit amant, surtout depuis ce jour... Ce matin où il s'était
réveillé avec une boule de fourrure blanche tachetée de
noir dans les bras...
- Quatre ? Fit Duo avec un sourire gigantesque. T'es quoi ?
- Naaan. Couina l'arabe en se serrant un peu plus contre son Trowa.
- T'es quoi, dis, t'es quoi ?
tékoi tékoi
tékoi tékoi ???
Le petit blond lui lança un regard vaguement courroucé mais surtout
ultra gêné, se redressa et fit :
- [2]
Puis il souleva le pull de Trowa et se cacha dessous en gémissant presque.
Heero sauta à bas de son meuble et se rapprocha d'eux en se dandinant.
- Tu sais Quatre. Fit-il remarquer avec un petit sourire. On ne comprend pas
l'arabe.
- C'était voulu ! S'écria l'arabe, sa voix étouffée
par le pull de son amant.
Étonné par le brusque accès d'infantilisme et de puérilité
de la part de son ami, Duo se leva et se pencha sur la boule frémissante
que faisait le pull de Trowa, toquant doucement sur le crâne de l'arabe.
- Q-maaaaaan ? Appela l'américain. Pourquoi tu te caches ?
- J'ai honte... Couina Quatre d'une petite voix.
- Bah pourquoi ? Je suis bien un cousin d'Ariel la petite sirène moi
!
- Naaaaaaaaaaaaaaaan...
Trowa posa la main sur le bras de Duo, faisant lever le nez de l'américain.
- Laisse le tranquille. Souffla le français. Il finira bien par le dire
de lui-même, laisse lui le temps.
- Bon d'accord. Fit-il en haussant les épaules. Il se retourna avec dans
l'idée d'aller s'affaler dans l'autre canapé, mais Heero avait
profité de l'absence momentanée de Duo pour s'y installer en tailleur,
les ailes largement écartées prenant toute la place. L'américain
hésita un instant, puis, devant le petit sourire que ne cessait d'arborer
Heero l'oiseau, il alla s'asseoir contre le japonais en prenant bien garde de
ne pas trop s'appuyer sur son aile. Laquelle aile se replia doucement sur lui.
- Tu as les cheveux mouillés. Fit Heero en sentant la masse froide et
humide de la chevelure de Duo contre son bras.
- La serviette est par terre. Répondit l'américain, sans pour
autant se lever pour aller la chercher.
Heero soupira en resserrant néanmoins son aile autour de Duo d'un geste
protecteur, puis demanda à Wufei, ignorant pour l'instant Quatre qui
refusait toujours de leur parler.
- À t'entendre Wufei tu semblais dire que chez toi c'est de famille,
non ?
Le chinois arracha son regard de la contemplation des plumes devant lui et fixa
Heero d'un air sceptique, semblant se demander s'il avait les mêmes capacités
mentales lorsqu'il se transformait. Mais il du bien s'avouer que bien qu'il
ait l'air plus ouvert, plus chaleureux ainsi, il n'en semblait pas pour autant
intellectuellement diminué.
- Je descends d'une lignée portant le sang d'un dragon. Mais au fil des
générations, le sang s'est peu à peu dilué dans
le temps malgré les nombreux mariages consanguins au sein du clan.
- Il y a un dragon à l'origine de ta famille ? S'exclama Duo du ton émerveillé
du gamin auquel on raconte un conte de fées.
- En Chine les dragons sont souvent associés à l'eau : chaque
fleuve, nuage de pluie et source porte le nom d'un dragon et est sous la protection
d'un dragon. Ce sont eux qui permettent de faire tomber la pluie, de faire pousser
les plantes et d'éviter les famines. Ils ont rarement de mauvaises intentions
envers les humains, mais il leur arrive... D'oublier leurs obligations. De dormir
trop longtemps, ou de faire la fête par exemple. [3]
Mais en général ils restent bienveillant envers les humains, ou
alors simplement inintéressés. Ngao Jouen est un des quatre frères
dragon vivant au fond de la mer, l'un des quatre Seigneurs Roi, l'un des plus
puissants. Il a eu plusieurs enfants dont certains sont venus vivre parmi les
hommes, par curiosité mais sans jamais se mêler vraiment à
leur vie. C'est une des petites-filles de Ngao Jouen qui, lors d'une de ses
visites sur la terre des hommes a été agressée par une
bande de brigands sur un chemin isolé. Elle aurait probablement pu se
défendre seule, elle avait largement le pouvoir de s'échapper
mais un jeune guerrier est alors arrivé et a fait fuir, seul et uniquement
armé d'un sabre court, les brigands qui, dit-on, étaient plusieurs
dizaines, grands comme des chevaux des plaines, fort comme des bufs et
rusés de comme des tigres. Exagération due au passage de l'histoire
à la légende, à mon avis. Rajouta-t-il avec un sourire
amusé.
Cette histoire -son histoire- n'était qu'un mythe après tout,
mais c'était un joli conte.
-Et après ? Fit la voix étouffée de Quatre. Ils se marièrent
et eurent beaucoup d'enfants ?
-Tous les contes finissent comme ça. La petite-fille de Ngao Jouen fut
impressionnée par la vaillance du jeune homme, par son courage mais aussi
par sa générosité et sa droiture d'esprit. Elle accepta
de l'épouser et apporta chance et richesse à la famille qui devint
le Clan du Dragon, dont les membres avaient le pouvoir de se transformer eux-mêmes
en dragon, car le sang venant directement d'un des Empereurs des Eaux était
particulièrement fort.
Tous restèrent silencieux quelques secondes, intégrant ce que
Wufei venait de leur raconter. Heero finit par faire remarquer:
- Toute ta famille a... avait le don de se transformer ?
Le chinois laissa passer un peu de temps avant de répondre.
- Non, justement. La dernière personne avant moi pouvant se transformer
en dragon était mon arrière-arrière grand-mère.
Et encore, elle aurait été incapable de voler et ne pouvait pas
rester sous cette apparence pendant très longtemps. J'ignore pourquoi
j'ai hérité d'autant de traits de dragon et de capacités
de transformation.
-Les hasards de la génétique... Fit Duo d'un air rêveur.
Devant les regards ébahis ou surpris qu'on lui lança, il précisa:
- Faites pas attention, j'en ai entendu tellement avec ces deux tarés
de scientifiques qui m'étudiaient... Tient d'ailleurs! Je vais aller
chercher ce qu'on a récupéré !
Il sauta hors des plumes de Heero et s'élança vers la cuisine,
allant récupérer le sac avec ses examens.
Ignorant le grand courant d'air que déplaça Maxwell, Trowa se
tourna vers Wufei et demanda :
- Toute ta famille était au courant ?
- Mmh... Non. Seulement mes parents, un de mes oncles, la patriarche du clan
et... et... ma femme.
Le dernier mot s'étrangla dans sa gorge quand les souvenirs s'imposèrent
à lui ; Meiran et sa moue boudeuse, son petit menton volontaire, ses
éternels macarons... Et son caractère de cochon ! Elle était
butée comme une mule corse et semblait prendre un certain plaisir à
le faire tourner en bourrique. Et pourtant...
- Tu l'aimes. Fit Quatre à ses côtés, le faisant sursauter.
Le petit arabe, toujours sur les genoux de Trowa, était néanmoins
sorti du pull qui ne pourrait plus jamais être moulant, étiré
comme il l'était, et fixait Wufei d'un air douloureux. Fichu empathe,
songea un instant le chinois. Il détourna le regard, gêné.
- Il a fallu qu'elle meurt pour que je m'en aperçoive, Quatre.
- Qui est morte ? Demanda alors Duo avec toute sa délicatesse habituelle
en revenant de la cuisine avec le sac. Il se posa à côté
de Heero et commença à sortir des dossiers tout en lançant
des regards interrogateurs aux autres.
- Je t'expliquerai plus tard. Lui souffla le japonais.
- Oh d'accord. Répondit simplement Duo en s'apercevant que le moment
n'était pas vraiment choisi pour faire le pitre.
Il ouvrit le dossier qu'il avait dans les mains, parcouru quelques pages d'un
mouvement rapide, fronça les sourcils et en prit un autre qu'il feuilleta
de la même manière, avant de lever les yeux sur ses quatre amis
avec un sourire bizarre au coin des lèvres.
- Les mecs ? Quelqu'un sait ce qu'est un septum alvéolé ?
Ils secouèrent négativement la tête après un bref
instant de surprise.
- Ou du surfactant ? Un endothélium alvéolaire ? Un pneumocyte
? Des cellules caliciformes ?
Ils se regardèrent puis tournèrent à nouveau la tête
vers l'américain.
- Ces dossiers parlent de quoi ? Finit par demander le chinois. Duo le ferma
à demi pour lire la couverture.
- Heu... Il a été rédigé par le professeur Ody,
docteur ès physiologie et morphologie animal. C'est le blond que tu as
assommé contre la vitre de l'aquarium je crois.
- Et l'autre ? Fit Quatre. L'américain tendit le dossier qu'il tenait
à Heero pour plonger dans le sac et en sortit un autre dossier, sur lequel
il lut :
- Docteur Belin, spécialiste en génétique moléculaire
des eucaryotes. On essaye quand même ? Proposa-t-il avec un grand sourire
Il mit le nez dans le dossier, parcouru plusieurs pages en rigolant presque
tout seul, le referma et le lança à Wufei.
- Wu-man, y'a vraiment que toi qui peut traduire, c'est du chinois.
- Crétin. Fit le chinois en ouvrant toutefois le dossier pour y jeter
un coup d'il. Quatre se leva et en attrapa un pour le feuilleter, Trowa
lisant par dessus son épaule, alors que Heero essayait de comprendre
quelque chose au dossier que Duo lui avait refilé un peu plus tôt.
Il finit par le refermer d'un air songeur.
-Tu y comprends quelque chose Yuy ? Lui demanda Wufei avec l'air de sous-entendre
qu'étant un hacker et un physicien hors pair -merci docteur J- il était
le seul habilité à traduire ces textes.
-La seule chose que j'ai comprise, c'est que Duo ne devrait pas pouvoir respirer
de l'eau avec ses poumons.
Le chinois haussa les sourcils.
- Tu as réussi à comprendre ça en lisant pendant cinq minutes
?
Heero secoua la tête en souriant, sortit une feuille de la fourre cartonnée
et la tendit à l'autre asiatique. C'était une feuille de format
standard avec un tableau de relevé de mesures et les conclusions qui
en avaient été tirées. Et dans un coin de la feuille, une
petite note écrite au stylo bille d'une écriture sèche
et énervée : " Mais comment il fait pour pas s'asphyxier
dans sa flotte ce crétin de poisson ? "
- Je vois. Fit Wufei en ne se retenant même pas de sourire.
- Moi je crois que j'ai trouvé quelque chose. Intervint alors Quatre
sans lever les yeux de son dossier. Il semblerait que Duo ait des gènes
non répertoriés.
Trowa, la tête sur son épaule, plissa les sourcils, semblant se
demander où son amant voyait ça.
- Par contre je n'arrive pas à savoir pour quoi codent ces gènes
étranges. Rajouta l'arabe en feuilletant d'un air songeur le reste du
dossier.
- Mes excuses Wufei. Fit Duo. Ce n'était pas du chinois, mais de l'arabe.
Tient en parlant d'arabe, Quatre, ça veut dire quoi 'arneb' ? Demanda
l'américain d'un air tout à fait innocent, montrant au passage
qu'il avait une bonne prononciation de l'arabe. Absorbé par ce qu'il
avait sous les yeux, Quatre fit l'immense connerie de répondre.
- Lapin en ara... Mince ! [4]
Il lâcha le dossier dont les feuilles s'éparpillèrent tout
autour d'eux, plaqua ses deux mains sur sa bouche, rougit et retourna se cacher
dans le pull de Trowa.
- Ben voilà ! C'était si dur que ça de le dire ?... Heu...
Mince ! Quatre tu es un... lapin ?! S'exclama Duo, intégrant enfin l'information.
- Ça explique pas mal de choses. Souffla Wufei, ce qui fit rougir passablement
Trowa, alors que Heero s'effondrait de rire sur le canapé, ses ailes
suivant le mouvement, précipitant pour la deuxième fois l'américain
sur le tapis.
- C'est pas drôle ! Fit la voix étouffée du petit blond.
- Ben si, justement ! S'écria Duo qui commençait à être
gagné par l'hilarité du japonais. Plus sérieusement Trowa,
ne nous dit pas maintenant que tu es un caniche nain ou un cochon d'Inde sinon
Heero va vraiment mourir de rire... Heero ? Respire mon vieux !
- Peux pas... Hoqueta le japonais entre deux éclats de rire. [5]
Soudain, Heero se redressa vivement et ses ailes furent aspirés dans
son dos d'une telle manière que les autres s'attendirent à entendre
un 'shlop' suivant le mouvement. Ce qui ne fut pas le cas, mais le japonais
se redressa lentement, le visage un peu rougi à force d'avoir rit et
essuya discrètement une larme de rire qui perlait au coin de son oeil.
Duo se mit à bouder.
- T'es pas drôle. J'te préfère avec des plumes, moi.
- J'ai horreur de perdre le contrôle. Grogna le japonais.
- Je n'appelle pas ça une perte de contrôle, mais rire aux éclats.
Fit Trowa en levant le sourcil, un micro sourire aux lèvres. Heero lui
lança un regard noir puis désigna les dossiers.
- Je pense qu'il faut que l'on sache ce qui se trouve exactement dans ces documents,
seulement on ne peut pas le comprendre seul.
- Les professeurs pourront peut-être nous aider. Proposa Wufei. Heero
secoua négativement la tête.
- Les cinq pilotes des Gundams ne sont pas des humains normaux. C'est un peu
énorme pour n'être qu'une coïncidence, tu ne trouves pas ?
- Un point pour toi, Yuy. Admis le chinois en baissant la tête sur les
dossiers
- Et il y a autre chose. Est-ce que c'est génétique ? Je veux
dire, est-ce que c'est de famille ? Fit Heero en écartant les bras. Je
ne sais rien de mes parents, et c'est pareil pour Duo et Trowa, n'est ce pas
?
Trowa acquiesça de la tête, tandis que Duo gardait le visage obstinément
tourné vers le mur.
- Duo ? Appela le japonais, surpris de n'avoir aucune réponse du côté
de la pipelette pro qu'était Maxwell.
- Je te rappelle que je boude. Fit celui-ci en relevant un peu plus le menton.
Heero lui lança un regard surpris puis roula des yeux, avant de se tourner
vers la symbiose Quatre/pull de Trowa.
-Quatre ? Est-ce que c'est de famille pour toi ? Est-ce que tes parents ou tes
surs sont... comme toi ?
-Non. Répondit l'arabe. Mais je te rappelle que je suis un bébé
éprouvette, ils ont dû mélanger mon tube avec des gènes
de lapins à un moment où un autre. Fit-il avec une pointe de rancur
dans la voie. Il n'aimait visiblement guère la manière artificielle
à laquelle il devait d'être venu au monde.
-Et Sally ? Fit soudain la voix de Duo, l'américain semblant décider
qu'il était resté silencieux suffisamment longtemps. Elle est
médecin, non ? Elle pourrait peut-être nous aider ?
-Elle ne comprendrait peut-être pas tout. Intervint Quatre en sortant
du pull de son amant. Mais elle pourrait sûrement nous en expliquer une
partie.
-Ca impliquerait de la mettre au courant de nos particularités. Fit Heero
en croisant les bras et fronçant les sourcils. Ce n'est peut-être
pas une très bonne idée.
-C'est une femme d'honneur qui ne nous trahira pas, et elle n'a jamais eu aucun
contact avec les professeurs. Nous pourrions lui faire confiance. Fit Wufei,
prenant la défense de la femme-militaire-médecin-résistante.
-Quelqu'un sait où elle crèche en ce moment ? Demanda alors Duo
avec un grand sourire.
-Elle est sur le bateau d'Howard. Répondit simplement le chinois
Les cinq jeunes terroristes se regardèrent, puis Heero se leva brusquement
et se dirigea vers sa chambre.
- On part demain à la première heure. Bonne nuit.
Puis il disparut dans le couloir. Duo croisa le regard de Quatre qui lui disait
clairement : " qu'est-ce que tu fais encore là ? Vas-y ! ",
se leva d'un bond et s'élança à la suite du japonais, lui
tournant autour, en couinant et râlant pour qu'il ressorte ses ailes.
Il tint bon pendant une bonne heure, puis fini par obtempérer quand Duo
menaça de chanter. Faux bien sûr...
[Lézard, vole !] [Entre ciel et terre]
[1] : Shinia : disons qu'il chante 'We are the Champions',
c'est facile de chanter faux sur celle la.
Zissi : tu parles pour toi bien sûr ?? ^_____^
Shinia : -_- ;;;;;;;
[2] :Shinia : prononcez 'ana akoun arneb'. Oui, oui, c'est
de l'arabe ^__^ et un gros poutou à Zina, ma traductrice franco-arabe
perso !!!
Zissi : et ça veut dire quoi ton chinois ?
Shinia : c'est de l'arabe, j'ai dit è_é ! Ah, ben ça, vous
le verrez dans la suite du chapitre ^^
Zissi : messante
[3] : Shinia : D'après 'Les Dragons', collection Mythes
et Légendes aux éditions Hachette jeunesse.
[4] : Zissi: Quaaaaaaaaaaaaaaatre!!!!!! Mon frère!!!!!!
Shinia : Hé ! Lâches-le !!! Tu vois bien qu'il étouffe !!!
Au fait, 'ana akoun' veut dire 'je suis', et le 'akoun' est facultatif
Vala ^^
[5] : Shinia : complètement OOC, oui, je sais
.
-- ;;;;