The werewolf

Série: Gundam Wing
Auteur: Asuka
Episode huit (je suis la meilleure ^^v)
Avertissements pour cet épisode: violence, un peu de sang (mais rien de trop berk), pauv'Wufei battu… je suis cruelle avec lui. Je l'aiiiiiiiimeuh!!!!!! enfin je veux dire, avant c'était bien Quatre, chacun son tour nan? Remarquez, Quatre s'en prend pas mal aussi.
Ah oui, désolée, il est assez court comparé aux autre. mais bon je savais pas comment étoffer, et puis je pouvais pas couper ça autrement, pardon ^^;;
aussi, comment dire… J'ai un peu le prochain épisode fini mais il est un peu bloqué dans la mémoire d'un ordi qui vient de se suicider, donc je dois attendre qu'il ait été réparé, ça pourrait prendre quelques semaines; et le cas échéant si la mémoire a été foutue, je devrai tout réécrire. Je les ai là. è.é Grrrrrrr.

Ninmu shippai

  La seconde même où il glissa dans les rêves, Quatre ouvrit les yeux sur une forêt.
-Encore… Ca deviendrait presque lassant, pesta-t-il.
Il avança quelque pas en pensant très fort au lac couvert de glace, mais rien ne se passa… il était toujours dans les bois.
Il croyait pourtant être enfin parvenu à gagner suffisamment la confiance du Loup qui gardait la forêt des rêves de Yuy pour être autorisé à arriver directement au lac, le centre de son domaine-rêve, mais apparemment…
Le pilote de Sandrock grommela et s'accroupit sur le sol pour réfléchir plus confortablement, sa longue queue balançant derrière lui l'aidant à garder son équilibre sur ses pieds-pattes, ses griffes plantées dans la terre traçant de petits dessins sans importance.
Et puis il se rendit compte d'une chose bizarre.
La forêt était beaucoup plus clairsemée, moins dense. En fait, il ne voyait de ronces nulle part, ce qui était fichtrement bizarre quand on était habitué aux taillis habituels de la forêt-rêve de Heero. Les arbres, la plupart des bouleaux ou des saules, étaient minces et plutôt espacés; juste quelques buissons, quelques branches basses. L'herbe d'un vert intense était haute et fraîche, des bourgeons de fleurs fermées pointaient ça et là. Et il y avait de la lumière qui filtrait des cimes, une douce lumière dorée qui traçait des rais d'apparence magique dans les airs. Il sentait des présences dans ces bois, mais, à sa grande surprise, elles ne semblaient pas se rendre compte qu'il était là. Elles n'exprimaient aucune animosité envers lui… En fait, elles n'exprimaient pas grand chose. Comme si les bois dormaient, en attente. Comme si… Il ne savait pas. Comme s'ils étaient, non pas morts, mais pas vraiment vivants… En stase; en attente. Une douce brise faisait danser les branches des saules; c'était… reposant. Comme si un redoutable hiver venait juste de se terminer, et que les plantes et les animaux n'osaient pas encore réellement croire que maintenant c'était le printemps.
Une chose en tout cas était sûre. Ce n'était pas chez Heero. Mais alors, chez qui?
Et puis la forêt se brouilla et disparut, et il se retrouva dans le /
noir/. Ca le prit par surprise, mais ne le réveilla pas entièrement. L'autre avait dû glisser dans un sommeil profond ou alors se réveiller, et son paysage intérieur lui était devenu inaccessible.
Ses mains griffues jouant dans les cheveux au dessus de son oreille bordée de fourrure, il se demanda à quoi le sien ressemblait.
Et puis ce fut comme s'il
reculait, comme s'il avait été en train de regarder par des jumelles et qu'il ramenait le grossissement en arrière
Et tout à coup il fut revenu
derrière le miroir d'eau vert/bleu sur lequel il avait été penché /mais j'étais assis dans la forêt/ et contempla quelques secondes les images impossibles /flamme rouge et or et montagne blanc-bleu et cratère gelé et tant d'autres, tant d'autres/ qui se reflétaient dans l'eau dansante et trouble sous son propre reflet /c'est moi-pas moi qui est-ce? je ne me -re-connais pas/ avant de se redresser en arrière, jetant un coup d'œil sur son environnement.
Il ne fut pas surpris quand il reconnut une oasis, des palmiers l'abritant du soleil et gardant la fraîcheur autour du point d'eau caché, joyau émeraude et aigue-marine au centre des dunes d'or, à perte de vue, jusqu'à ce que le sable se fonde avec le bleu absolu et intense du ciel.
C'était comme une reconnaissance plus qu'une découverte.
D'une manière ou d'une autre, il avait toujours su à quoi ressemblait le pays de ses rêves.
 

* * * * * *
 
Le lendemain, quand il se réveilla, Quatre avait la bouche pâteuse et un début de mal de crâne. /pourtant je n'ai rien bu…/ C'était étrange, on aurait dit une migraine de fatigue, comme celles qu'il avait quand il réfléchissait trop fort et trop longtemps sur un problème.
Il se traîna dans la cuisine, pieds frottant le sol, déjà épuisé. Il était si fatigué… mais d'un autre côté, plus calme, plus en paix avec lui-même. Il avait l'impression qu'il aurait dû se souvenir de quelque chose, mais il ne savait pas quoi. Si seulement il arrivait à se souvenir de ses rêves! Mais il oubliait presque toujours tout au moment même où il ouvrait les yeux. C'était dommage, parce qu'il savait bien que ce qui s'y passait déterminait souvent son humeur pour le reste de la journée…
Trowa lui tendit une tasse de café en silence et il lui dédia un regard d'une immense gratitude. Tandis qu'il buvait la tasse brûlante et lisait le journal, il se demanda brièvement, tout au fond, pourquoi il avait vu des saules danser au vent dans les yeux verts de son ami. Puis il tomba sur un article concernant un communiqué politique, et n'y pensa plus.
 

 
Une semaine et demie après la sécession des pilotes

 
La mission qu'ils s'apprêtaient à remplir était sans doute l'une de leurs plus risquées. A cause d'un manque de renseignements causé par un manque de coopération de la part de ce vieux schnoque de J, ils n'avaient eu vent de la nouvelle poussée technologique de leurs ennemis qu'un jour avant la présentation officielle de cette nouvelle arme à Treize Kushrenada. Ils devaient donc détruire tous les renseignements sur le nouveau canon (soi-disant capable de faire des trous dans une plaque de Gundamium de un mètre d'épaisseur), y compris le canon lui-même et cela AVANT la présentation; seulement en raison de la visite, la sécurité déjà sévère avait été doublée.
Cette fois c'étaient Quatre et Wufei qui avaient été envoyés dans les bureaux pour se charger des plans. Duo, qui s'était plaint que la faux de son partenaire devenait rouillée, jouait les démolisseurs dans DeathScythe à l'extérieur pour distraire les MS, et Trowa l'accompagnait. Heero était à l'intérieur des hangars pour détruire les constructions déjà effectuées et faire en sorte de désorganiser les militaires et leur empêcher toute poursuite, faisait joyeusement mumuse avec ses explosifs. Tout se passait correctement…
Mais ils savaient tous que ça ne durerait pas. Cette mission était l'une de celles qui avaient le plus bas taux de réussite. Malheureusement, elle était trop importante pour qu'ils puissent se permettre d'abandonner.
Quatre était encore fiévreux et peu assuré sur ses jambes, mais il pouvait marcher, il pouvait réfléchir… la seule raison pour laquelle on l'avait laissé venir était qu'on avait impérativement besoin de quelqu'un pour aller avec Wufei et que le plan avait de meilleures chances de fonctionner si l'attaque était menée simultanément sur les trois fronts. Et puis il avait du bagout le bougre. Au final c'était bien moins fatiguant de le laisser faire ce qu'il voulait.
 
* * * * * *
 
Arrivés dans le couloir qui passait devant la salle, l'arabe et le chinois s'aperçurent que six gardes bouchaient le passage. Ils se rendirent compte après une période d'observation qu'ils étaient relevés régulièrement à quinze minutes d'intervalle; autrement dit, il fallait qu'ils réussissent à se débarrasser des nouveaux dès le départ de l'autre patrouille s'ils voulaient avoir le maximum de temps devant eux… Sans alerter cette même patrouille.
Ils se jetèrent en silence dans le groupe, le sabre de Wufei et les couteaux de Quatre plongeant avec une mortelle précision, sans pitié; ils ne pouvaient pas se permettre de laisser des coups de feu attirer l'attention trop tôt.
Wufei en tua deux au premier engagement avant même qu'ils ne le voient, l'un d'un souple mouvement en travers de la gorge et l'autre d'un coup de pointe en plein dans le cœur. Le temps de se dégager et il recevait un coup de coutelas en direction de sa tête; il réussit à esquiver de justesse en reculant et trancha la tête de l'homme qui l'avait blessé, avant de se tourner vers Quatre. Le petit blond s'était débarrassé de deux des hommes avant même qu'ils n'aient le temps de crier par un coup symétrique à leur cœur, mais avait un problème avec le dernier, qui se protégeait du blond en interposant sa mitraillette. Quatre n'avait pas assez d'allonge pour passer l'obstacle et le soldat n'allait pas tarder à appeler.
Wufei passa son sabre à travers son corps par derrière, mettant en veilleuse toutes ses pensées à propos d'honneur et de juste combat. C'était une guerre et il avait déjà fait pire que ça. Il était prêt à tout pour faire triompher sa juste cause et s'il fallait qu'il trahisse ses propres idéaux pour cela, il le ferait.
S'il se le répétait assez longtemps, peut-être que ça cesserait de faire mal.
 
Ils se glissèrent à l'intérieur, et après avoir tiré les corps après eux pour éviter d'être découverts trop vite, se mirent au travail.
Tout en observant les ordinateurs, Quatre nettoya ses couteaux papillon sur une veste déchirée avant de les ranger dans les gaines dissimulées sur ses poignets, conçues pour laisser jaillir les armes à un mouvement spécial du poignet. Wufei monta la garde, tout en essuyant le sang qui coulait d'une coupure qu'il avait récoltée sur son front. Il laissa son regard s'égarer sur le blond quelques secondes. Quatre se débrouillait plutôt bien avec les ordinateurs, et était en train de charger dans le principal le méchant virus que Yuy leur avait concocté.
Le chinois sursauta quand il le vit presser brièvement une main sur son ventre avant de retourner à son travail. La tenue de vol était noire, il n'avait rien vu. Mais la paume avait été souillée de rouge là où elle avait pressé la déchirure.
-Blessé?
-Une égratignure, rien de profond, répondit Winner sans quitter les moniteurs des yeux, sa figure sérieuse et concentrée, et ses yeux froids lui donnant l'air bien plus vieux que ses quinze ans.
Quelquefois, quand le jeune homme si poli et si gai souriait, il se surprenait à manquer d'oublier que son cerveau de tacticien surdoué écrasait celui de n'importe quel homme fait. Mais il suffisait d'avoir aperçu une fois la lueur froide et calculatrice de ses yeux d'habitude si accueillants pour ne plus jamais vraiment oublier ce cerveau qui se cachait derrière l'enfant. Sa spécialisation ne portait pas sur les ordinateurs, comme Yuy, mais c'était quand même suffisant pour faire un meilleur travail que ce dont il aurait été capable.
Il l'enviait un peu. Il les enviait tous. Lui, son seul talent, c'était de se battre, pensait-il souvent. Trowa était un maître en infiltration, Quatre un maître tacticien, Yuy un maître informaticien… Duo un maître en effractions et délits divers ainsi qu'en relations publiques. Lui… Qu'avait-il de plus, mis à part son pilotage et ses dons au corps à corps? Pour un peu il se sentirait inférieur…
Ha! comme Duo en rirait s'il savait qu'il se sentait inférieur à eux. Qu'il n'avait pas l'impression de leur faire honneur.
-Hmm…
Egratignure peut-être mais il ne coûtait rien d'empêcher son compagnon de saigner de partout… il alla déchirer la chemise de l'un des morts et en fit un bandage pour son camarade. Quatre lui jeta un regard surpris quand il commença à le panser à gestes précis et efficaces, mais le laissa faire avec un sourire de gratitude avant de retourner à son ordinateur.
-Je remercierai Sally… Elle t'a bien appris, moqua gentiment l'arabe. Merci Wufei…
Wufei grommela d'un air gêné et repoussa une mèche noire qui lui retombait sur le nez. Il essaya de la bloquer derrière son oreille, mais elle ne voulait pas y rester. Il se rendit compte que son élastique avait dû claquer pendant la bagarre et que le couteau de l'homme qui avait riposté avait dû couper net les mèches, les raccourcissant à hauteur de ses yeux… en même temps qu'il lui avait fait une jolie coupure entre ses deux yeux, en diagonale. Il ne l'avait pas sentie tout de suite mais elle commençait à se faire connaître. Il posa une paume maculée du sang de Quatre sur la blessure pour étancher le flot de sang qui dégoulinait le long de son nez et de sa mâchoire, tout en cherchant dans les poches des soldats un mouchoir qui pourrait stopper l'écoulement. Ce n'était pas du tout profond comme coupure mais les blessures à la tête ont toujours tendance à paraître bien plus graves qu'elles ne le sont, il le savait. Une fois qu'il eut trouvé un mouchoir de poche, il le pressa sur sa blessure et se pencha sur l'épaule de Quatre pour se rendre compte de ses progrès.
Le garçon se débrouillait joliment, et il eut bientôt terminé. Il hocha la tête en direction de son camarade et ils se dirigèrent de concert vers la porte… un groupe de gardes les attendait dans le couloir, alertés par le sang de leurs camarades qui souillait le sol du passage.
Ne leur laissant même pas le temps de le voir, Quatre fila comme une flèche vers le conduit d'aération par où ils étaient venus, tandis que Wufei tirait sur les gardes pour les forcer à s'abriter et couvrir l'arabe. Mais il savait que personne ne le couvrirait, lui, quand il ferait de même, et il décida de filer par l'autre route qu'ils avaient prévu plutôt que de leur présenter son dos. Ils n'auraient certainement pas l'honneur de ne pas en profiter… il aurait refusé de l'avoir s'il avait été à leur place.
Il se précipita vers la sortie la plus proche par le parcours de secours, bénissant Yuy et sa manie de toujours prévoir des dizaines de plans de rechange. Oui, il était séparé de Quatre, et alors? Ca donnerait plus de chances au garçon de s'évader; ils ne l'avaient pas vu et devaient croire qu'il était venu seul, et s'ils pensaient que c'était lui qui avait l'information, il était plus important qu'ils le chassent lui plutôt que de perdre du temps à chercher un hypothétique complice.
Ils étaient tous après le chinois maintenant et avaient sans nul doute prévenu toute la base, mais ce n'était pas si grave, il suffisait de ne pas céder à la panique, il y avait une sortie pas loin, dans cinq… quatre couloirs, il allait pouvoir l'emprunter et il se retrouverait libre de rejoindre son véhicule et de retourner à l'abri.
Une balle siffla au-dessus de son épaule et il étouffa un juron tout en accélérant encore. Il prit un virage à la corde dans le proche couloir, se retenant au mur pour ne pas tomber… Puis entendit un claquement de fusil, juste avant que sa jambe ne refuse soudain de supporter son poids et qu'il ne se retrouve en train de tomber tête la première vers le mur d'en face.
Il eut tout juste le temps de maudire OZ dans sa tête avant que son champ de vision n'explose en rouge, puis en noir.
 
* * *
 
Quatre venait de rejoindre Heero au point de rendez-vous à l'extérieur des hangars et ils attendaient impatiemment un Wufei déjà en retard pour mettre en route la Jeep, quand le petit blond poussa un cri étouffé et saisit sa jambe à deux mains avant de s'agripper au bras de Heero de toutes ses forces. Le japonais se souvint soudain que le petit blond à l'air si fragile avait lui aussi d'excellentes qualifications pour être Gundam pilote, malgré toutes ses apparences de vulnérabilité et son comportement si doux. Son étreinte était de fer, et laisserait probablement de beaux bleus, même avec ses facultés de guérisons hors du commun.
Le pilote de Wing se tourna vers lui, alerté, et eut tout juste le temps de le retenir avant que sa tête ne heurte le tableau de bord. Quatre venait de perdre conscience sous le choc. Heero posa sa main à plat sur son sternum, paume ouverte, le retenant à bout de bras, et le ré-appuya doucement sur le dossier. Il ne réussit pas à dégager son bras tout de suite tant la prise était serrée, même dans son état d'inconscience.
-Quatre…? demanda-t-il à voix basse, inquiété par cette réaction violente et sans causes apparentes.
Mais le jeune homme ne répondit pas. Sa respiration était rapide et sèche, râpeuse, son pouls affolé et erratique, et ses pupilles s'étaient dilatées si loin que son camarade ne vit, sous la paupière retournée, que de fins cercles bleus autour d'un immense disque noir.
 
* * *
 
/douleur atroce dans ma poitrine, mais pas vraiment réelle, pas vraiment moi
mais elle est là
pas en moi, mais… quelque part; dans mon petit monde intérieur
j'ai mal à un endroit qui n'existe pas
mon cœur qui bat trop vite, trop fort, violent, comme s'il voulait s'évader, s'envoler de mon torse
dans l'oasis des reflets dansent, au fond de l'eau cachée; reflets d'une forêt silencieuse, reflet d'une flamme vive, dansante, vivante, reflet d'un lac de glace où la lave luit au fond
d'autres encore
et le reflet de la montagne fière se brouille
et puis… s'efface et disparaît
plus que le fond de mon cœur, le fond de l'oasis
là où vivait l'autre…
douleur encore, comme un arrachement, une amputation à vif
comme les crocs d'un fauve me dévorant vivant, là, tout au fond, là où les autres sont
et puis…
vide/

 
* * *
 
Quand Quatre reprit conscience quelques minutes plus tard, lentement et difficilement, comme s'il s'y forçait, il ouvrit de grands yeux effarés vers l'autre garçon, presque comme s'il ne le reconnaissait pas.
Qui était-ce? se demanda-t-il un quart de seconde en dévisageant la figure presque impassible.
/un lac de glace au fond des yeux/

-Heero…? murmura-t-il d'une voix tremblante. Heero, je ne le sens plus…
-Nani?! s'exclama le pilote de Wing, sursautant violemment. Iie… nia-t-il, secouant la tête, envoyant des mèches sombres voler devant ses yeux.
Heero était retourné à sa langue maternelle sans qu'il s'en rende compte, refusant de comprendre ce que le Loup savait déjà.
Quatre baissa les yeux, et sa lèvre inférieure se mit à trembler. Confirmer cette nouvelle était la chose la plus douloureuse qu'il ait jamais faite.
-Je ne perçois plus Wufei…
 
* * * * * *
 
L'homme en uniforme qui approchait d'un pas déterminé fut guidé avec déférence vers l'endroit où se trouvait la prise du jour. La petite troupe de soldats qui tenait en joue le pilote ennemi s'écarta lentement devant le chef absolu d'OZ, Treize Kushrenada.
Le pilote, 05, Chang Wufei, d'après les cheveux noirs qui tombaient sur ses épaules et sa figure, gisait toujours inconscient au pied du mur, recroquevillé sur lui-même, une jambe percée de part en part par une balle. Apparemment ce n'était toutefois pas à travers l'artère vu que le sang ne giclait pas, même s'il se diffusait plutôt vite. Le crâne du garçon baignait littéralement dans une flaque de sang provenant de sa tempe, et un autre sillon à demi-séché déjà dégoulinait d'entre ses yeux. Une traînée écarlate dessinait la trajectoire de sa tête contre le mur comme il était tombé au sol. Treize laissa échapper un petit rire surpris. Pauvre Wufei, il le plaignait presque… Se faire prendre comme ça… Pure malchance… Il estimait énormément le jeune homme qui avait eu le courage de l'affronter en duel, et savait que sa fierté en prendrait un sérieux coup. Il avait déjà pris extrêmement mal sa défaite, à l'époque… Même si Treize n'éprouvait aucune honte à admettre qu'il n'avait gagné qu'en raison de son poids supérieur et du manque d'habitude du garçon de son propre style d'épée.
Il fit signe à un soldat pour qu'il aille pousser le pilote du bout du fusil. Chang ne réagit pas. Une deuxième fois ne provoqua pas plus de changement dans sa position.
-Ecartez-vous et tenez-le en joue, ordonna Treize en se penchant sur le pilote. On ne sait jamais.
Il y eut un murmure de protestation contre le risque que courait le général, mais Treize savait bien que ce n'était pas du genre de Chang Wufei de prendre un otage pour s'en sortir… Et de toute façon, vue la vitesse à laquelle il devait avoir percuté le mur, il ne devait pas être en état de réussir à le dominer.
Il respirait encore, son souffle faisait se soulever les cheveux fins qui lui tombaient sur le nez; Treize n'en avait pas été sûr pendant un moment. Le général ôta un gant et posa prudemment une main sur sa joue pour ôter les cheveux épars qui masquaient son visage. Non, visiblement, il ne faisait pas semblant d'être inconscient, son visage exprimait trop de douleur pour ça. L'homme posa deux doigts sur la carotide… Son pouls était assez faible. Sans doute parce qu'il avait perdu pas mal de sang.
Une paupière se fronça, puis Wufei replia lentement le bout des doigts, gémissant d'une manière presque inaudible. Surpris de la rapidité de sa rémission, Kushrenada se releva et s'écarta de quelques pas. Mieux valait ne pas courir de risque d'être à sa portée quand il reprendrait pleinement conscience…
Le garçon ouvrit un œil et le referma aussitôt, visiblement blessé par la lumière vive. Ses yeux presque noirs rendaient très difficile de juger l'état de ses pupilles mais le choc les avait probablement fait rétrécir. Il laissa échapper un petit cri de douleur comme il essayait de bouger sa jambe blessée, et releva la tête, tremblant sous l'effort de la maintenir droite. Il semblait réellement complètement sonné. Il secoua la tête pour essayer de s'éclaircir les idées, ses yeux sombres balayant sans paraître les voir les soldats qui le tenaient en joue.
-Eh bien, Chang Wufei, on dirait que c'est la fin de la partie pour toi…
Après plusieurs essais, l'asiatique réussit à fixer son regard sur le grand homme châtain en uniforme qui avait parlé.
-… Chang… Wufei…? Partie? Quelle… murmura doucement l'asiatique.
Treize fronça un sourcil. Il y avait quelque chose de pas normal dans le comportement du pilote 05. Il n'arrivait pas à mettre le doigt dessus, mais…
-J'ai… M-maaal… gémit Wufei en portant la main à sa tête.
Il la retira tachée de sang et resta là à la considérer pendant quelques secondes, incrédule.
-Tout ce … rouge…
-Wufei? appela Treize expérimentalement.
Le garçon ne tourna même pas la tête. Il continuait à observer l'un après l'autre ses doigts couverts de sang, puis le sol où s'élargissait lentement la flaque, puis sa cuisse, d'un air étrangement fasciné et détaché à la fois.
Treize mit soudain le doigt sur ce qui le dérangeait dans le langage corporel du garçon. Pour une fois, son visage indiquait son âge. Ce n'était plus le visage d'un farouche combattant, mais celui de n'importe quel garçon normal de quinze ans. Tout à fait normal… Sauf la douleur évidemment. Mais même cette douleur était indicative… Le pilote qu'il connaissait aurait préféré mourir que d'afficher clairement devant des ennemis une quelconque marque de faiblesse ou d'infériorité.
-Wufei, je te parle… répéta sèchement le général en s'accroupissant à côté de lui.
Bien qu'il ait été en train de le regarder, il fallut quelques secondes au prisonnier pour comprendre que le grand homme aux larges épaules penché sur lui lui adressait bien la parole.
-Wu… Fei…? bredouilla le garçon en tentant de se redresser. Qu…
Puis, avec un hurlement perçant qui lui avait été arraché par la blessure qu'il avait étirée sans prendre garde, il s'évanouit.
 
* * * * * * * * * * * * * *
 
Ils avaient attendu le retour de Wufei pendant quatre jours entiers, et il n'était pas revenu. Aucune nouvelle, aucun indice pouvant permettre ne serait-ce que de supposer où il était et l'état dans lequel il était. Leurs indicateurs ne savaient rien, les canaux de communication d'OZ auxquels ils avaient accès ne parlaient de rien, la télé non plus… Ils ne savaient pas s'il était vivant ou mort, ou blessé, libre ou prisonnier…
Duo laissa échapper un cri étranglé de frustration devant l'inutilité de leurs recherches et finit d'envelopper les maigres effets personnels de leur camarade. Ils devaient abandonner cette cachette, ça devenait trop risqué de rester toujours au même endroit. Ils ne pouvaient pas se permettre de laisser des traces de leur passage, aussi l'un d'entre les quatre restants devait se charger des affaires de Wu-man… Wu-man, comme il avait détesté ce surnom. Oh, pourvu qu'il aille bien…
Mais après la douleur, qui avait explosé dans la jambe de Quatre, et la confusion qu'il avait subie brièvement après le choc, celui-ci n'avait plus rien senti du tout. Comme si Chang Wufei avait cessé d'exister. Même pas comme s'il était mort, non… Dans ce cas Quatre soutenait qu'il l'aurait senti; mais là… Wufei avait été tout simplement, d'après les explications du psychique, "déconnecté" de son Uchuu no Kokoro. Hors de perception.
Quatre en avait été si choqué, lui déjà si ébranlé par les récents événements et tout juste remis de ses derniers accès de fièvre lycanthrope, qu'il était hors de question de le laisser se charger du ménage de cette pièce. Ca ne ferait que le remuer encore plus. Donc Duo s'était proposé.
Et il le regrettait. Devoir fouiller dans les affaires de Wufei était déjà grave; il savait que s'il avait été là, le chinois aurait hurlé à n'en plus finir devant cette intrusion dans ce qu'il lui restait de vie privée. Et le silence, qui suivait chacune de ses actions en lieu et place des hurlements d'outrage qu'il attendait, lui faisait mal. Mais ce n'était pas le pire. Le pire c'était justement cette vie privée qui s'étalait devant lui, qui lui apprenait des petites choses que jamais il n'aurait sans doute devinées, lui rappelant douloureusement à chaque découverte, comme une claque, son ami disparu il ne savait où.
Ses éternels vêtements chinois blancs. Contrairement à ce qu'on pouvait penser d'un baka d'américain, Duo avait quelques notions des cultures de ses amis; il s'était renseigné après avoir fait leur connaissance, et savait très bien qu'en Chine le blanc était la couleur du deuil.
Wufei avait porté le deuil du plus loin qu'il se le rappelait. Même avant que sa colonie ne se retrouve en petits bouts de déchets spatiaux.
Des livres partout. De philosophie pour la plupart. Certains écrits en mandarin. Des cahiers remplis d'une calligraphie élégante et artistique.
Son étui à lunettes. Il ne les portait que pour lire, et ne supportait pas qu'on le surprenne avec elles sur le nez. Ca le gênait, de ressembler à un écolier. Comme s'il s'interdisait de l'être.
Tout en lui criait qu'il l'avait été, quand il se laissait aller, trop rarement, à se relaxer.
Des bâtonnets d'encens et une orange dans un espèce de petit placard décoré de dragons, déposés en ce qui rappelait fort, d'après ce qu'il en savait, un petit temple à offrandes pour la mémoire des disparus.
Dans un des livres, une photographie. Wufei, treize ans, et une jeune fille de son âge, qui marchent devant toute une procession. La fille ne le regarde pas, l'air en colère. Mais lui, lui jette par dessous un petit regard à la fois exaspéré et quelque peu inquiet. Ils sont vêtus d'une tenue traditionnelle. Derrière, juste deux idéogrammes, traduits en romaji dessous, ces noms: Shirin Meiran et Chang Wufei.
Dans une petite boite, une chaîne en or, avec une bague toute simple, comme une alliance, passée dessus. Et à la chaîne un ruban blanc entremêlé, taché du brun sec du vieux sang.
La fille de la photo avait des rubans blancs autour de ses chignons.
 
Avec une colère impuissante, Duo rassembla ce qu'il pensait être le plus important, le temple, la photographie et la bague, puis claqua la porte de la chambre vide et se dirigea vers la sienne à grands pas, les larmes aux yeux.
Il s'essuya rageusement les yeux. Il refusait de pleurer pour Wufei.
Il prit son propre sac et alla rejoindre les autres pilotes à l'extérieur. Heero était adossé contre la camionnette du côté conducteur, et il apercevait par la porte arrière Quatre assis sur un banc qui courait le long de la malle arrière du véhicule, et les longues jambes de Trowa qui devait être assis en face, tout contre la portière pour pouvoir guetter à l'extérieur. Quatre ne portait aucune expression. Son regard était vide, d'une tristesse sans fond, ses yeux rouges. Il serrait les dents.
Duo s'arrêta quelques secondes, pris d'inquiétude pour son ami l'empathe. La disparition de Wufei l'avait vraiment frappé profondément, peut-être plus que les autres, parce que d'une certaine manière, il avait vécu les événements, il avait été là. Il se demanda s'il ne devrait pas aller lui tenir compagnie pour essayer de lui remonter le moral. Après tout, c'était son rôle… non?
Mais il ne s'en sentait pas le courage.
Il aperçut une épaule couverte d'un pull bleu et une longue main se posa sur le genou du blond, attirant son attention. Celui-ci releva la tête vers Trowa, et Duo vit son expression changer légèrement. Finalement, il soupira et secoua légèrement la tête. Mais il n'avait plus entièrement l'air aussi vide.
Trowa prendrait soin de Quatre… Son regard quitta les portes arrières et se fixa sur Heero qui attendait toujours, et qui le regardait. Il s'aperçut avec un sursaut qu'il s'était arrêté pour les observer en plein mouvement et était resté dans le chemin… et que le japonais n'avait pas cessé de l'observer depuis qu'il était dans la maison.
Les yeux bleu sombre fixés sur lui le gênaient. Yuy devait le trouver bête; ou peut-être s'irritait-il de cet air distrait qu'il avait pris. Il s'efforça de remettre son masque en place en avançant vers le véhicule, mais vit soudain les yeux s'étrécir sous les mèches sombres.
Heero secoua la tête. Duo essayait de dissimuler à nouveau ses véritables sentiments; mais ce n'était pas la peine. Il savait ce qu'il y avait derrière; et même s'il n'avait pas connu suffisamment l'américain pour s'en rendre compte, il l'aurait senti à l'odeur et au langage corporel. Le pas de Duo avait quelque chose de fatigué, de… plat, sans énergie. Même sa natte semblait soumise à ce poids invisible qu'il avait sur les épaules, pendant misérablement, sans osciller comme d'habitude en de grands arcs derrière lui.
Le pilote de Wing dédia un regard concerné à l'américain, et fronça les sourcils d'un air pensif. Duo écarquilla brièvement les yeux devant la tristesse qui passa fugacement sur son visage, comme un reflet du sien, et avec un soupir abandonna toute tentative de comédie. Heero savait qu'il faisait semblant alors, à quoi bon? … De plus, il savait qu'il n'avait autorisé cette tristesse à apparaître, lui qui avait parfait contrôle de ses non-expressions, uniquement pour lui montrer qu'il ne penserait pas moins de lui si Duo se laissait un peu aller.
Les deux pilotes se regardèrent quelques secondes de plus, sans bouger, puis Heero cligna des yeux et le moment fut brisé. Il se retourna et prit place derrière le volant, allumant le moteur à gestes secs. Quelques secondes plus tard l'américain l'avait rejoint dans l'habitacle. Ils quittèrent le coin en silence, sans se regarder, ni regarder en arrière.
La bombe qui allait effacer toute trace de leur passage exploserait seulement quelques minutes plus tard, une fois qu'ils seraient à une distance suffisante.

[Examen] [Eveils]