The werewolf

Avertissements pour cet épisode: LIME!!! (quoique ok, j'ai pas mal éludé la deuxième scène, parce que je savais pas comment faire et j'avoue que j'aime pas du tout du tout, faudra que je réécrive >___<)
Violence, plus un Heero méga OOC mais c'est normal ^_____^
1x5, 1x3, 1veutSally (patapé plize), 1veut2 (ptain décidément O__O; il y va le petit ronchon… c'est la saison faut croire ^______^) 4+3, 3+4?
* * * changement de point de vue pour des personnes qui sont au même endroit.
* * * * * *endroit différent ou quelque temps plus tard
* * * * * * * * * gros trou dans le temps.
Notes: Comme dit Lied-copindemouah: Alors, en scientifique, étudions les mœurs du Heero Lupus garourus (connu aussi sous le nom de Bishonen groar) pendant la période des amours^^
(autrement dit, faisons un peu mériter à cette histoire sa limite d'âge…)  

Chaleurs

Howard poussa la porte avec lenteur et pénétra dans la chambre obscure, sans avoir frappé, refusant de réveiller son occupant. Il dut ôter ses lunettes noires pour pouvoir apercevoir quoi que ce soit; les volets étaient tirés et pas même une lampe de chevet n'était allumée, pour ne pas risquer de déranger le garçon qui avait pour une fois réussi à trouver un peu de soulagement dans un sommeil sans souffrance.
Au bout d'un moment, ses yeux s'habituèrent et le vieil homme put reconnaître les formes sombres comme étant des meubles ou des personnes. Un lit, dans lequel un jeune homme aux cheveux trempés de sueur dormait d'un sommeil lourd, ses jambes repliées haut contre son torse, ses bras ouverts comme abandonnés; à côté du lit une jeune femme à demi assoupie dans un fauteuil, tête basse, et dans l'autre coin de la pièce, assis à l'envers sur une chaise de paille d'une allure inconfortable, bras croisés sur le dossier, menton sur l'avant-bras, celui que le vieil homme cherchait.
-Duo? murmura Howard.
Il vit des yeux briller dans l'ombre en se tournant vers lui, puis, en silence, le garçon abandonna son poste de vigile dans le coin de sa chambre pour marcher jusqu'à la porte.
-Allons dehors, conseilla-t-il dans un chuchotement, désignant les deux formes endormies du pouce.
Le pilote à la natte et le chef des Sweepers ressortirent dans le couloir, et Duo ferma la porte avec délicatesse, puis se retourna vers son vieil ami.
-Comment va-t-il? demanda l'homme au bouc, clignant des yeux contre le retour de la lumière.
Duo soupira longuement et s'étira, essayant de dénouer ses muscles crispés à force d'être resté trop longtemps immobile.
-Pour le moment ça va, il est entre deux crises. Ca fait déjà plus de deux heures qu'il dort, on espère que ça va encore durer un peu…
Howard fit la grimace. Ils considéraient que deux heures de repos entières était un gros progrès? Ca n'augurait rien de bon pour le pauvre garçon. Howard n'avait jamais rencontré le pilote de L3 personnellement, mais il avait entendu parler de lui par Duo, et les amis de Duo étaient ses amis. Et puis, savoir que l'un de ces garçons souffrait à ce point, alors qu'ils avaient tous déjà tant donné pour la cause…
-Et la jeune femme?
-Cathy? elle est tellement épuisée, je ne pense pas qu'elle ait vraiment dormi depuis qu'elle est là. Ca lui fait du bien de faire une sieste… Elle ne veut pas prendre de tours comme nous on fait.
-Et Quatre? Pourquoi ne veut-il pas aller le veiller lui aussi? demanda Howard après s'être assuré que pour une fois, le petit blond n'était pas dans le couloir.
Duo haussa les épaules.
-Trowa et lui ont eu des mots avant que Tro ne tombe malade. On n'arrête pas de dire à Quat qu'il peut venir quand même, il se force à respecter l'ordre de Trowa… il est bête. Enfin…
Se mordillant la lèvre, le vieil homme dévisagea son jeune ami. Duo avait l'air fatigué, des cercles noirs sous les yeux.
-Et toi, tu ne peux pas te reposer?
-Pas encore mon tour, Howie, je suis toujours de service, répondit l'américain avec un sourire las.
-Et les deux autres?
-Wufei est en train de dormir dans sa chambre, il est resté debout toute la nuit, Trowa a vraiment eu de grosses crises. Heero… je sais pas, je crois l'avoir entendu dire qu'il allait jeter un coup d'œil aux Gundams, mais j'ai pas fait vraiment gaffe. M'enfin son tour est après Wu, alors…
Howard soupira.
-Je suppose qu'essayer de te convaincre d'aller dormir ne servirait à rien?
-Nope, à rien du tout.
-Même si Cathy est là?
-Même. Elle est pas assez forte pour le maîtriser toute seule.
-Même si Trowa dort en ce moment?
-Il pourrait se réveiller n'importe quand, d'une second à l'autre, mec, objecta le garçon à la natte.
Le vieil homme soupira encore une fois.
-Tu verrais un gros inconvénient à m'accompagner dans une des chambres d'à côté?
-Pourquoi?
-Sally m'a suggéré de vous demander personnellement, à propos de sa maladie… Et elle m'a laissé entendre que ça pourrait prendre du temps. Viens, je ne voudrais pas déranger Trowa avec notre conversation.
Etouffant un bâillement, Duo le suivit. Ils s'installèrent dans la petite salle TV en bout du couloir. Duo s'assit encore une fois à califourchon sur sa chaise, se balançant en équilibre sur deux de ses pieds.
-Mon équipage ne risque rien j'espère?
Duo pouffa dans sa main.
-Tant qu'ils ne prévoient pas de se bagarrer avec l'un des quatre autres… ou de s'envoyer en l'air, non… lâcha-t-il, gloussant à l'idée.
-Duo… Ce virus, c'est quoi exactement?
Reposant les pieds de sa chaise sur le sol, Duo fixa Howard, soudain très sérieux.
* * * * * *
Le pilote japonais pesta contre la goutte qui dégoulinait le long de son nez et passa le rebord de son débardeur sur son visage pour éponger la sueur, puis, le gardant relevé, s'appuya au mur métallique. Il eut un frisson de choc quand ses reins entrèrent en contact avec le métal froid, puis un soupir. Ca semblait aider un peu.
Mais le mur se réchauffa vite et Heero dut changer de place pour se trouver un autre endroit suffisamment frais.
Le manège dura une bonne quinzaine de minutes avant que le pilote 01 n'abandonne sa tentative pour se rafraîchir et ne quitte la cale où avait été remisé son Gundam. Les moteur fonctionnant dans les salles annexes n'aidaient pas à refroidir, pour sûr.
Depuis ce matin, Heero avait chaud... il ne comprenait pas pourquoi; il faisait, non pas froid, dehors, mais du moins pas si chaud que ça, et certaines parties du porte-avion n'étaient pas chauffées et se trouvaient en-dessous du niveau de l'eau, cela aurait dû suffire…. aurait dû.
Il se sentait aussi un peu piégé dans le bâtiment, pas vraiment claustrophobe, pas encore, après tout il y avait de la place, l'endroit était immense; mais la simple idée qu'il ne pouvait pas s'en aller quand il le voulait, qu'il y avait de l'eau partout autour de lui… Brrr.
Mais après tout il n’avait pas le choix. C'était quand même spacieux. Pas suffisamment pour passer une pleine lune correcte, certes, et en plus c'était plein de Sweepers de partout, ce qui rendrait la nuit de transformation dangereuse, pour les humains comme pour la sécurité des garous, mais Howard lui avait promis qu’ils toucheraient terre à temps pour cette nuit et qu’il pourrait aller se perdre dans une forêt... même si le vieil homme ne savait absolument pas pourquoi. Duo avait dit qu’il lui expliquerait mais Heero ne savait pas si il l’avait déjà fait.
Mais ce qui au début avait été de la gêne devenait progressivement quelque chose d’autre entièrement. Normalement, la chaleur provoquait de la torpeur, mais là c'était le contraire. Ce n'était pas à proprement parler de la réelle chaleur, maintenant qu'il y pensait. Comme une fièvre, un feu brûlant et glacé à la fois…
Il était énergique depuis son réveil, au point où il avait dû sagement renoncer à son café parce que ça n'aurait fait que rendre insupportable ce qui était déjà limite énervant, et devenait petit à petit survolté, pire que Duo dans ses plus terribles crises d'hyperactivité; mais ce n’était pas une sensation de panique, pas quelque chose de négatif, juste... de plénitude, de puissance, de possibilités ouvertes et dévoilées petit à petit... mais il n’arrivait pas encore à les voir correctement, à comprendre.
Il sentait une chose monter, comme la première fois qu’il avait senti le Loup, une lame de fond puissante et inéluctable. Mais même le Loup ne pouvait pas lui dire ce que c’était, c'était encore trop flou, trop peu concentré. Il était incapable de rester totalement immobile plus de quelques minutes, il était plein d’anticipation, comme un enfant devait se sentir quand il était censé aller à une fête foraine... enfin il le supposait vu qu’il n’était jamais allé à une fête foraine ou une chose du genre, mais Duo lui avait déjà décrit ce genre de sentiment et il avait pu le voir à l’œuvre plusieurs fois. Il avait raison, c’était bien de l’anticipation... mais il ne savait absolument pas ce qu’était ce qu’il attendait avec tant de fièvre.
Il avait chaud, si chaud… Il se dirigea vers les douches d'un pas à la fois tendu et allongé. Une fois devant les stalles, il se déshabilla au fur et à mesure, indifférent à l’endroit où atterrissaient ses habits, et ouvrit un robinet d’eau froide en grand. L’eau glacée lui fit du bien... cinq minutes. Puis il s’habitua à la température et l’impatience reparut. L'eau glacée, au lieu de le refroidir, lui donnait un coup de fouet, faisant courir son sang encore plus vite dans ses veines… Non, ça avait été une mauvaise solution.
Jurant et pestant, il abandonna sa douche avec un grand geste enragé et sortit des douches, ses vêtements dans la main, aussi nu qu’au jour de sa naissance. Il avait trop chaud pour remettre ses vêtements et n’avait aucune envie de les tremper. Quand on avait chaud, porter des vêtements humides ne faisait qu'accentuer l'inconfort, de toute façon. Il se dirigea vers les quartiers des chambres, vers les pièces qu’on leur avait données ; au passage, une arrière-pensée lui fit agripper une serviette de bain et la nouer autour de ses reins. Il n’avait pas envie que Howard lui prenne la tête sur son stade d’habillement, c’était une mauvaise idée de l’indisposer, après tout ils étaient /sur son territoire/ chez lui. Bon sang, qu'il avait envie…
Sans avoir croisé personne, ce qui était probablement une bonne chose étant donné son humeur, il atteignit le couloir où se situaient les chambres qu'on leur avait données, jetant au passage un coup d'œil par la porte entrebâillée dans la chambre donnée à Wufei.
Et eut l'impression d'avoir reçu un coup de pied dans le ventre. Il resta là, souffle coupé et légèrement étourdi, sans comprendre tout de suite ce qui l'avait tant surpris.
Le chinois était allongé à plat ventre sur un canapé, et lisait un livre. Mais ce n’était pas ça qui l’avait arrêté. C’était tout un complexe cocktail, composé de la position cambrée plutôt intéressante du chinois, mélangée à son pantalon blanc serré sur les reins, additionnée à ses petites lunettes de lecture sur le nez et surtout à ses cheveux noirs dénoués, flottant librement sur ses épaules.
Plus besoin de chercher, il savait.
La brûlure froide avait trouvé son exutoire.
Sans réfléchir une seconde à ce qu'il faisait, Heero s’adossa au cadre de la porte et admira sans retenue la vue. Il n’avait jamais jusque lors trouvé que Wufei était attirant, pas de cette manière-là… mais c’était surtout dû à son attitude solitaire et hautaine et à sa conduite stricte, à sa voix autoritaire, jamais douce, toujours supérieure et quelquefois carrément agressive... Seulement, le tableau qu’il formait à présent, oublieux de sa présence, mettait soudain en valeur un côté de lui qu’il n’avait jamais vu depuis le retour de sa mémoire, un côté... vulnérable...  Et attirant. Incroyablement attirant.
Maintenant que les sourcils ne se fronçaient plus, il pouvait voir la couleur si sombre de ses yeux, la longueur de ses cils ; maintenant qu’il ne faisait plus de moue méprisante, il pouvait voir la plénitude de ses lèvres...
Heero cligna des yeux. Wow. Etrange comme réaction. Il n'avait jamais pensé à Wufei de cette manière avant.
Il réfléchissait rarement sur des choses aussi insignifiantes que son orientation sexuelle. Mais un jour qu'il n'avait rien à faire, il s'était laissé dériver sur ce sujet. (en partant de Duo évidemment. Qui d'autre que lui pouvait lui faire penser à des choses aussi frivoles et éloignées de ses préoccupations habituelles? )
Il avait comparé les statistiques et les probabilités, et l'idée lui était venue qu'il n'était peut-être pas réellement homosexuel, même si la seule personne pour qui il avait auparavant éprouvé du désir se trouvait être un mâle. Après tout, il ne fréquentait pas tellement de gens avec qui il serait susceptible de nouer ce genre de rapports, et Duo était suffisamment unique pour faire douter bien des gens de leurs tendances. Il était tellement différent qu'une simple étiquette du genre "garçon-fille" ne suffisait pas à le définir entièrement. Et puis ils passaient tellement de temps ensemble, quelquefois dans une promiscuité extrême, cela suffisait bien pour éveiller quelques-unes des pulsions homosexuelles latentes que rencontre fatalement un jour ou l'autre tout individu, aussi hétérosexuel soit-il. Heero ne comptait plus le nombre de fois où il avait dû partager le lit de l'américain et avait servi de nounours. Sans compter le fait que la pudeur non existante du garçon à la natte ne risquait pas de l'empêcher de se balader en caleçon ou même carrément à poil sous son nez. Et même si son corps était définitivement masculin, il était d'une sveltesse et d'une grâce troublantes… Alors de là à rêver de lui des fois, il n'y avait qu'un pas.
Mais le simple fait de s'intéresser à Wufei à présent prouvait amplement qu'il était, sinon homosexuel, du moins largement bisexuel. Wufei n'adoptait certainement jamais le comportement ambigu du garçon à la natte. Et son profil était beau et noble, et plein de caractère… mais il était définitif qu'il n'avait pas le moindre trait qui aurait pu convenir à une fille, contrairement à un certain autre pilote qui d'ailleurs en désespérait. Non, Wufei était définitivement mâle… Et un mâle du genre dominant.
Ou alors il avait juste un fétichisme particulièrement vivace envers les gens à cheveux longs, pensa Heero avec un reniflement ironique.
Soudain, il cessa de réfléchir à ces choses qui ne l'avançaient à rien et n'aidaient certainement pas à étouffer son brusque désir, et s’avança vers l’autre pilote. Celui-ci redressa la tête et le regarda par-dessus ses lunettes, d’un air qui lui demandait clairement ce qu’il faisait là. Wufei avait senti sa présence avant, mais tant que l'autre respectait son espace personnel, il avait fait comme si le loup-garou n'était pas là du tout, même s'il se demandait ce qu'il pouvait bien glander sur le pas de sa porte.
Heero avança encore, une main sur sa hanche.
Wufei se redressa sur un bras pour le regarder et fronça les sourcils, mais c’était beaucoup moins intimidant que d’habitude ; sans doute dû à la mèche rebelle qui s’évadait de derrière ses oreilles pour aller se balader sur son nez et aux petites lunettes rondes d’intello. Heero eut un tout petit sourire appréciateur et amusé.
/Wufei wa kirei desu, ne/
-Tu voulais quelque chose, Yuy ? finit par lâcher le pilote aux cheveux noirs quand il comprit que l’autre n’avait rien l’intention de faire mis à part le regarder.
-Oui, répondit le japonais en se penchant sur le canapé où Wufei était toujours allongé à plat ventre, son dos cambré pour le regarder l'empêchant de bouger très loin.
/est-ce qu'il me menace?/ se demanda le Tigre. Mais Heero ne semblait pas agressif, juste…
/dominant/

-Et c’est quoi ? demanda le pilote de Shen Long brusquement, plutôt agacé.
Le regard prédateur /oui c'est le mot, prédateur/ /je suis une proie et il est un prédateur/ de Yuy était déjà assez énervant, surtout quand il le sentait se balader sur ses cheveux dénoués qui le faisaient se sentir plus ouvert, plus fragile; mais quand son odeur curieusement modifiée envahit ses narines, son odeur devenue chaude et pleine d’effluves qui agissaient sur lui sans qu’il les comprenne, il se sentit soudain rougir sans trop savoir pourquoi.
L’énervement devint de l’appréhension.
'j'ai un peu… presque peur. Il ne me fera pas de mal, et pourtant, je ne sais pas, il est… inquiétant'
/il vaudrait mieux s'enfuir/

Heero laissa lentement, délibérément, errer ses yeux au bas du t-shirt, sur les reins cambrés du pilote de L5.
-Ce que je veux…? répondit-il, faisant écho à une question que le garçon avait déjà presque oublié avoir posé.
Wufei avait une drôle de sensation au creux du ventre tout à coup...
Et soudainement sa mâchoire manqua tomber par terre, comme pour imiter la chute soudaine de la serviette qui couvrait 'avait couvert' les reins du japonais.
-Toi.
Le livre suivit la serviette sur le sol.
* * * * * *
Las de s'éterniser dans les couloirs menant à la chambre de Trowa, l'oreille tendue, le jeune arabe monta sur le pont et se dirigea vers la passerelle menant à terre. Entouré de deux mécaniciens, Howard était enfoncé jusqu'aux coudes dans les entrailles d'un hélicoptère dont le moteur était en cours d'upgrade. Le garçon, après avoir hésité quelques secondes, s'approcha de lui. Il dut attendre quelques minutes que l'homme ne soit pas en position de se faire mal s'il le surprenait; il se souvenait trop bien des centaines de fois où l'un des pilotes de Gundam s'était pété le crâne sur une pièce de machinerie parce que quelqu'un était arrivé derrière lui sans prévenir.
-Monsieur Howard? finit-il par lâcher d'une petite voix quand le vieil homme s'extirpa enfin du moteur.
L'homme à la moustache se retourna vers lui, s'essuyant les mains dans un chiffon plein de cambouis, et le dévisagea quelques secondes. Mal à l'aise, Quatre se demanda ce qu'il pensait; ce n'était pas facile à deviner derrière ses éternelles lunettes noires.
-Je… Monsieur Howard, je dois y aller. Est-ce que… Quelqu'un vous a expliqué?
-Hmm…
L'homme à la chemise hawaïenne hocha la tête, et fit signe à Quatre d'attendre un peu, son visage toujours inexpressif. Son odeur laissait transparaître un peu de malaise, mais rien de très grave.
-Les gars? lâcha-t-il. Je vous laisse continuer seuls deux minutes, ok?
-Ok Howie, lâchèrent ses mécaniciens sans avoir l'air de se soucier de son départ.
Le vieil homme entraîna le petit blond vers la passerelle et se tourna vers lui.
-Duo m'a expliqué, oui. J'avoue que j'ai du mal à y croire, m'enfin on saura vite si je suis la victime du meilleur canular depuis le siècle dernier… Je voulais savoir comment va ton camarade, depuis tout à l'heure, tu as des nouvelles?
Quatre baissa la tête.
-Toujours en train de dormir, pour le moment.
-Est-ce que tu penses qu'il va s'en tirer? demanda Howard, laissant tomber ce qu'il avait de tact.
-On ne sait pas encore. On doit attendre cette nuit. Mais je n'en peux plus de rester là à rien faire, alors…
Howard hocha la tête.
-Ouais, tu as raison, tu ferais mieux d'aller courir un peu, histoire de t'éclaircir les idées… Mais je voulais savoir… Duo n'est pas contaminé, vous avez dit?
-Non. C'est le dernier à ne pas l'être. Nous faisons tout pour qu'il le reste. Vous n'avez pas à vous en faire pour lui, ajouta-t-il quand il eut perçu la vague de soulagement mêlée de gêne venue du vieil homme.
Le scientifique hocha la tête, pensif. Après tout, ils n'essayeraient pas volontairement de le contaminer, mais les autres non plus n'avaient pas été contaminés volontairement.
-Tu penses qu'il survivrait, si…?
-S'il est contaminé à la bonne période… Bien sûr. J'ai survécu, moi, après tout.
-Il y a moyen de savoir ce qu'il pourrait être?
-Non… Enfin, selon ce qu'une Louve-garou nous a dit, les Anciens de la meute le peuvent plus ou moins, mais c'est plus un instinct ou une impression que quelque chose de fondé. Comme de deviner le caractère de quelqu'un à partir de son groupe sanguin ou de son horoscope, vous voyez…
-Et il pourrait être n'importe quoi?
-A ce que j'ai compris… son animal intérieur peut être n'importe quoi. Mais … il ne pourra en prendre la forme que si l'animal en question est assez résistant et assez grand.
-C'est à dire?
-Il faut que la masse de l'animal soit au moins égale à celle de la version humaine, sinon ça ne marche pas.
Howard fronça les sourcils d'un air absorbé et se gratta le crâne.
-Je ne comprends pas… Comment un des deux corps peut-il avoir une masse plus importante que l'autre?
Quatre eut un petit sourire tendu. Tout le monde pensait à ça en premier apparemment…
-Si ça peut vous soulager, Sally et les professeurs out tous réagi de la même manière… personne n'y comprend rien non plus, et pourtant eux, ils ont une formation en médecine, ajouta le garçon avec un petit sourire.
Son sourire disparut vite et il baissa les yeux. Howard fronça les sourcils et le dévisagea, pensif.
-Bon, ok, gamin. Qu'est-ce qu'il y a?
-Mais… mais rien, bafouilla Quatre en levant les yeux sur le vieil homme.
-Mon œil. Tu te balades avec une figure longue comme un jour sans pain, tu soupires à en faire tourner des moulins, tu as des yeux de chien battu, et en plus tu traînes les pieds quand tu marches! Alors ne me dis pas que tu vas bien.
-Comment pourrais-je aller bien avec mon camarade dans cet état? répliqua Quatre, agacé.
-Certes, accorda le vieil homme, radouci. Mais ce n'est pas juste de l'inquiétude pour un ami, ça, ajouta-t-il en passant son pouce sur les sourcils froncés du garçon.
-C'est de la culpabilité, monsieur, répliqua Quatre, irrité. Ok? De la culpabilité.
-Ce n'est pas entièrement de ta faute, petit, tu sais…
-Ha!
Quatre secoua négativement la tête, refusant de regarder le vieil homme en face. Ne pouvait-il pas le laisser partir? Quelquefois l'arabe maudissait son éducation qui lui interdisait de planter là une personne.
-Tu te sens coupable de la contamination de Wufei aussi?
-Un peu, mais ce n'est pas pareil, c'était un accident! J'ai oublié de penser qu'un contact avec mon sang était dangereux, mais il avait oublié aussi, et c'est lui qui a posé sa main pleine de mon sang sur sa blessure, pas moi… Et puis sa transformation s'est bien passée à lui, et il a l'air de s'adapter à sa nouvelle nature!
-J'admets que la transformation de Trowa se passe mal, mais c'est un hasard… Tu n'as pas choisi la date, tu l'as contaminé par hasard, tu n'as pas choisi de le faire! Il n'a pas eu de chance, c'est tout. Ce n'est pas juste de ta faute, tu sais, pas plus que pour le petit chinois
-Ce n'est pas pareil du tout!! Vous ne savez pas comment ça s'est passé. C'est de ma faute, de ma faute, et tout ce que vous pouvez dire n'y changera rien!!!
Au diable son éducation. Quatre se précipita vers la passerelle, sans prêter attention aux cris de Howard derrière lui.
* * * * * *
Wufei ne comprenait toujours pas pourquoi il s'était laissé faire quand ce fut fini; quand après de longues minutes où ils manquèrent tomber, éreintés, dans un sommeil réparateur, Heero réussit enfin à rassembler un sursaut d'énergie et se retira de lui, et puis se laissa aller sur son dos, encore haletant.
Après quelques autres très longues minutes, qu'ils passèrent l'un contre le dos de l'autre, épuisés tous deux, Yuy l'étreignit brièvement, fort, et laissa glisser ses mains sur ses flancs en les retirant. Il se releva sans un mot, ne sachant pas trop quoi dire, et contempla quelques secondes le garçon allongé sur le canapé. Wufei avait les yeux fermés, le souffle court encore, et ses cheveux étaient emmêlés, sa peau rougie.
-Wufei…
Heero se tut. Ce qui s'était passé avait été… Des tas de choses, toute une foule de nouveautés, de choses inattendues, de surprises et de découvertes. Passionné, sauvage presque…
En fait, ça avait été la première fois qu'il avait fait l'amour. Vraiment fait l'amour.
Il n'avait pas été vierge, non… L'entraînement du docteur J ne lui avait pas vraiment laissé le choix avec ça. Après tout, qu'avait comme valeur une chose aussi insignifiante que la virginité? Dans son optique, entraînement du soldat le plus performant et le plus obéissant possible, absolument aucune.
C'était très simple, quand on regardait la question d'un angle tactique. Premièrement, Heero pourrait avoir à extraire des informations autrement que par la violence; peut-être en proposant son corps en échange, ou tout simplement en gagnant la confiance d'un ennemi pour extorquer des confessions sur l'oreiller, donc il avait à apprendre les mécaniques de la chose, les manières de faire pour plaire à un partenaire sexuel, mâle ou femelle. Deuxièmement, le viol était une méthode de torture comme une autre, et, comme pour les autres, il devait y être désensibilisé.
La seule chose que ça avait désensibilisé en lui, c'était la possibilité d'apprécier un jour, réellement, un contact sexuel où il ne serait pas en position de contrôle. /plus jamais montrer le ventre à quelqu'un./
En fait, il avait cru… il avait cru, que cet… entraînement avait définitivement abîmé sa capacité à regarder le sexe avec d'autres yeux que des yeux blasés et indifférents. Que si il avait encore des envies, c'était juste à cause de la puberté, et de toutes ces hormones. Que s'il désirait quelquefois toucher Duo, c'était uniquement en matière de confort, de plaisir né de contact humain, qu'il n'avait ni envie ni besoin d'aller plus loin, au final, tant qu'il pouvait le tenir … et l'embrasser peut-être.
Jamais l'un de ses entraîneurs ne l'avait embrassé. Pour quoi faire?
Et puis ce feu intense s'était répandu en lui sans avertissement, et il n'avait plus du tout pensé à ça, juste au fait que le chinois était jeune et fort et souple et beau et extrêmement désirable, et qu'il le voulait, voulait le dominer, voulait le capturer, le captiver, le séduire, voulait connaître son corps sur le bout des doigts, le faire hurler et gémir et chanter et frémir, et en tirer tout le plaisir qu'il pourrait, pour lui-même comme pour le garçon. Voulait…
Mais en temps ordinaire il savait qu'il n'aurait pas même pensé à toucher à Wufei comme ça. Et il se rappelait qu'il ressentait cette étrange pulsion avant même de le voir. Chang avait été au bon endroit au bon moment… enfin, ça dépendait sûrement du point de vue; quand il serait à nouveau en état de réfléchir, son homologue chinois ne serait sûrement pas de cet avis.
Aurait-il pris n'importe qui? Il ne pensait pas. /surtout pas un non garou./ Mais quand même…
Et il n'était toujours pas rassasié. Le feu froid s'était calmé, presque éteint, mais il en sentait les braises encore en lui, et il savait que cette nuit, avec la pleine lune, l'animal en lui les réveillerait pleinement. Et qu'il recommencerait sans doute avec le premier qui lui tomberait sous la main et qu'il trouverait suffisamment attractif…
-Hey, 'Fei… Wufei. Arigato gozaïmassu, domo… remercia-t-il en se courbant en avant, formel, très sérieux, pour ne pas que l'autre pense qu'il se moquait, le méprisait.
Le japonais laissa glisser le long de ses doigts sur la colonne vertébrale du chinois, lui tirant un frisson de plaisir rassasié auquel son corps trop épuisé n'arrivait même pas à réagir, puis le laissa seul dans la pièce, après un rapide baiser sur sa nuque marquée de l'empreinte de ses mâchoires. Wufei n'était pas en état pour un deuxième round maintenant…
/et pour le moment j'ai envie de chasser/

* * *
La porte se referma en douceur derrière le japonais, et Wufei tourna lentement la tête pour la regarder. Il se sentait épuisé, mentalement comme physiquement.
Le chinois ne comprenait pas ce qui venait de se passer, en grande partie parce qu'il n'avait pas encore récupéré, n'arrivait pas encore à réfléchir, son corps moulu d'un plaisir qui l'avait laissé sans autres pensées que les plus basiques, les réactions aux sensations qui l'avaient parcouru. Son cerveau avait refusé de fonctionner à l'instant même où le loup-garou s'était penché sur lui, et il s'était laissé entraîner sans même avoir le temps ne serait-ce que de songer à protester, ne serait-ce que de se rappeler des quelques raisons qui auraient valu qu'il proteste. Bon, il avait protesté et lutté, mais… Ca n'avait pas été réellement pour s'enfuir. Il avait prétendu, et l'autre savait qu'il prétendait. C'était pour la dominance qu'il avait lutté… et perdu, d'ailleurs.
Au moment même où l'odeur l'avait atteint… L'odeur, qu'est-ce qu'elle avait eu au juste? se dit-il, ses pensées dérivant lentement, à la limite du sommeil. Il essaya de s'en rappeler avec exactitude, et une étincelle d'excitation remonta de ses reins sous le souvenir. Elle avait été presque comme d'habitude, mais plus… chaude, plus musquée, et il y avait eu une différence particulièrement perceptible mais qu'il n'arrivait pas à reconnaître. Une senteur prenante, captivante, enivrante, sous laquelle il avait totalement cessé de penser avec sa tête pour laisser parler ses envies brusquement éveillées… En tout cas ce qui était sûr c'était que ça l'avait vite mis en train… Autant que les yeux si intenses de l'adolescent, penché sur lui avec la détermination farouche de le faire sien.
Et puis l'épuisement bienheureux fit place au réveil lent de son corps… et de toutes les petites douleurs que le plaisir avait anesthésié et transformé en source de jouissance.
Son cou, sa nuque et ses épaules étaient couverts de suçons et de morsures. Pas assez profondes pour réellement saigner, la plupart de ces traces étaient quand même bien marquées et mettraient du temps à disparaître. Il jeta un coup d'œil; il sentait des bleus commencer à apparaître, sur les biceps, les poignets et les hanches, qui il l'aurait parié avaient l'exacte forme des doigts de Yuy; ceux-ci s'étaient enfoncés dans sa chair avec un peu trop d'enthousiasme…
Certes, sur le moment ça ne lui avait pas du tout paru si excessif; au contraire. Juste… Juste une preuve de sa force immense, quelque chose d'à la fois effrayant et enivrant; sentiment exaltant né du fait de savoir que le Loup l'avait totalement à sa merci et pouvait lui briser les os d'une simple pression… et pourtant qu'il n'en faisait rien, se contentant de baisers et de caresses, brusques, certes, mais jamais vraiment violents. Et maintenant, il en portait les marques.
Mais le pire c'était encore son pauvre postérieur, se rendit-il compte quand il tenta (très brièvement seulement) de s'asseoir.
-Aouh! glapit-il en exécutant un saut de carpe qui le repositionna à plat ventre.
Il se sentit rougir, et baissa la tête entre ses bras croisés, se cachant derrière ses cheveux en broussailles, ses pensées un mélange confus où se croisaient l'exact souvenir de ce qui s'était passé et de l'empressement qu'il avait mis à l'accueillir, et les remarques que pourrait et qu'allait sans doute faire une certaine personne quand elle verrait avec quelles précautions il se déplaçait. Sans blague, c'était à se demander s'il ne devait pas se munir d'un coussin à trimbaler directement avant de sortir… Il allait pour sûr devoir faire très attention à son expression s'il voulait s'asseoir en public pendant quelque temps. Ou sinon sa réputation en serait définitivement fichue.
Et là, l'ampleur de ce qui venait de se passer le frappa vraiment.
Mais qu'est-ce qui lui avait pris, bordel?!
* * *
Un Sweeper qui passait devant la porte close eut la surprise d'entendre une litanie de mots chinois mêlés au nom du pilote japonais. A entendre le ton, ce n'étaient pas des compliments. Plutôt des malédictions et des jurons bien placés. Puis des bruits de coussins frappant des murs, et puis un glapissement de douleur, suivi d'une litanie toute nouvelle de jurons.
Il haussa les épaules, et passa son chemin. Qu'ils étaient bizarres ces pilotes.
* * * * * *
-Heero? où tu vas?
Le garou se retint de sauter à la gorge de Sally que, distrait, il n'avait pas entendue sortir de sa salle d'études, et se contenta de découvrir brièvement les dents en un rictus agressif.
-Hem, Heero? Tu as l'air… féroce ce soir, fit-elle remarquer d'un air légèrement circonspect.
Il éclata d'un rire bref.
-C'est la pleine Lune ce soir, Sally, répliqua-t-il d'un ton qui tançait subtilement l'ignorance du médecin.
-Oh. C'est pour ça que tu me montres les dents, alors? demanda-t-elle avec une touche de sarcasme.
-Je veux chasser, répondit-il sans réfléchir, sa voix grondant malgré lui.
La chasser elle? pensa-t-elle une seconde, avant d'écarter fermement cette idée.
La toubib le regarda quelques minutes en silence, notant les différences de comportement du garçon. Ses muscles étaient tendus, ses mains se fermaient et s'ouvraient par spasmes, et il se balançait sur l'avant de son pied, comme s'il s'apprêtait à bondir. Il avait l'air plus féroce et tellement plus instable… Elle avait l'impression que le moindre regard de travers pourrait le faire décider qu'elle serait tout à fait acceptable en tant que proie. Après tout, il était réellement plus haut placé que les simples humains dans la chaîne alimentaire maintenant, se dit-elle.
Heero dévisagea la femme. Il avait eu l'intention de repartir aussitôt, mais sa réaction immédiate au jeune médecin l'intrigua. Sally ne l'intéressait pas vraiment, elle n'était pas capable d'étancher son besoin. Elle était belle et bien faite, et elle avait du caractère à revendre, mais il lui manquait quelque chose…
/son odeur est trop fade/

Ce n'était pas une garou. Voilà. Elle ne sentait pas comme il fallait. Elle ne portait pas son odeur à lui, l'odeur des membres de sa meute.
Mais elle soignait un membre de son clan, elle s'occupait de Trowa… Elle était donc un peu de sa meute quand même, il avait dû l'accepter, puisqu'il la laissait toucher un membre gravement malade. Donc elle était une sorte de… membre honoraire?
Elle portait un peu l'odeur de Trowa.
Il s'approcha d'un pas souple et silencieux, comme s'il la traquait, et elle recula d'un petit pas malgré elle. Il avait senti le début de méfiance dans son odeur depuis longtemps, et maintenant il sentait de la peur, mais ça ne l'étonna pas; elle aurait été folle de ne pas avoir peur. Par contre, avoir peur de lui et ne le montrer que si peu, il devait avouer qu'il l'admirait ; peu de personnes, mâles ou femelles, avaient autant de cran.
Il se pencha vers elle, lentement, yeux mi-clos, respirant les senteurs émanant d'elle. Pour son odorat surdéveloppé, elle empestait les médicaments, le rouge à lèvres et la poudre de son revolver, mais dessous… C'étaient surtout ses mains qui portaient l'odeur de Trowa, cette odeur où l'humain se mêlait au garou, l'effluve d'un corps humain faible et souffrant au relent d'une bête sauvage et forte. Il serra les dents.
-Il ne faut pas qu'il meure, chuchota-t-il sans la regarder, yeux toujours mi-clos. Il est de ma meute et je ne peux rien faire, Sally, mais toi tu peux… Et tu vas.
Une menace? Elle se tendit et recula d'encore un pas. Malheureusement, à part dans le mur, il n'y avait plus nulle part où reculer. Les yeux bleu sombre brillaient d'une lueur trop intense, trop concentrée. Yuy avait l'air d'un fou ou d'un exalté, d'un fanatique religieux, et elle se demanda si sortir et l'appeler n'était pas la bêtise qui allait lui coûter la vie. Il n'était jamais très normal en temps habituel, mais là, elle le trouvait singulièrement dérangé… mais si elle lui en faisait la remarque, il serait fort capable de s'énerver sur elle.
Il ouvrit les yeux et se rendit compte qu'il était suffisamment proche de la femme pour que sa chaleur corporelle l'atteigne à travers le peu d'air qui les séparait. Les braises de la passion se ravivèrent légèrement et il la dévisagea longtemps, plongeant ses yeux au fond des siens. Il leva une main, lentement, et effleura du bout des doigts le visage du médecin, dont les yeux s'agrandirent imperceptiblement.
'Elle est humaine, Heero, humaine…'
/… oui, pas de ma meute, c'est vrai…/
'… et ça serait trop dangereux pour elle. Elle est fragile, et si je la contamine elle peut en mourir… Et si je suis aussi brusque avec elle qu'avec Wufei… '
Souvenirs d'une étreinte brève et violente, morsures, bagarre pour la dominance…

Wufei était un guerrier en plus d'un garou, solide et résistant, et plein d'un feu passionné. Mais Sally…
/pas blesser une femelle/

-Sally… siffla-t-il à travers ses dents serrées. Sally, tu retournes à Trowa. Tu le veilles. Et tu empêches Catherine et … Et Duo de sortir, de toute la nuit. Vous n'ouvrirez à personne. Surtout pas à moi. Quand Trowa commencera à changer vous irez dans l'autre pièce et vous le laisserez. Je viendrai le chercher.
Ca faisait presque physiquement mal d'ajouter Duo à la liste des personnes qui devraient se claquemurer cette nuit, mais il savait qu'il n'avait pas le choix. Duo ne devait pas devenir un garou. Duo devait rester humain. Ils avaient besoin qu'au moins l'un d'entre eux soit pleinement humain.
Mais humain ou pas il faisait partie de sa meute et il était fort et résistant et… et il lui plaisait depuis si longtemps qu'il n'avait pas à y penser à deux fois pour savoir que si l'américain s'approchait de lui maintenant, il allait lui sauter dessus aussi sec. Pour l'instant, il était encore rassasié d'avec Wufei, mais il savait que ca ne le gênerait pas longtemps s'il pouvait mettre la main sur le garçon aux cheveux longs. Il savait aussi sans savoir comment que l'apaisement de ses besoins ne durerait pas… Et que l'urgence ne ferait qu'augmenter avec la tombée de la nuit.
Est-ce qu'il devrait aller trouver Quatre aussi pour étancher sa soif de… contacts?
Non… Non, Quatre était comme son petit frère; pas un compagnon potentiel. Il irait chasser cette nuit, courir et chasser, et hurler à la Lune peut-être, et demain sûrement ça serait passé avec la pleine Lune.
-Et débrouille-toi pour faire passer le mot aux Sweepers. Je vais me mettre sur le pont. Que personne n'y aille. Qu'ils restent au maximum enfermés dans leurs quartiers. Et qu'ils pointent pas leur nez dehors après la tombée de la nuit, bordel!
Sally frémit quand elle se rendit soudain compte qu'il regardait sa poitrine, comme s'il se demandait quel effet ça ferait de toucher et était sur le point de tester; et elle reconnut enfin ce qui donnait un regard si intense au japonais. Du désir, du désir violent, à l'état pur ou presque. Elle vira à l'écarlate et se demanda si elle saurait se défendre contre lui s'il essayait de la violer. Sans doute pas. Il la démembrerait si elle osait lever une main contre lui, elle le savait. Mais dans son regard…
-Heero, qu'est-ce qui ne va pas? demanda-t-elle d'une voix très professionnelle, espérant faire revenir Yuy à ses sens. Est-ce que la pleine lune te fait toujours ça?
Il recula sa main, qui oscillait tout près de la taille de la femme, et frappa contre le mur, la faisant sursauter, avant de se mordre les lèvres et de se pousser en arrière, s'écartant de plusieurs pas hâtifs avant que la compulsion ne le pousse encore vers la jeune femme.
-Non, répliqua-t-il avant de tourner les talons, serrant les poings pour s'empêcher d'agripper la jeune femme à pleines mains. C'est pire ce soir. Et différent.
-Pourquoi?
-Je ne sais pas, lança-t-il tout en s'éloignant. Je crois que je suis en chaleurs, ajouta-t-il après un instant de réflexion.
Sally resta là, choquée, et puis se mit à rougir.
* * * * * *
Heero s'était installé sur le point le plus haut qu'il avait pu trouver, à savoir le toit de la tourelle de commandement, et contemplait pensivement ce qui lui arrivait en ce moment, et la manière dont ses réactions divergeaient de ce qui était normal pendant une pleine lune. Ses réflexions étaient entrelacées avec de petits flashbacks sur la réaction qu'il avait eue aux sons si variés que produisait Wufei et à la texture de sa peau sous ses doigts, mais il lutta pour garder ses pensées claires et ne pas se laisser aller à fantasmer purement et simplement. C'était difficile. La seule chose qu'il avait plus envie de faire que de penser à ce qu'il avait fait, c'était de recommencer.
Coupé dans ses réflexions par un frisson de froid, Heero se rendit enfin compte que la nuit allait tomber. S'arrachant à la contemplation hypnotique de la baie calme qui s'étendait autour du porte-avions, il tourna son regard vers la terre toute proche. Ils avaient accosté cet après-midi, peu après sa rencontre avec le médecin, dans une crique entourée de falaises qui dissimulaient le bâtiment à la vue de la terre.
Le garou jeta encore un coup d'œil sur la falaise pour se souvenir de l'endroit où il devrait débarquer pour rejoindre le minuscule sentier qui menait en haut de la falaise, puis il se redressa d'un bond sur son perchoir, tout en haut de la tour de commande du porte-avion, et s'étira longuement. Il s'était réfugié là-haut pour éviter de risquer de croiser quelqu'un qui pourrait éveiller sa convoitise, ou sa colère, pour une raison ou une autre. Mais il faisait frais, tout en haut, avec le vent du large qui dansait autour de lui, sur des plaques de métal qui absorbaient sa chaleur corporelle, et ce fut avec reconnaissance qu'il accueillit les premiers soupçons de fourrure qui duvetaient son corps.
Le vent caressait son pelage d'une manière presque sensuelle, et il frissonna, de plaisir ou de froid, il ne savait pas. La sensation d'une vague de caresse était plus intense, le touchait plus profondément, que sur de la simple peau nue. Il passa le bout des doigts sur ses bras, frissonna encore. Double plaisir, de sa peau sous la fourrure et du contact avec la toison de plus en plus dense sur le bout de ses doigts tellement plus sensitifs.
Il se secoua et tenta de penser à autre chose qu'à ses pulsions. La Lune montait, bientôt ce serait l'heure…
Le moment de vérité. Trowa avait survécu jusqu'ici… allait-il passer le cap?
* * *
Le loup-garou avait traversé les couloirs à grands pas, sans heureusement rencontrer personne. Il marchait vite, à la limite de la course, mais le dernier couloir le trouva en train de ralentir. Hésitant soudain, vaguement effrayé, il stoppa devant la porte close, celle qui renfermait son ami. Des craquements se faisaient entendre à travers la paroi… Ca avait déjà commencé. Prenant une grande inspiration, Heero pénétra dans la pièce… et poussa une bordée de jurons.
A côté du lit de Trowa qui se tordait de douleur, et dont les os cédant bruyamment se reformaient très visiblement sous la peau nue, Sally, Wufei et Duo entouraient Cathy en larmes.
-Je ne vous avais pas dit de sortir? gronda le brun d'une voix très basse, feutrée presque.
Sally fit volte-face en entendant sa voix et vira au rose vif. Elle avait eu l'intention de les prévenir quand elle était arrivée… mais Catherine avait été en train de faire une crise de larmes, effondrée à côté du lit, Duo un bras autour de ses épaules essayant de la réconforter, et elle s'était uniquement préoccupée de la rassurer. Et puis au moment où elle avait commencé à se calmer, les … déformations avaient commencé. C'était impressionnant. Wufei était arrivé peu après, et ils avaient été tellement soucieux de rester à côté de Trowa et de le soutenir qu'ils n'avaient pas échangé trois mots.
-Désolée, je… je… bafouilla-t-elle.
Duo releva la tête, surpris, et dévisagea la jeune femme avant de jeter un coup d'œil suspicieux à Heero. Celui-ci était déjà couvert de fourrure par plaques, ses bras et jambes duvetés de brun sombre, son nez était comme une truffe, sombre et humide, il avait des oreilles allongées et velues, et ses mains arboraient des griffes. Duo devait admettre que c'était une vue étonnante, mais Sally avait déjà vu le garçon en mode intermédiaire, et elle n'avait pas réagi ainsi, même alors!
Il se tourna encore vers la jeune femme, pensant lui demander ce qu'elle avait… et entraperçut le visage de Wufei, absolument écarlatissime.
-Hey, Wufei? demanda-t-il à voix basse, essayant de ne pas déranger Trowa plus qu'il ne l'était déjà.
Mais Wufei ne tourna pas la tête, ses yeux noirs fixés sur Heero avec une extrême intensité. Sous les yeux surpris du garçon à la natte, les rayures du tigre apparurent et se mirent à s'assombrir sur la peau dorée du chinois, sa respiration se fit plus précipitée. Wufei entrouvrit la bouche, se lécha inconsciemment les lèvres…
Totalement stupéfait à présent, Duo se retourna vers le pilote 01. Et cligna des yeux.
L'attention totale dudit pilote était fixée sur LUI. Ses yeux d'un bleu d'acier trempé semblaient vouloir vriller un trou dans le crâne du garçon à la natte. Sa pose était tendue, ses muscles contractés, prêts à se détendre en une fraction de seconde en un bond ou un assaut contre lui. Il avait l'air dangereux, concentré, agressif, comme il devait sans doute l'être pendant ses missions, et Duo frissonna un moment de se rendre compte que cette intensité toute particulière était concentrée sur sa petite personne, comme s'il était un ennemi redoutable.
Et puis, avec une lenteur délibérée, les yeux bleus quittèrent les siens et commencèrent à voyager le long de son corps, vers le bas. Se fixant tour à tour sur ses clavicules découvertes par le large t-shirt, puis sur son torse, puis sur ses hanches prises dans le jean déchiré… où ils restèrent quelques secondes de plus avant de suivre la ligne de ses jambes puis de remonter vers sa figure, encore une fois stoppant à son bassin. Duo sentit sa mâchoire se décrocher, et fixa, les yeux écarquillés, l'étranger dans la peau de Heero, en train de le lorgner avec cette expression qu'il reconnaissait enfin comme de la concupiscence à l'état pur.
Heero manqua ronronner de plaisir quand il vit la bouche de l'américain s'entrouvrir et ses joues devenir roses. C'était si excitant comme expression…
Son odeur révélait sa surprise et son trouble soudain… enfin, il avait compris ce qu'il lui voulait. Il jeta un autre regard à ses hanches étroites, imaginant ses propres mains les agrippant fermement alors qu'il…
Se léchant les lèvres, Heero fit un pas en avant, ayant entièrement oublié tout le reste, la présence des autres dans la pièce et le danger menaçant son compagnon de meute, sa faim pour l'adolescent anéantissant le reste.
-Heero, qu'est-ce qui ne va pas? demanda Duo, sa voix douce et basse.
Une note d'hésitation la colorait, soulignant l'incertitude et la vulnérabilité du garçon, et elle était feutrée par la surprise. Il s'interrogea : comment il avait fait pour ne jamais remarquer à quelle point elle était sensuelle? Se demandant comment elle sonnerait sous… différents stimuli, Heero poussa un gémissement d'anticipation, qui aurait été un ronronnement s'il avait été félin au lieu de canin, et fit un autre pas en avant. Par pur réflexe, Duo recula d'un pas.
-Duo… souffla le japonais.
Sally n'avait eu besoin que d'un regard pour confirmer que Yuy était toujours dans le même état que tout à l'heure. Elle avait secoué Cathy, profitant du fait que personne ne faisait attention à elles, et l'avait dirigée vers la porte de communication avec l'autre chambre, juste derrière les deux pilotes aux cheveux longs. Elle allait la passer aussi quand elle vit la manière dont il lorgnait Duo, et, plus important, la manière dont Wufei semblait se laisser gagner par la fascination que lui inspirait visiblement le Loup. Se penchant en avant, elle donna une tape sèche à l'épaule du chinois et lui pinça la chair sur son omoplate, espérant que ce serait assez pour le sortir de sa transe, puis se retira hâtivement dans l'autre chambre. Cathy la regardait avec de grands yeux surpris, sans comprendre pourquoi elle l'avait arrachée au chevet de son frère. Elle la tira par la manche et la poussa dans une troisième chambre, vérifiant que les portes communiquant avec le couloir étaient fermées à double tour.
Wufei sursauta quand il sentit le pinçon, et le brouillard se leva de son esprit. Se rendant compte en une fraction de seconde de ce qui était en train de se passer, il saisit l'américain par le poignet et se précipita dans la deuxième chambre. Un rugissement furieux s'éleva derrière eux, et il eut tout juste le temps de refermer la porte à la volée et se s'appuyer dessus de tout son poids. Tombé à genoux par terre, Maxwell le regardait, stupéfait. Heureusement il avait des réflexes rapides et pensa vite à caler une chaise sous la poignée une fois qu'il vit que son camarade devait s'arc-bouter pour contenir les coups qu'infligeait Yuy à cette malheureuse porte. Sans attendre, Chang attrapa son coude et le poussa vers l'autre chambre où les attendaient les filles.
-Sally!! Barricade la porte!! cria-t-il en arrivant en trombe.
Un canapé et une petite table firent leur chemin contre le battant, alors même que le son du battant de la première porte se fracassant en éclats de bois résonnait dans les chambres. Deux secondes plus tard, leur porte tremblait sous le choc de la collision avec une épaule. D'une seule torsion du poignet, Wufei arracha la grille recouvrant le conduit d'aération et bouscula Maxwell devant l'entrée.
-Dépêche-toi!!
-Mais… protesta le jeune homme tombé à genoux.
-C'est toi qu'il veut! Vite bon sang!
Totalement stupéfait, Duo allait ouvrir la bouche pour réfuter cette information, poser une question, demander des précisions, qu'importe…
-Duo, il est en chaleurs et c'est la pleine lune!! hurla Sally en le poussant dans le conduit. Tu as vraiment envie de te faire passer dessus par un gros loup poilu de trois fois ton poids?
Sidéré, le garçon à la natte s'empressa de partir à quatre pattes le plus vite qu'il pouvait, suivi de près par Sally et Cathy, qui ne comprenait pas trop, mais ne voulait pas rester seule en présence de l'homme-loup. Wufei prit la peine de tirer un canapé devant l'entrée du conduit avant de les suivre, pas que ça retiendrait Yuy longtemps mais c'était déjà ça.
* * *
-WUFEIIIIIII!!!!! rugit le pilote 01 en attaquant le battant à coups de griffes. RENDS-LE MOI!!!!
Ses os craquaient bruyamment, il était entièrement recouvert par la fourrure à présent. Il chancela brièvement quand ses jambes se mirent à changer, tomba à genoux, ses griffes toujours plantées dans le bois, arrachant des éclats par poignées sans se soucier du changement d'angle de son bassin ni des vertèbres caudales s'allongeant, étirant sa peau. Il allait ouvrir la gorge de ce traître quand il le rejoindrait, et puis il prendrait enfin possession de son Duo…
Un vagissement pitoyable monta de la chambre derrière lui, un gémissement de souffrance si profonde, une plainte si faible qu'elle ne pouvait même pas prétendre au statut de cri.
Trébuchant sur ses jambes déformées, ralenti par les changements qui survenaient encore dans son corps, Heero se précipita vers son compagnon de meute, sa libido totalement noyée par l'urgence de protéger et d'aider son camarade.
* * *
Finalement, après des tours et détours à n'en plus finir, les quatre fugitifs arrivèrent à une petite salle pleine de machineries diverses. Ils s'extirpèrent du conduit avec plus ou moins d'élégance. Tandis que Sally vérifiait les brûlures légères que Cathy s'était faite aux genoux, à ramper en shorts, et que Duo s'étirait et protestait contre la bosse qu'il avait récoltée au front quand Sally l'avait bousculé, Wufei tendit l'oreille.
-Je crois qu'il a renoncé à nous suivre, annonça-t-il après quelques minutes.
-Génial… soupira Sally en se laissant glisser sur le sol, dos au mur, et en posant une main sur ses yeux.
Cathy les dévisageait, encore toute surprise.
-Bon alors, c'est quoi cette histoire de chaleurs? demanda l'américain en essayant de remettre dans sa natte toutes les petites mèches qui s'en étaient évadées, lui faisant un halo autour du visage.
-En chaleurs, en rut, c'est sa saison des amours, désir de reproduction, tu piges? Et crois-moi sur parole Duo, il EST en chaleurs, répliqua Sally en le regardant brièvement entre ses doigts.
-Comment tu sais ça? demanda Wufei en la dévisageant, soupçonneux. Tu l'avais compris avant même qu'il commence à déshabiller Maxwell du regard…
-WUFEI!! protesta bruyamment Duo, écarlate.
-Je l'ai croisé dans un couloir et il n'a pas arrêté de me "déshabiller du regard", comme tu dis, et de se retenir de me peloter deux secondes avant contact.
Duo cligna des yeux, incrédule. YUY, peloter SALLY?! Yuy, peloter quelqu'un, tout court?
-Et TOI, comment tu savais qu'il était en chaleurs, Chang? demanda Sally en le fixant d'un air intense.
Le rouge lui monta au joues plus vite que Wing au décollage et le chinois se mordit les joues avant de jeter un regard meurtrier à sa compatriote. Mais les regards des trois autres dévoilaient leur compréhension progressive, et mort de honte, le garçon aux cheveux noirs baissa la tête entre ses bras croisés.
-… Nooooooooon… murmura Duo, les yeux exorbités.
-Ta gueule Maxwell.
-Je vois… lâcha Cathy d'une voix méditative, hochant la tête.
-Yamero, onna!
-Tu t'es fait PASSER DESSUS par HEERO?!??? s'écria Duo à ce moment-là, qui n'avait toujours pas réussi à l'avaler.
-SILENCE MAXWELL!! vociféra Wufei en le menaçant de son poing. Et, et, et qui te dit que c'était pas moi dessus, hein!? Pourquoi tu assumes que…
-C'était toi dessus? demanda Sally d'un ton sec.
Wufei devint violet et ne répondit pas.
-C'est bien ce que je pensais, conclut-elle avec satisfaction, tandis que Wufei s'effondrait, frustré.
-Mais tu… Tu… Toi et HEERO?!
-Ce n'était pas de ma faute, c'était son odeur, répondit Wufei d'un ton las, sans relever la tête.
-Son odeur?
-…oui, je… Son odeur… je l'ai sentie, et je n'ai plus pu penser à rien d'autre… Deux secondes avant j'étais dans un état tout à fait normal, et… je me suis retrouvé tout… tout…
-Chamboulé? Excité? Emoustillé?
-Maxwell!! Maxwell, tu… oui… céda le chinois. Incapable de penser, juste de… désirer.
Duo n'était pas sûr qu'il ait existé cette précise nuance de rouge vif auparavant. Rouge fluo? Ca n'avait pas été supposé exister, m'enfin…
-Wow, lâcha Duo, toujours en train d'essayer de digérer l'annonce.
-Ce n'est même pas que je n'ai pas pu dire non… C'est que je n'ai même pas PENSE à dire non, ajouta le chinois d'un ton découragé.
-Et tu t'es fait passer dessus.
-Ca suffit, Maxwell, l'avertit le garçon d'un ton froid.
-Désolé… M'enfin, t'es tellement… dominant d'habitude… Et puis j'étais sûr que tu étais hétéro!!
-Je le suis!!! … je l'étais… le suis… Je ne sais plus…
Il se tut et referma les poings sur ses cheveux, ses pensées tournant en rond comme des chevaux fous dans un manège. Il s'était toujours défini en tant qu'hétérosexuel… Toujours… Bon, il avait eu le béguin pour Treize pendant son… séjour avec lui, mais c'était né de son admiration pour lui et du charme ravageur et universel de l'homme, pas d'un réel désir physique… Et puis il avait été amnésique, très différent de ce qu'il était en temps normal! Mais avec Heero, ces circonstances atténuantes étaient loin d'avoir joué, et pourtant… Ca avait été loin d'être un viol.
Il avait été pris par un autre homme. Il s'était soumis. Il avait écarté les jambes comme une faible femelle pour accueillir un homme en lui. Pas n'importe qui; un de ses camarades, l'une des personnes qu'il admirait le plus, avec Meiran elle-même et ses autres camarades pilotes. Un égal, un guerrier.
Il s'était laissé dominer.
Et il avait trouvé un immense plaisir à se laisser conquérir. Ne s'était même pas rappelé qu'il n'était pas supposé apprécier ce genre de choses, qu'il était censé se défendre, se débattre, refuser… Qu'était-il à présent? Même maintenant, il n'arrivait pas à croire qu'il ait pu trouver un quelconque plaisir à l'acte qui avait pris place il y avait deux heures à peine. De l'imaginer froidement, avec un détachement médical, le rendait presque malade.
Avait-il fondé sa vue de lui-même sur une fausse base? Avait-il toujours été attiré par des hommes et ne s'en était-il pas rendu compte? … Non, non… Ce n'était pas juste de la mauvaise foi de sa part, il n'arrivait réellement pas à se souvenir de pensées ou réactions de ce genre.
Mais alors, pourquoi…?
Il tira sur ses cheveux, légèrement, grinçant des dents, tête toujours baissée.
Prenant pitié, Sally releva la tête et regarda le pauvre garçon confus.
-Ce qui s'est passé ne veut rien dire pour ce qui est de tes tendances en temps normal, Wufei, lâcha-t-elle tranquillement, ayant une parfaite conscience de ce qui posait problème à son compatriote. Il devait saturer l'atmosphère de phéromones, des hormones transmises par l'odeur, et tu as des sens très développés maintenant, ce qui fait que tu as sans doute été aussi lourdement influencé que lui-même. Tu n'avais pas de contrôle… Tu n'avais pas le choix de le vouloir ou non.
Le chinois la dévisagea, totalement stupéfait. Phéromones…? Provoquant le… le désir…?
'… oh…'

-…Pour ce qui est d'être passif ou actif, ajouta-t-elle avec une précision et une froideur toutes cliniques, après tout, ce n'est pas pour rien que Yuy est mâle alpha… et puis le fait que ce soit venu de lui, ça lui donnait l'avantage sur toi. Ca s'accumulait dans son système depuis un bout de temps. Il avait plus de pression à soulager. Je suppose que c'est lui qui a initialisé la rencontre? Ne t'en fais pas, quand ce sera ton tour, peut-être que tu pourras renverser les positions, termina-t-elle de l'air de ne pas y toucher.
-Sally!! protesta-t-il encore en rougissant sous l'allusion. …Comment ça quand ce sera mon tour?
Elle haussa les épaules, désinvolte.
-Si ça arrive à Yuy, je ne vois pas pourquoi ça ne t'arriverait pas, ou même à Quatre.
-QUATRE en chaleurs? Ca je veux voir, rigola Duo.
-CA c'est une idée effrayante, contempla pensivement Cathy.
* * *
Trowa était tombé du lit, et il se convulsait, son visage congestionné. Sous les yeux stupéfaits du japonais, ses bras se brisèrent pour devenir des pattes, puis à mi-chemin revinrent en arrière pour reprendre la forme de bras. La fourrure sortait de sa peau pour tomber la seconde suivante comme d'un tapis usé, et les spasmes qui secouaient son dos étaient si violents que Heero pensa qu'il allait briser sa propre colonne vertébrale s'il continuait plus longtemps, aussi souple soit-il.
-Trowa! Trowa… appela-t-il, posant une main sur le bras du garçon, entre deux soubresauts. Laisse aller le Loup… Je sais que tu as mal, mais laisse aller le Loup… Il t'aidera…
Mais Trowa n'était plus en état de comprendre des mots, et depuis longtemps. Heero poussa un long gémissement bas, angoissé, ne sachant plus que faire…
… le garçon-garou à la mèche tourna la tête vers lui, aveuglément, son corps hybridé adoptant une immobilité tendue, comme en attente.
Heero poussa un autre gémissement, celui-là remontant à la fin comme une question. Ses oreilles firent un bond en avant sur son crâne quand il entendit le minuscule grognement las en réponse. Lentement, il approcha à quatre pattes, poussant de petits cris de sympathie et de réconfort, et se blottit au plus près qu'il osa, rassurant l'autre garou par le contact avec sa fourrure. Il avait l'arrière-train entièrement animal maintenant, et ses bras étaient couverts de poils et se terminaient en pattes, mais il s'efforça de garder un torse humain le plus longtemps qu'il le put, c'était plus pratique. Sa figure s'était déjà allongée en museau, même si la forme de son crâne n'avait pas réellement changé. Il se demanda si Trowa le reconnaîtrait s'il venait à reprendre conscience.
Les mains griffues de son ami se refermèrent sur la fourrure de son torse, d'une poigne étonnamment solide, et le jeune homme aux yeux verts y appuya sa figure. Heero passa les pattes de chaque côté de ses épaules pour se rapprocher un peu plus, toujours poussant un long gémissement modulé comme un chant. De petits cris montaient de la gorge de l'hybride en réponse.
La transformation avait cessé de fluctuer à présent, mais cela voulait dire qu'il était bloqué dans un corps mal formé, cela pouvait être extrêmement dangereux, il le sentait sans vraiment savoir comment. Heero le poussa doucement du museau, ses gémissements gagnant en urgence. Plus le garçon s'épuisait à lutter et moins il avait de chances de mener la transformation à terme, il le sentait du fond de ses tripes.
Les côtes du garçon se remirent à craquer, prenant doucement une forme ogivale. Ses membres étaient déjà ceux d'une bête de toute façon; ils se couvrirent progressivement d'une épaisse toison drue qui gagna le reste de son corps, brun clair, plus sombre et riche sur le dos, le bout de ses poils presque roux sur le dessus, crème sous le ventre.
Trowa se détendit finalement, comme il n'avait plus été détendu depuis la veille au soir, muscle après muscle. Au début Heero eut peur qu'il ne soit en train de mourir, mais son souffle était régulier, et ralentissait progressivement à un rythme plus normal. Il était recroquevillé entre ses pattes avant, sa tête cachée dans l'épaisse toison de son poitrail. Le japonais ne s'était jamais senti aussi protecteur, aussi dominant, qu'avec ce camarade roulé en boule contre lui, aussi sans défense qu'un bébé.
Heero attendit presque une demi-heure que la bête reprenne son souffle avant de la pousser de la patte pour voir de quoi elle avait l'air… mais l'odeur l'avait déjà renseigné, et sa queue battait la mesure au rythme de sa joie presque enfantine. Un loup, un autre loup!
-Woof?
Un long gémissement épuisé lui répondit finalement. Il se recula légèrement pour aller s'allonger le long du corps de son camarade, qui releva la tête de quelques centimètres pour essayer de suivre ses mouvements du regard, de ses yeux d'un vert encore trouble. Décidant que pour le moment l'autre loup était encore trop épuisé pour bouger, et si heureux et soulagé de savoir qu'il avait passé le cap sans dommages permanents apparents, Heero se blottit tout contre son dos, posa le museau sur son épaule, et choisit de faire une sieste. L'autre canidé ne fut pas long à l'imiter.
* * *
En plein milieu d'une volée de remarques et d'allusions peu subtiles, Wufei se releva d'un bond sans avertissement, ses rayures aussi noires que ses cheveux contre sa peau. Les trois autres crurent qu'ils l'avaient finalement mis vraiment en colère avec toutes leurs allusions, mais il ne les regarda même pas, et commença à arracher ses vêtements en poussant de drôles de grognements. Ils eurent à peine le temps d'apercevoir les suçons et les griffures avant qu'il ne se couvre d'une fourrure rase et dense.
-Duo, ouvre cette porte, gronda-t-il d'une voix râpeuse en désignant la lourde porte de métal fermée à l'aide d'un volant.
-Wu?
-La Lune appelle… ouvre! rugit l'asiatique en se courbant en avant, bras autour des côtes.
Sans rien dire, le garçon obtempéra. Le tigre-garou fila à l'extérieur au pas de course, sa longue queue annelée flottant derrière lui. Prudemment, au cas où Heero était toujours à leur recherche, Duo referma la porte. L'idée de se faire passer dessus par une bête poilue ne l'intéressait pas vraiment… Il était intéressé par Heero, mais peut-être pas à ce point-là, eurk. Et puis de savoir que c'était uniquement pour étancher une soif de contacts provoquée par un déséquilibre hormonal…
Les filles et lui échangèrent des regards, puis ils décidèrent sans parler qu'enfermés ici pour la soirée, ils n'avaient pas tellement de choses à faire maintenant que Wufei était parti. S'installant le plus confortablement qu'ils pouvaient, ils se souhaitèrent bonne nuit et fermèrent les yeux, essayant de ne pas penser à toutes les choses qu'il pouvait se passer pendant la nuit.
* * *
La piste côtière était bordée par des arbres, la rendant principalement invisible depuis l'intérieur des terres. On lui avait dit qu'elle n'était utilisée que par les promeneurs et les cyclistes, qu'il ne risquait pas de rencontrer après la tombée de la nuit à cette période de l'année. Quatre dissimula ses vêtements non loin du départ du petit sentier qui menait au porte-avion et lança le changement, accueillant à bras ouverts la douleur déchirante qui l'accompagnait.
Il essayait de ne plus penser, ne voulait pas se souvenir de ce qui se passait en ce moment. Quel meilleur moyen que l'effort physique? Howard le lui avait suggéré… Il allait courir. Mais pas un peu, pas le petit trot auquel le vieil homme avait dû penser. Non, il allait courir jusqu'à bout de souffle, jusqu'à en tomber par terre, jusqu'à ce que ses muscles douloureux refusent d'obéir. Il avait besoin de se sentir puni, châtié, il voulait expier le mal qu'il avait fait à son ami avec ses désirs inconsidérés.
Quatre s'avança sur la piste au petit trot, s'étirant, puis sprinta, passant en quelques secondes de l'immobilité presque totale à quatre-vingt kilomètres à l'heure. Ses pattes frappaient la terre battue de la piste côtière, violemment. Il ne se permit pas d'écouter l'instinct qui lui criait de ne pas courir trop longtemps, qui essayait de lui rappeler qu'il était un sprinter, qu'il n'était pas bâti pour l'endurance. Aussi fatiguant qu'un sprint pouvait être, il n'était pas assez épuisant pour lui procurer une période d'oubli suffisamment longue. Il récupérait trop vite pour que ça fasse de l'effet.
Il parcourut des kilomètres, sprint après sprint, ralentissant brièvement quand il n'en pouvait plus pour repartir sans s'être entièrement arrêté sitôt qu'il retrouvait son souffle, se poussant aux limites de son endurance.
Mais aussi vite puisse-t-il aller, jamais il ne parvenait à distancer la douleur en écho du garçon qu'il aimait. Elle était toujours là, affaiblie par la distance, mais il la sentait quand même. Légèrement, comme si c'était un souvenir plus qu'une actuel perception, puis soudain quelques pointes de souffrance.. et il sprintait encore une fois, espérant distancer les sentiments.
Et puis une nouvelle sensation bizarre émana de son Uchuu no kokoro, presque inconnue dans son étrangeté, repoussant toutes les autres sensations hors de sa conscience.
En son cœur, tout au fond /là où les autres sont/ un rêve de forêt calme, en attente, se réveillait, comme le retour de la Vie à l'aube dans les bois, célébré par tous ces froissements, ces appels, ces mouvements furtifs.
Trowa se réveillait.
Trowa se réveillait, et son domaine-rêve avec lui, revenant à la vie, devenait plus vivant, plus vibrant encore qu'il ne l'avait été quand il était seulement humain, exactement comme les domaines-rêve de Heero et Wufei, et probablement le sien aussi, avaient été changés, amplifiés. Les bois tranquilles étaient maintenant habités par la présence matérialisée de son côté animal, dont la présence se faisait sentir, de plus en plus forte, de plus en plus précise.
Quatre manqua trébucher, étourdi par la révélation qui l'avait saisi en une fraction de secondes à peine, puis releva la tête, fier, soulagé au delà de toute expression. Trowa avait survécu… il était passé!!
/Il est passé, il est passé… mon aimé, vivant, plus qu'avant…/

Ca donnait l'impression d'une bulle de rire née de bonheur pur enflant sous ses côtes, poussant contre son cœur, le faisant battre plus fort, plus vite, renforçant ses muscles las, lui redonnant une nouvelle vigueur, battant dans tout son corps… Il aurait voulu éclater de rire, et rire jusqu'à tomber… Mais il ne pouvait pas sous cette forme-là, pas suffisamment. L' exaltation se trouva un autre chemin d'évasion.
Son arrière-train donna un coup de reins, poussant, plus fort, plus fort, sur la terre compacte de la piste, ses pattes avant agrippèrent le sol, le tirant en avant. Il étendit le cou, muscles saillant, gueule ouverte comme pour goûter le vent, galopant, ses pattes devenant floues de vitesse, tout son corps participant à la course. Il ne touchait presque plus le sol, il filait, fonçait, si vite que les arbres devenaient des masses indistinctes, qu'il dut plisser les yeux pour se protéger. Il avait à peine besoin de frapper le sol entre chaque foulée à présent, couvrait des distances de plus en plus grandes à chaque enjambées, comme s'il était en train de décoller.
/plus vite, plus vite… je vole/

* * * * * *
Il devait être presque onze heures et demie du soir quand Heero se réveilla de sa sieste, incapable de dormir une seconde de plus. L'énergie violente et sans limites du Loup lui bouillonnait dans les veines, et il eut du mal à se retenir de danser d'une patte sur l'autre comme un chiot surexcité. Son compagnon, se trouvant privé de support quand il se leva d'un bond, roula lentement sur le flanc, incapable de se rattraper, et resta là, ouvrant un œil d'un air confus. Heero aboya, se penchant en avant, croupe en l'air, dans la position classique des canidés invitant quelqu'un à jouer avec eux, sa queue battant la mesure.
Le loup brun clair s'assit d'abord, poussant sur ses pattes avant comme s'il avait peur de tomber, tremblant légèrement. Son camarade le soutint du museau jusqu'à ce qu'il soit en équilibre. Trowa resta immobile sans oser rien faire d'autre que de reprendre son souffle pendant quelques minutes puis, rassemblant son courage, il donna un coup de reins pour se relever… et retomba sur son arrière-train avec un glapissement surpris.
L'autre loup passa son museau sous ses pattes avant et le souleva du sol, et Trowa essaya de se camper sur ses pattes, pour ne pas retomber encore. Il chancela pendant quelques minutes avant qu'un semblant de force ne revienne dans ses muscles.
Et puis les odeurs l'attaquèrent. De partout, de toutes parts, demandant, réclamant son entière attention, intrigantes, fascinantes, mystérieuses… Pendant quelques longues minutes, in se contenta de fermer les yeux et de laisser toutes les senteurs le traverser, fabriquer dans sa tête un tableau mental utilisant un œil intérieur dont il n'avait jamais eu conscience jusqu'à présent.
Il avait du mal à comprendre ce qui lui arrivait au juste. Il se souvenait de la douleur… pendant si longtemps, si atroce, si absolue, qu'il avait presque oublié que son corps pouvait être source d'autre chose que de souffrance. Mais maintenant, c'était passé… seulement, il avait encore l'impression qu'il n'était pas dans son corps, pas vraiment. Les sensations étaient si étrangères… ou était-ce parce qu'il n'avait plus l'habitude? Mais il ne se rappelait pas tirer autant de renseignements de son odorat auparavant, ou se servir si peu de sa vue… et les angles de son corps donnaient une drôle d'impression… il les percevait comme correctes, mais en était quand même surpris. Il n'avait certainement jamais été capable de porter le cou à angle droit avec son dos avant, quand aux nouvelles restrictions de ses mains, il avait du mal à les comprendre. C'était comme s'il portait des moufles trop étroites… Le loup clair secoua la tête, essayant de chasser le brouillard qui couvrait encore son cerveau…
… et baissa les yeux sur ses pattes écartées, les gros doigts griffus plantés dans le sol pour garder une meilleure assiette.
/je suis un loup/ se rendit-il compte avec un sursaut de surprise.
Les souvenirs lui revenaient maintenant, le virus, sa contamination, le fait qu'il était maintenant garou, pour la vie… mais qu'est-ce qui lui disait qu'il était un loup et pas autre chose?
/je suis un loup, je le sais. le comment n'est pas important./

Il se secoua, prit une position un peu plus normale, maladroitement. Ca faisait si étrange d'être pataud, lui qui était d'habitude souple et précis… Le corps du loup était puissant, si puissant qu'il se demanda s'il arriverait à juger de la puissance nécessaire à chaque action ou s'il était condamné à trouer ce qu'il essayait de toucher et arracher ce qu'il essayait de saisir. Ce n'était pas arrangé par les restants de douleur, comme des courbatures, qui le gênaient dans ses mouvements… mais il sentait que ce corps-ci aussi était souple et agile, juste… pas de la même manière. Il devrait réapprendre.
Heero le bouscula de l'épaule et le dirigea vers la porte. Trowa le suivit… essaya du moins. Quelle patte avancer en premier? Il avait l'impression d'être une marionnette entre les mains d'un enfant. Comment Heero faisait-il pour que cela lui vienne si naturellement?
…Peut-être parce qu'il le laissait venir naturellement. Trowa était trop habitué à contrôler inconsciemment le moindre de ses gestes, il ne connaissait pas assez le corps du loup pour ça.
La preuve lui en vint quand il s'aperçut que Heero avait disparu dans le couloir; il se précipita à sa poursuite sans plus aucun problème de coordination, juste un peu de maladresse, et ne se rendit compte du chemin qu'il avait parcouru que quand il percuta de plein fouet le flanc de son camarade qui l'avait attendu tranquillement derrière le tournant.
-Kai!
Heero rit en silence, le dévisageant d'un air narquois, avant de repartir vers la sortie. Trowa le suivit, tête basse, encore un peu étourdi, totalement fasciné par les odeurs venant de toutes parts.
++
Ils se glissèrent sur le pont du porte-avion, Heero en silence, gracieux à sa manière, Trowa trébuchant et aussi souple qu'un pantin de bois, et restèrent à guetter dans l'entrée sombre de l'escalier qu'ils avaient emprunté. Personne en vue. Howard avait suivi le conseil apparemment.
Trowa avait les yeux mi-clos, le nez en l'air, et semblait totalement absorbé dans le flot d'odeurs qui lui venait avec le vent du large. Heero le comprenait… lui aussi avait été stupéfait par cette diversité la première fois qu'il s'était trouvé sur le pont, et encore, il avait été humain, c'est-à-dire moins sensible. Et déjà accoutumé à l'extraordinaire odorat du Loup.
Poussant le deuxième loup du nez, Heero se lança au petit trot à travers la large étendue métallique, se dirigeant vers l'étroite passerelle de bois qui menait à terre. Suivi par son camarade, il la traversa pour se retrouver sur le rocher. Les vagues avaient rendu glissants les brisants, et Trowa manqua perdre l'équilibre plusieurs fois, mais Heero alla s'appuyer de l'épaule contre lui, interposant son corps entre son camarade et la mer, et le guida à petits pas, jusqu'à ce qu'ils soient sortis de la zone dangereuse.
Trowa s'arrêta quelques minutes pour prendre son souffle avant de grimper le sentier escarpé. Arrivés en haut de la falaise, il se mit à renifler de ça et de là, totalement fasciné par ce nouveau monde que lui avait dévoilé son odorat hyper développé, et le japonais le laissa faire pendant un petit quart d'heure, pendant qu'il attendait, assis sur son arrière-train. Son camarade avait besoin de se familiariser avec ses nouveaux sens.
Le nouveau garou n'avait pas l'air d'être tout à fait stable, mentalement. Heero savait que le traumatisme de la transformation ne s'était pas encore effacé, et qu'à cause de sa maladie et du temps qu'il avait passé dans le coma il n'avait pas eu le temps d'intégrer le fait qu'il était, maintenant, pour toujours, en partie un loup. Alors si pour le moment il préférait ne pas trop réfléchir, profiter du bon côté des choses, à savoir le fait qu'il ne souffrait plus et se trouvait dans un corps en parfaite santé, quitte à laisser l'animal dominer, l'emmener avec lui… autant le laisser faire, ce serait mieux pour lui. Il n'était pas encore d'humeur à traiter avec ces bouleversements.
Oui, autant faire plaisir à Trowa en lui laissant oublier que quelques fois, il était aussi un homme.
* * *
Le lapin s'évada à toute allure, et Trowa démarra au quart de tour, juste avant que Heero lui-même ne fonce. Ne s'y attendant pas, le plus sombre des loups bouscula l'autre de l'épaule, le déséquilibrant suffisamment pour permettre au petit rongeur de s'échapper dans un buisson de ronces où les deux prédateurs ne pouvaient définitivement pas le suivre. Les deux canidés s'emmêlèrent les pattes l'un dans l'autre et Trowa piqua du nez dans l'herbe, tandis que Heero culbutait par-dessus son dos. Ils restèrent étonnés et immobiles pendant quelques secondes avant de se redresser un peu et de tourner lentement leur tête vers l'autre pour se dévisager. Et puis, Trowa ouvrit largement la mâchoire et laissa la langue pendre au dehors, transmettant clairement qu'il était mort de rire.
Jappant, Heero mordit l'oreille de son camarade pour le punir. Trowa rendit le coup de dents, essayant d'attraper le nez de l'autre loup, mais le manqua quand Heero esquiva d'un bond sur le côté. Grondant d'un air joueur, le loup sombre s'accroupit sur le sol, le seul avertissement qu'eut le pilote 03 avant de se retrouver cible d'un missile de fourrure et de muscles durs.
Aboyant et glapissant tour à tour, les deux loups s'affrontèrent, jouant comme des chiots. Il était visible que s'il l'avait voulu, Heero aurait pu gagner sans problèmes; Trowa était encore plutôt faible et mal coordonné. Aussi, il prit soin de rester le moins brutal possible. Mais son côté alpha le poussait quand même à essayer d'établir sa dominance sur l'autre mâle. Lui coinçant le museau entre ses mâchoires, il essaya d'une torsion de le forcer doucement à lui présenter son flanc, mais son camarade refusa de se laisser faire. Se laissant aller brutalement sur le sol, il déséquilibra Heero qui dut faire un pas en avant pour ne pas s'effondrer sur lui, perdant sa position bien campée. Dès qu'il fut assez proche, le loup auburn détendit les pattes de derrière et repoussa son camarade d'une ruade dans le flanc. Heero dut lâcher son museau pour ne pas lui déchirer avec ses dents plantées dedans et, le temps qu'il reprenne son équilibre Trowa avait sauté sur ses pieds et se précipitait sur lui, prêt à le bousculer sur le dos. Le loup sombre se tapit près du sol pour être plus assuré sur ses pieds, prêt à bondir dès que Trowa serait à portée pour lui montrer que même s'il avait de la ressource, il n'était pas assez fort pour le battre définitivement…
… Trowa fit un crochet sur la gauche et disparut entre les buissons, courant comme un dératé.
/C'est de la triche!!!/ protesta Heero en partant à sa poursuite.
Ils coururent pendant de longues minutes avant que Trowa ne commence à fatiguer et à ralentir un peu, permettant à son camarade de revenir à sa hauteur. Grommelant, Heero lui mordilla le museau pour lui apprendre à essayer de le semer comme ça, trottinant encore sur quelques pas avant de s'arrêter entièrement.
Trowa pila net comme un cheval ombrageux et partit à angle droit vers les buissons, encore une fois essayant de distancer Heero. La fourrure de son arrière-train était plus longue que le reste, comme une espèce de culotte bouffante, et plus pâle aussi, nettement visible dans l'obscurité des buissons.
Et deux secondes plus tard, la brûlure froide était revenue le saisir, et Heero se retrouvait en train de renverser son camarade sur l'herbe. Trowa lutta pour se délivrer, mais même si Heero ne lui faisait pas de mal, il avait quand même une trop bonne prise dans la fourrure épaisse de sa nuque pour qu'il réussisse à lui faire lâcher prise comme ça.
Surpris par sa réaction incontrôlable, Heero laissa aller l'autre, qui se dégagea d'un bond et s'écarta de plusieurs mètres, le dévisageant d'un air méfiant.
Le plus sombre des loups cligna des yeux et se laissa tomber sur son postérieur, secouant la tête comme pour s'éclaircir les idées. C'était ridicule, enfin… Ils étaient en animaux tous les deux et Trowa…
Trowa avait un joli museau et une croupe… intéressante, découvrit Heero avec stupéfaction.
Non, là c'était ridicule. Il savait qu'il était en chaleurs, qu'il avait besoin de s'accoupler, mais au point de vouloir grimper un animal?! Brr. C'était limite de la zoophilie là…
… quoique, on pouvait dire que non étant donné qu'il était lui-même sous forme animale en ce moment.
Mais quand même! Dans sa tête il était humain, il ne pouvait pas désirer un corps animal!!… Même si Trowa était aussi élancé en loup qu'en homme, même si leurs bagarres pour rire lui avaient appris que sa fourrure était douce, même si son odeur…
…son odeur ne changeait pas vraiment. Juste sa manière de le percevoir.
Avant qu'il l'ait consciemment décidé, il s'était relevé, et approchait d'un pas lent et contrôlé, normalement réservé pour la chasse, son camarade toujours désorienté. Trowa battit en retraite, reculant à croupetons de quelques mètres, n'osant pas lui tourner le dos.
Mais Heero avançait plus vite que lui, et finalement ils se retrouvèrent nez à nez. Heero se pencha sur l'autre, lentement… Trowa recula la tête, méfiant….
…Heero avança encore la tête, insistant…
… Trowa retint un gémissement d'incertitude et fixa son camarade, se demandant s'il fallait mordre…
…Heero lui lécha le bout du nez.
-KAI!!
Glapissant, Trowa tourna les talons et essaya de s'enfuir encore une fois, totalement paniqué par la boule de tension nerveuse qui était soudainement, sans avertissement, apparue dans son ventre. Mais Heero n'avait pas l'intention de le laisser faire et le bouscula du poitrail, l'envoyant rouler sur l'herbe. Il se jeta sur lui avant qu'il ait eu le temps de se redresser, le bloquant sous son poids.
Trowa se mit à gémir. Il ne comprenait pas ce qu'il lui arrivait. Il avait la tête qui tournait, il se sentait bizarre, il avait chaud… Et son camarade, son ami, se comportait soudainement comme s'il était une proie!
Et il sentait bien trop bon, ça ne pouvait pas être naturel. Il avait envie de… il ne savait pas quoi; mais c'était trop contradictoire avec ses propres pulsions. Il n'y comprenait plus rien, il lutta pour rester à la surface, pour ne pas se laisser submerger par ces instincts incompréhensibles.
……..
Heero lui avait totalement abandonné l'idée de lutter contre ses instincts, son mode de pensée entièrement lupin. On lui aurait demandé combien faisaient deux et un qu'il n'aurait pas su quoi répondre. Mais c'était bien le cadet de ses soucis en ce moment. Comme la guerre et les Gundams, ou ces soucis ridicules sur les relations qu'il avait avec l'humain Trowa en temps normal, ou le futur. Vivre dans l'instant.
La seule chose qui le toucha vraiment, qu'il put comprendre, fut le glapissement quelque peu apeuré de son camarade.
/je lui fais mal…?/

Le loup sombre hésita un quart de seconde à immobiliser totalement son compagnon. Ce fut assez. Un instant plus tard, l'autre s'était échappé, se tortillant avec la souplesse d'une loutre ou d'un furet, et repartait en courant.
Piqué au vif que son camarade fuie ses avances, et amusé profondément par l'idée de le chasser, le loup au pelage sombre se lança à sa poursuite, bien décidé à avoir de lui ce qu'il voulait.
* * * * * * * * *
Un oiseau gazouillait quelque part au-dessus de sa tête, et il entendait des feuilles bruire doucement autour de lui. Un petit vent frais chatouillait sa peau, sur ses côtes et ses épaules, et Trowa fronça un sourcil. Il était nu…?
Lentement, le sommeil le quitta. Il ouvrit un œil. Il reposait sur le côté, dans une espère de petite chambre verte faite de buissons pour murs, d'arbres pour toit, et d'une haute herbe verte sous lui. La lumière était dorée, quelque peu tamisée, semant quelques éclats d'or orangé ici et là. Il se sentait bien, ici, à l'aise…
Il referma les yeux, se tortillant un peu pour se blottir encore une fois contre la chaude présence dans son dos.
Et puis, un bras changea de place, se serra plus confortablement contre son ventre, et il sursauta.
-Réveillé? rit une voix basse contre sa nuque.
Trowa écarquilla les yeux. Il avait un corps chaud, définitivement masculin, lové en cuiller contre son dos. Il se tendit.
-Heu…
-C'est Heero, baka, répondit le japonais, son ton très amusé.
Trowa s'immobilisa. Tout lui revenait pêle-mêle. La transformation, son corps de loup, l'exploration de la forêt, l'autre loup; qu'il avait su, vaguement, être Heero; la course-poursuite, et puis…
Là, les souvenirs redevenaient confus… ou plutôt, il était trop surpris pour les accepter tels quels.
L'européen se tortilla un peu pour essayer de voir son camarade. Le souffle de Heero se bloqua pour une seconde, puis il resserra brièvement sa prise sur sa taille.
-Doucement, louveteau, conseilla-t-il d'une voix légèrement étouffée.
Quelques étincelles de chaleur remontaient à la surface, venant de ses reins. Prudemment, le japonais écarta de quelques millimètres son bassin de l'arrière-train de son compagnon.
-Désolé, chuchota Trowa, et Heero vit sa nuque devenir écarlate.
Il réussit à se tordre suffisamment pour que le haut de son torse fasse face au haut, et tourna la tête pour regarder son camarade. Heero se pencha au-dessus de lui, appuyé sur un coude, et ils se regardèrent en silence.
-Ca va? demanda finalement le japonais, brisant le drôle de silence qui s'était établi entre eux.
-M-mm. Très bien… ajouta l'acrobate d'un air pensif et un peu préoccupé.
-Trop bien? continua Heero en relevant un sourcil.
Trowa ne répondit pas tout de suite, cherchant des mots qui l'avaient déserté. Il était en train d'essayer d'assimiler ses souvenirs de la nuit dernière, et il avait du mal. Il avait… ils avaient… Heero et lui avaient…
-J'ai juste du mal à croire que…
-Désolé, répondit le garçon aux yeux bleus, ses prunelles brillant comme s'il se retenait de rire. Il semblerait que j'aie été en rut pendant la nuit précédente.
-C'est ce que j'avais cru remarquer, répliqua Trowa d'un ton sarcastique.
Heero renifla et lui jeta un regard faussement innocent, du plus pur style "qui, moi?". Trowa secoua la tête, amusé malgré lui.
Il ferma les yeux et détendit ses muscles las. C'était calme ici, il aimait bien. Comme un petit coin hors du monde, hors de la laideur de la guerre… Beau, pacifique, intact. Il était à l'abri, dans cette clairière. Même la présence de l'autre garçon n'était pas une intrusion, pas un problème.
Des odeurs d'herbe fraîche montaient de la petite clairière, la senteur puissante de la terre en dessous, le traces laissées par de petits rongeurs qui avaient traversé la clairière peu de temps avant leur arrivée… L'odeur de son camarade. Vivante, changeante, des petits changements minuscules mais captivants, qui lui disaient tant de choses qu'il ne comprenait pas vraiment d'un point de vue conscient, mais qui quelque part dans sa tête formaient une image mentale très précise, des informations qu'il ne savait pas encore trier.
Plus les odeurs superposées par dessus la sienne propre. Entre autres l'effluve particulière qui l'avait pris par surprise la nuit dernière, celle qui lui avait tourné la tête… Heureusement, elle était morte, il n'en restait que des traces qui ne l'affectaient plus vraiment. Heero ne l'émettait plus, ce n'étaient plus que des restants. Par-dessus, la propre odeur de Trowa, en humain et en loup, et celle d'une autre personne… Un fauve, mais pas un loup… qu'il avait sentie, pendant sa maladie, à ses côtés, même si à l'époque il n'était pas en état d'analyser ce qu'il captait grâce à ses sens.
Il fit un rapide travail d'analyse avec ce qu'il savait sur ses amis et leur odeur…
-Je sens Wufei sur toi, lâcha Trowa après avoir reniflé pendant quelques secondes, son expression totalement perplexe.
Heero eut un petit sourire victorieux et le fixa d'un air entendu.
-… Non? finit par lâcher le garçon, essayant de rester stoïque.
-Si.
L'européen se laissa retomber dans l'herbe et fixa la cime des arbres du regard, sous le choc.
-… Wufei?
-Oui.
-… Oh. Ah.
Ils laissèrent un silence confortable tomber sur la petite clairière pendant quelques minutes de plus.
-…Tu vas bien, Trowa? En général, je veux dire.
-… Physiquement ou mentalement?
-Les deux.
-Physiquement… Ca va. Ca va même très bien. Surtout sachant que j'ai passé… quoi, une semaine, deux semaines à l'agonie?
Heero grinça des dents en se souvenant de ces moments atroces, heureusement finis et bien finis.
-Comment tu te sens maintenant?
Trowa eut un minuscule soupir, qui n'échappa pas à son camarade. Heero fronça les sourcils. Trowa avait l'air déçu de n'être pas plus mal à l'aise, de ne pas se sentir maudit. C'était à se demander s'il n'avait pas un complexe du martyr quelque part.
-Très bien. C'est comme si le monde était plus brillant… Tout neuf. Et je peux sentir et entendre des choses… Mon corps, deux trois courbatures, rien de sérieux.
-Mentalement?
L'ex-mercenaire prit quelques minutes pour analyser cette autre question. C'était surprenant, mais… il était bien. Et le contact avec son…/chef de meute/ ne provoquait aucune des tensions qu'il ressentait habituellement chaque fois qu'il se retrouvait très proche de quelqu'un. Bon sang, ils étaient nus, et Trowa n'était pas le moins du monde nerveux!!
… Ce qui pouvait sans doute s'expliquer aisément par le fait qu'ils avaient passé une moitié de la nuit à s'envoyer en l'air ; Trowa ne voyait pas ce qu'il avait à craindre à présent.
Il avait toujours été mal à l'aise quand il avait eu des hommes s'intéresser à lui, même petit Quatre qui semblait si peu dangereux, jamais capable de s'intéresser à leurs offres, encore moins de se relaxer suffisamment pour apprécier. Mais la veille, il n'avait tout bonnement pas eu le choix. Le loup en lui n'avait tout simplement pas même pensé à ces souvenirs immondes. Pas pensé du tout en fait. Et pour ce qui était de s'intéresser… Eh bien, il semblerait que son corps ait mis à profit l'occasion pour dépenser toute une adolescence de pulsions sexuelles refoulées. Il avait eu envie de l'acte, et il l'avait apprécié.
Plus facile d'être un loup, beaucoup plus facile. Moins de prises de tête. Pas de problèmes pour faire confiance, cesser d'avoir peur.
/mais pourquoi je devrais avoir peur de Heero? c'est mon chef de meute. il est là pour veiller sur moi. il ne me ferait pas de mal. c'est un ami…/
'…je crois…'

Il ferma les yeux, essayant de se rappeler la question. Ah oui, son état de santé mentale. Eh bien autant être franc. De toute façon s'il mentait ou cachait des choses, Heero le saurait. Et il ne sentait pas le besoin de cacher des choses à Heero. Il savait que le garçon avait lui aussi des raisons de rester renfermé. Il ne le jugerait pas. Ils se comprenaient tous les deux. Ils se ressemblaient trop pour ne pas se comprendre.
-Calme. Détendu. Remarquablement, considérant que je suis allongé nu dans l'herbe avec un garçon collé à mon dos.
Heero se demanda s'il devrait bouger à l'écart, mais Trowa ne semblait pas se sentir dérangé par l'intimité de leur position. Au contraire, il avait l'air serein, décontracté, et totalement à l'aise avec le contact entre leurs épidermes, et ne faisait pas le moindre effort pour s'écarter de lui-même.
-En gros, tu te sens mal de ne pas t'être senti mal?
-Je… oui, un peu.
-Pourquoi?
-Je ne sais pas, soupira Trowa, agacé.
Le fait était là. Il était collé à un autre garçon, lequel était plaqué contre son dos et pouvait le… lui faire ce qu'il voulait, et il ne pourrait rien y faire, et il se sentait juste l'envie de se rapprocher un peu histoire de combler la place froide là où leurs peaux avaient été en contact. Toute sa vie il avait été persuadé que si un homme le touchait, il en deviendrait dingue, ou brisé… Toute sa vie il avait tout fait pour éviter de se retrouver en situation de se faire coincer, toute sa vie il s'était senti mal quand il ne pouvait pas rester loin de n'importe quel homme, même si celui-ci était aussi hétérosexuel et pas intéressé que possible.
Et il avait sauté le pas sans même y penser, et ça ne lui faisait rien. Presque rien.
-Pourquoi tu ne te sentais pas mal hier?
-… Je ne sais pas trop… Je n'ai pas réfléchi je suppose. C'était le loup qui dirigeait… Et puis…
-Hm?
-Ca me semble ridicule d'avoir peur de toi. Tu es… Tu es… mon …chef de meute. Si ça m'avait fait mal tu aurais arrêté. Je te fais confiance…
Heero resserra brièvement son étreinte pour le remercier.
-Et avant? quand tu étais loup, qu'on courait dans les bois? Tu en penses quoi?
Le garçon à la mèche se tut pendant de longues minutes.
-… magique. Pas d'autre mot.
Heero appuya son menton sur l'épaule de son camarade et lui fit un petit sourire.
-… Tu comprends, maintenant…?
Trowa hocha la tête. Oui, maintenant il savait exactement pour quelle raison Heero avait trouvé que devenir garou était finalement une bénédiction plutôt qu'une malédiction. Parce qu'il ressentait presque la même chose. Tout un monde nouveau s'offrait à lui, s'entrouvrait devant ses yeux. Un monde plein de choses incompréhensibles et effrayantes, mais plein aussi de surprises et de merveilles. Et il n'était pas seul s'il décidait d'explorer ce monde, pas comme Heero l'avait été.
C'était nouveau, effrayant. Mais palpitant aussi.
-C'est bien, hein?
-… Ouais…
-Tu en veux toujours autant à Quatre?
-Hein?
Trowa se dégagea et le regarda fixement, se relevant sur un coude.
-Lors de ta première crise, lui dit Heero d'un ton soigneusement neutre, tu l'as informé que tu considérais ce qui t'arrivais entièrement de sa faute et ne voulais plus qu'il reparaisse en ta présence. J'aimerais que tu me dise si ça vaut toujours et si tu comptes lui pardonner un jour, étant donné que j'en ai assez de devoir le forcer à manger pour éviter qu'il ne s'évanouisse dans le couloir devant ta chambre encore une fois.
Le garçon sursauta comme si Heero l'avait frappé et le dévisagea en silence, ses yeux écarquillés.
-Oh, mince…
-Exactement mon avis.
Trowa s'écarta de son camarade, s'asseyant dans l'herbe à quelques pas, et se mit à arracher des brins d'herbe, tête basse.
-Je… Je ne me souvenais plus… Il est vraiment resté… toute ma maladie?
-Dans le couloir. Il s'était même installé un lit de camp. C'était le plus près qu'il se sentait le droit d'aller.
Trowa déglutit, sentant sa gorge se serrer légèrement.
-C'était quand même de sa faute… Jamais je n'ai demandé à devenir garou, moi, laissa-t-il tomber d'une petite voix.
-Aucun de nous ne l'a choisi, répliqua Heero en s'asseyant en tailleur en face de lui.
-Oui, mais c'étaient des accidents, lâcha Trowa avec une touche de mauvaise humeur. Quatre m'a embrassé. Ce n'était définitivement pas un accident.
Heero cligna des yeux. Il s'était douté que la source de contamination était quelque chose de ce genre, mais maintenant, il en avait la preuve. Il n'aurait jamais cru que Quatre ait un jour le cran de le faire.
Visiblement Trowa se sentait toujours d'humeur rancunière. Comment arranger ça? Il se surprit à souhaiter que Duo soit là pour l'aider, il n'y connaissait pas grand-chose à ces rapports sentimentaux, lui. Il ne savait même pas si Trowa était intéressé par Quatre de cette manière-là. S'il ne l'était pas, il y avait peu de chances que leur amitié s'en remette.
Il pouvait essayer d'arranger un peu les choses toutefois. Il connaissait la manière de penser de Trowa. Ce que le garçon ne pardonnait pas, c'était que Quatre ait mis sa vie et son intégrité en danger sans se soucier d'autre chose que de ses propres besoins, ou du moins il soupçonnait que c'était ça… Peut-être serait-il mieux de ne rien faire et de les laisser se débrouiller tout seuls, mais entre les remords de Quatre et la maussaderie de Trowa, ça ne risquait pas d'arriver avant un bon moment, s'ils devaient attendre de prendre la résolution de parler… Il allait lui dire certaines choses, et espérer qu'il aidait à faire avancer les choses vers une réconciliation, et n'était pas en train de tout casser irréparablement.
-Trowa… Il était ivre.
-Quoi?!?
-Ce soir-là, il était ivre. Duo et lui étaient tombés sur une réserve d'alcool d'un des Sweepers.
-Quatre ne boit pas d'alcool, il est musulman, répliqua l'européen d'un ton sec, comme s'il l'accusait de mentir.
-Quatre ne savait pas que c'était de l'alcool, c'était du whisky-coca, répondit patiemment Heero. Le goût de l'alcool n'est pas discernable sous le reste, tu le sais.
Trowa cligna des yeux, se rappelant la bouteille que le petit blond lui avait fait finir. Il y avait eu de l'alcool dedans, et il ne s'en était même pas aperçu?
-Duo était tellement bourré qu'il nous a arrosés Wufei et moi de peinture rose avant de s'enfuir en ricanant hystériquement. On a dû lui courir après dans tout le porte-avion avant de l'arrêter, et ensuite il n'a pas arrêté de nous faire des propositions graveleuses à propos d'un ménage à trois. Il était ivre, presque trop pour tenir sur ses jambes. Et d'après ce qu'il nous avait dit, Quatre avait bu plus que lui.
Un seul commentaire s'appliquait à la situation.
-Merde.
Le japonais se tut pour laisser son camarade réfléchir.
-Maintenant que j'y pense, il parlait… tu sais, un peu en traînant, il avalait des syllabes. Et il riait un peu trop fort, admit Trowa, pensif. Comment j'ai fait pour ne pas le voir?
-Remarque, pour ta défense, contra Heero d'une voix indifférente, tu ne t'attendais pas à ce que notre petit Quatre soit soûl, et d'après ce que Duo raconte, il ne change presque pas de comportement jusqu'au moment où il s'effondre.
L'européen fronça un sourcil, un peu honteux de n'avoir même pas réalisé que son ami n'était pas dans son état normal.
-J'aurais dû le voir quand même. Je veux dire, jamais il n'aurait fait ça s'il avait été dans son état normal. J'aurais dû m'en rendre compte avant. C'était sans doute pour ça qu'il m'évitait, il ne savait pas comment me dire que ça avait été une erreur…
Heero secoua vivement la tête, envoyant ses mèches brunes voler autour de son visage.
-Ce n'était définitivement pas une erreur de sa part.
-Pardon? lâcha Trowa, suspicieux.
Heero se rendit compte que Trowa pensait qu'il disait que Quatre avait fait exprès de faire ça.
-Je ne veux pas dire qu'il avait prévu de s'imposer à toi sans te demander ton avis… En fait, je suis sûr qu'il n'avait l'intention de rien dire du tout. Mais…
-Mais…?
-Je ne sais pas si je devrais te le dire, ce n'est pas mon secret après tout, répondit Heero, fronçant les sourcils, ennuyé avec lui-même sur son indécision.
-Tu en as trop dit ou pas assez, répliqua Trowa d'un ton glacial.
-Ca fait des mois que Quatre a le béguin pour toi.
Il y eut un moment de silence, le garçon aux yeux verts fixant son camarade, incrédule.
-Il a le béguin pour toi, répéta Heero avec force. Il t'aime bien. Pas juste comme un ami. Alors tu vois… Il était trop ivre pour se rendre compte des conséquences. Il n'a pas réfléchi, c'est tout. Il t'aime bien… tu comprends ce que je te dis?
Etourdi, le garçon se laissa retomber sur le dos, jeta un bras en travers de ses yeux. C'était trop à intégrer d'un coup. Quatre… Gentil, aimé, adorable petit Quatre avait un faible pour lui? Lui si brillant, si affectueux, si apprécié de tous, lui qui était capable de commander sans même essayer le fanatisme d'une bande de guerriers endurcis, lui que même les politiques habitués à manipuler les esprits ne pouvaient résister quand il leur lançait un sourire?
Mais qu'est-ce qu'un garçon aussi exceptionnel que Quatre Raberba Winner pouvait bien trouver à un orphelin, ex-mercenaire? Un type si ordinaire, si froid, si… terre-à-terre? Certainement pas le genre de personne exceptionnelle qui pourrait donner à Quatre ce à quoi il avait droit…
Il avait toujours été heureux que le garçon prenne le temps d'être son ami, avait eu du mal au début à penser que Quatre le voyait réellement comme un ami, pas comme un pauvre petit rat d'égout qu'il avait pris en pitié, dans sa bonté habituelle, alors que le petit blond avait tout pour lui, richesse, intelligence, bonté, beauté, qu'il n'avait pas besoin de ramasser des animaux errants quand il voulait de la compagnie… Il avait eu du mal à croire que le garçon le voulait réellement comme un ami.
Il n'avait même pas osé imaginer qu'un jour, l'autre voudrait plus. Demanderait plus.
Non, ce n'était pas honnête, en fait, s'il n'y avait pas eu l'alcool, il n'aurait même rien demandé du tout. D'après Heero, cela faisait des mois que Quatre avait le béguin pour lui. S'il avait voulu essayer d'avoir plus, il lui aurait fait des avances plus tôt… non?
-Depuis combien de temps, tu dis?
Heero ne demanda pas à quoi il se référait.
-Des mois. Depuis votre rencontre, je crois. Pas sûr.
-Comment tu le sais? demanda l'européen, levant son bras de son visage pour jeter un regard suspicieux à son camarade.
Heero haussa les épaules.
-Une discussion avec Duo. Et son odeur change quand il est avec toi. Tu verras bien.
Trowa grogna et laissa retomber son bras en travers de ses yeux.
-Super, Duo est au courant… maugréa-t-il.
-Ils se confient beaucoup l'un à l'autre, répondit Heero d'un ton neutre. Je pense que Duo le savait depuis longtemps, au moins quatre mois, sinon plus.
-Manque plus que Wufei, pesta Trowa, agacé et gêné.
Heero eut un reniflement moqueur.
-Ne t'en fais pas pour lui, répliqua-t-il. Il va être tellement embarrassé de ce qui est arrivé entre lui et moi que je doute qu'il tente de t'embarrasser toi au sujet de Quatre.
-Tu ne l'es pas, toi?
-Embarrassé? Non. Pourquoi je le serais?
-Facile à dire, tu étais dominant, toi… marmonna Trowa.
Il n'y eut pas de réponse pendant quelques secondes, juste le bruit de racines arrachées de la terre par des mains nerveuses.
-Je… ne peux pas. Etre… pénétré, je veux dire. Je ne peux pas.
Trowa se redressa et le dévisagea, surpris d'entendre presque bégayer son camarade, lui qui d'ordinaire sonnait si calme, si sûr de lui. Heero baissait la tête et avait l'air tendu, presque angoissé. Et honteux.
-Ca ne m'embarrasserait pas de l'être, si je pouvais, mais… je ne peux pas.
Sans dire un mot, l'ex-acrobate s'avança à quatre pattes jusqu'à son ami et passa les bras autour de ses épaules, le serrant contre lui en silence. Après une seconde, il se détendit et retourna l'étreinte avant de se dégager.
-Alors, tu vas faire quoi au sujet de Quatre? demanda Heero.
Comprenant trop bien sa gêne, Trowa le laissa changer de sujet sans faire de réflexions.
-Je en sais pas… J'ai beaucoup à penser, avoua-t-il dans un soupir, passant sa main dans ses cheveux.
Heero lui lança un microscopique sourire, soulagé de savoir qu'ils pouvaient faire comme si la précédente confession n'avait jamais eu lieu.
-Bon… Si on retournait au porte-avion? Tu n'es pas obligé de trouver une solution tout de suite, tu sais… Et puis même s'il avait des circonstances atténuantes, Quatre a quand même des excuses à faire de mon point de vue.
-Ouais, répondit Trowa d'un ton absent, perdu dans ses pensées. …Juste un problème, ajouta-t-il en se relevant.
-Quoi?
Trowa jeta un regard entendu à son propre corps nu, puis releva un sourcil en fixant Heero.
-Oh, oui, je suppose que c'est un problème pour toi… répondit Heero d'un ton faussement indifférent.
-Pardon?
Le japonais eut un petit sourire moqueur et commença à se transformer.
-Si tu n'arrives pas à m'imiter, contente-toi d'attendre ici, je te rapporterai tes vêtements. Ok?
Trowa fronça les sourcils.
-Lâcheur.
-Amuse-toi bien, répliqua Heero, sainte-nitouche.
-Enflure, lâcha Trowa d'un ton plat.
Un ricanement fut sa seule réponse, et Heero tomba à quatre pattes, déjà presque entièrement loup.
-Dépêche-toi, alors, murmura Trowa en se rasseyant, le menton sur ses bras croisés.
Heero remua la queue une fois, puis disparut entre les buissons.
* * *
Duo ouvrit les yeux sur un plafond qui n'était définitivement pas celui de sa chambre.
A côté de lui, une voix féminine se plaignait de courbatures, grommelant et pestant. Il tourna la tête. Cathy était en train d'essayer de s'étirer, bâillant, et Sally s'appuyait sur le mur pour se relever malgré l'était de son dos.
-Alors c'était pas juste un rêve psychédélique, hein? murmura-t-il en jetant un bras en travers de ses yeux, se souvenant de la course folle à travers les conduits poursuivis par un Heero à la libido exacerbée.
Il frémit en se souvenant du regard brûlant que l'autre lui avait lancé. Ca avait été totalement flippant. Ca ne lui ressemblait tellement pas… Sally disait qu'il aurait tout aussi bien pu être dopé aux aphrodisiaques, et Duo la croyait sans problèmes. C'était limite overdose là.
Se secouant, il sortit de la petite salle et se dirigea en compagnie des filles vers les chambres.
Celle de Trowa était vide, et ils soupirèrent tous avec soulagement. Si Trowa n'était pas là, c'était qu'il allait bien… non?
Epuisé, Duo laissa là les filles et se traîna vers sa propre chambre, et se laissa tomber sur son lit. Dormir sur un sol de métal, c'était loin d'être reposant, et il était totalement vidé. Il se dit qu'il ferait bien une petite sieste… Ce n'était pas comme s'il avait quelque chose d'urgent à faire. Il ferma les yeux.
-DUO!!!
-Hein, quoi?!
Il sursauta violemment, fit volte-face vers la porte qu'il avait été trop fatigué pour fermer…
… juste à temps pour voir Hilde bondir sur lui, un énorme sourire aux lèvres.
-AOUH!!!
Evidemment elle avait atterri juste sur ses côtes.
-T'es folle? Brute!!!
-Rhôô, moi qui étais si contente de te revoir, méchant garçon… gagatisa-t-elle en lui pinçant les joues.
-J'ai eu une très mauvaise nuit, Schbeiker, alors t'y mets pas… la prévint-il avec un regard noir.
-Une mauvaise nuit? Pourtant j'ai senti l'odeur de Trowa dans le couloir, si il a survécu, ça aurait dû te rassurer non? tiens, au fait, il est un loup aussi!
Le garçon se redressa, un immense sourire aux lèvres.
-Sérieux? Chouette!! Alors il va bien? on était pas sûrs…
-Bah, je sais pas, j'ai pas eu trop le temps de me concentrer sur l'odeur… Mais il sentait pas comme s'il était malade en tout cas. Alors, comment ça une mauvaise nuit?
Il s'assit d'un bond sur le lit et croisa les bras sur sa poitrine, la faisant tomber à la renverse sur les couvertures. Riant, elle roula sur le ventre et le dévisagea.
-Alors alors alors?
-Primo, l'inquiétude avec Trowa… Catherine à consoler parce qu'elle avait fait une crise de larmes… Et ensuite, un truc… complètement abracadabrant.
-Hm?
-Alors tu vois, on était dans la chambre à côté de Tro, et tout ça, et voilà que Heero se pointe, déjà à moitié loup alors que je suis sûr que le soleil était pas encore entièrement couché, et je mettrais ma main au feu qu'il a même pas pensé à vérifier que les Sweepers le voyaient pas en plus. Il avait l'air totalement… ajouta-t-il en mimant un joint tiré avec vigueur. Et là il… Il… enfin… Il…
-Ouais?
-Il m'a regardé…
-Et puis?
-Mais tu piges pas, Hildie!! Il m'a regardé comme si j'étais une pièce de viande!! Et ensuite, Wufei a rougi…
-Non!! le coupa la jeune fille en se penchant en avant, de plus en plus passionnée.
-Il m'a chopé par le bras et lui, Cathy, Sally m'ont poussé dans l'autre pièce et m'ont jeté dans un conduit d'aération, où on a dû ramper jusqu'à s'abriter dans une salle… Et il a pété la porte pour nous suivre. Enfin si j'en crois Sally, pour ME suivre. Oh putain j'y crois pas. Pourquoi tu nous as pas dit que ça pouvait arriver?!
-De quoi tu parles?
-Il s'est tapé Wufei, il a failli grimper Sally dans un couloir, et apparemment il avait décidé que je serais le troisième sur la liste. Je sais pas pourquoi il nous as pas suivis, il était en train d'enfoncer la porte à coups d'épaule quand on a filé dans le conduit.
Hilde le regardait, bouche ouverte comme un poisson hors de l'eau, ses yeux exorbités. Et puis elle éclata de rire.
-NOOOOOON J'LE CROIS PAAAAS!!!! Il a eu son premier rut?!?? C'est trop fort!!!
-Hilde bordel!!! C'est pas drôle!!!
-SI!!! s'exclama-t-elle.
-Arrête!! Et puis d'abord, les chaleurs, c'est pas censé être juste les femelles qui entrent en chaleur et les mâles qui y réagissent après, ou quelque chose comme ça?
Elle secoua la tête, toujours riant.
-Chez les vrais loups peut-être, Duo, mais on est PAS des loups, juste des êtres qui y ressemblent, c'est tout… Et tu dis qu'il s'est tapé Wufei?!??
-Hilde, s'il te plaît, ne dis pas que tu le sais!!! S'te plaît, Wufei le prend mal, il… enfin, tu sais, il est hétéro et tout, je t'assure, faut pas se ficher de lui là-dessus. Enfin je veux dire, je l'ai fait, un peu, avec Sally, mais c'est pas pareil… C'était surtout parce que je savais pas quoi faire d'autre, tu sais…? J'aurais pas dû te le dire. Il va pas apprécier…
-Relax, je dirai rien, l'assura la brunette d'un ton plus calme. Mais de toute façon s'il y réfléchit deux minutes il va savoir que je sais, parce que même s'il est en train de prendre une douche juste maintenant, il faudra un certain temps avant que l'odeur ne soit plus perceptible… enfin par un loup. D'ailleurs si j'avais eu le temps de me concentrer sur ce que je sentais en arrivant, je l'aurais sûrement su… Et au fait, il est où, notre tout-puissant chef de meute?
-Je sais pas, dehors avec Trowa sans doute. Howard dit qu'il leur a laissé la passerelle, ils ont dû aller explorer les bois…
-Bon, donc on peut être assurés qu'il a culbuté Trotro aussi… ajouta-t-elle en riant.
-Hein?!
Elle tssk-a et lui tapota le bout du nez d'un doigt, professorale.
-Duo-babe… Lui en rut, lui pas le choix, lui tout plein de jolies hormones..
-Arrête de bêtifier, j'ai pigé.
-En fait, c'est totalement surprenant qu'il ait cessé de te courir après s'il avait décidé de t'avoir… Je veux dire, logiquement, dans cet état d'esprit…
-Oh ça va hein!!
-Fais pas comme si ça t'aurait pas plu, je sais que tu as un faible pour lui… sourit-elle en faisant un clin d'œil entendu.
-Idiote, marmonna le garçon. Non, ca ne m'aurait pas plu.
Hilde se redressa et dévisagea avec curiosité son ami.
-Pourquoi ça?
-Un, il était déjà à demi transformé, comme le dit si élégamment Sally, j'ai pas envie de me faire passer dessus par un clebs velu de trois fois mon poids. Deux s'il se passe quoi que ce soit entre nous, je me retrouve contaminé, on peut pas se permettre ça. Je suis le dernier encore normal, Hilde. Si on a besoin d'un humain pendant une pleine lune? Troisièmement, il était en rut. Pas en contrôle de ses actes.
-Intéressant que tu aies mis ca en dernier, et pas ton devoir de rester le seul humain d'entre vous cinq.
-Ta gueule, Schbeiker, répliqua-t-il d'un ton plus sec qu'il n'en avait eu l'intention.
Ils se turent quelques minutes. Duo ferma les yeux, renfrogné, et détourna la tête. Hilde s'affaira avec les franges du couvre-lit, ne sachant trop que dire. Elle avait voulu parler de choses un peu plus personnelles avec son ami, et il venait de lui faire comprendre très clairement que ce sujet n'était pas ouvert à discussion. Comment renouer le dialogue? L'ambiance était lourde dans la chambre…
Et puis le téléphone portable de Duo se mit à sonner.
-Allo ici le répondeur de la Mort, que puis-je pour v… Oh salut Quatre! Ouais… …Non. Non, pas encore, mais Heero est avec lui. … Heu… Oui… Ok, j'arriv… …. Que je t'apporte QUOI?!????… Mais pourqu… oh. Oh!!! S-salut… Hahaha!!
Et à la grande surprise de Hilde, il s'effondra de rire sur le lit, laissant tomber le téléphone pour mieux se tenir les côtes.
-Qu'est-ce qu'il y a? demanda-t-elle, confuse, pendant que Duo se levait du lit et rassemblait quelques affaires, essuyant des larmes de rires et ses épaules tressautant toujours en silence pendant qu'il s'affairait.
-C'était Quatre…
-Ouais?
-Il veut que je vienne le chercher. Il a eu… Un petit problème.
Duo gloussa en ramassant un T-shirt propre qu'il ajouta au reste dans son sac à dos.
-Arrête de me forcer à t'arracher les mots de la bouche!!
-Il est coincé à poil derrière une grange et le fermier a des bonnes chances de s'y pointer aussitôt qu'il a fini de traire les vaches.
Hilde s'effondra sur le lit, suffoquée de rire.

[Souffrance] [Prédateurs]

^.^;;;; franchement, cette scène avec Tro et Hee-chan dans les bois pue à vingt kilomètres. M'enfin je voulais pas vous faire trop attendre… surtout que je sais même pas encore ce que je vais écrire dans la partie suivante ^^;;;;;;;;;;;;;;;;

(quand au téléphone, y a une cabine au bord de la route, juste derrière ladite grange… ^^; je m'étais trompée la dernière fois ^^;;;;; )