Alizea ne resta chez Ashram que parce qu'elle ne savait où aller. Mais
elle demanda à Uriel la permission de dormir dans sa chambre, le seul
endroit où elle se sentait à peu près en sécurité,
et se mit en devoir de ne plus le quitter, lui ou Ashriel, d'une semelle. Celui-ci
parut stupéfait, mais il accepta sans se poser de questions, renseigné
par son expression et l'attitude d'Ashram sur les causes de sa mauvaise humeur.
Elle refusa d'adresser la parole à celui-ci dans les jours qui suivirent.
Il avait essayé de lui parler, mais elle avait purement et simplement
tourné le dos pour se réfugier près de sa mère,
comme s'il n'existait pas. Celle-ci avait aussi très bien compris qu'il
y avait de l'eau dans le gaz, mais elle s'était contentée de lui
conseiller de lui flanquer deux ou trois paires de claques s'il lui posait des
problèmes, remède universel chez les démons. Elle semblait
oublier qu'Alizea était loin d'avoir sa force
Trois jours plus tard, elle annonçait à Alizea qu'ils allaient
donner une fête, pour le retour d'Ashram, et que ce serait l'occasion
de réunir toute la famille et les amis. Elle invita Alizea, et quand
celle-ci fit mine de refuser, elle insista tellement qu'elle finit par accepter
seulement de peur de paraître mal élevée. Ashriel, qui depuis
son arrivée prenait grand plaisir à jouer à la poupée
avec elle, l'habilla d'une grande robe qu'elle avait portée au temps
de sa jeunesse. Elle était longue, très décolletée,
et laissait les épaules découvertes et le dos nu
comme pratiquement
tous les vêtements féminins démoniaques, conçus pour
laisser passer les ailes au cas où. Elle était très mal
à l'aise dedans, mais ne voulait pas paraître impolie en la refusant.
Qu'il était loin, le gros pull large qui la camouflait aux yeux de tous
Seul un invité était déjà là quand elle arriva,
suivant les parents d'Ashram, dans la salle louée pour l'occasion. Il
dégageait une puissance inouïe, paralysante, et une douceur tout
aussi grande. L'archange Uriel, le parrain du frère d'Ashram, était
grand, distingué, très aristocratique, la trentaine environ. Il
était blond cendré et ses cheveux descendaient jusqu'à
sa taille en ondulant. Ses yeux étaient noirs, très doux. Ses
ailes d'une blancheur immaculée étaient immenses, et pas une plume
n'en dépassait. Il montra envers elle une curiosité polie, pleine
de respect.
-Ainsi, c'est vous la jeune humaine dont on m'a tant parlé
Je ne
m'attendais pas à vous rencontrer ici. Je suis charmé, demoiselle
Et, se penchant en avant, il lui baisa la main comme un gentleman, sans paraître
remarquer sa gêne. Comme les autres invités, démons pour
la plupart, commençaient à arriver, il l'entraîna un peu
à l'écart.
-Nous avons ressenti votre puissance quand vous êtes entrée dans
notre monde en brisant le sort de Michaël, lui dit-il sur le ton de la
conversation polie. Vous nous avez stupéfié, les autres archanges
et moi. Vous êtes étrangement douée, pour quelqu'un qui
vient d'un monde sans magie
-Je suis désolée d'avoir forcé le passage, se justifia-t-elle,
je ne connaissais ni votre pays, ni vos lois, ni même ma propre puissance
-Mais vous ne pouviez le savoir, la coupa-t-il d'une voix douce, et de toute
façon, vous n'êtes pas une ange et ne sauriez être tenue
d'obéir au Pacte
Ils furent interrompus par un vacarme infernal, produit, contre toute vraisemblance,
par un seul type. Un démon aux ailes d'une envergure impressionnante,
avec des jambes de bouc, et une petite queue de même, remarqua-t-elle
quand il se retourna un moment. On aurait dit un faune monté en graine.
Costaud, très grand, au moins deux mètres de haut, et assez trapu.
Il avait les cheveux courts, en brosse ébouriffée, et deux grandes
cornes du genre de celles d'Ashram, mais bien plus longues et plus torsadées.
Il était vêtu en tout et pour tout d'un pagne autour des reins,
mais avec ses jambes bizarres, il aurait eu du mal à passer un pantalon
Et ses jambes étaient trop poilues pour paraître nues, de toute
façon.
-Je rêve ou je sens une pucelle dans le coin? s'exclama-t-il en avançant
vers eux; et Alizea pensa enfin à sonder sa puissance.
Elle cligna des yeux plusieurs fois sous le choc. La magie d'Uriel était
déjà effrayante par son étendue, même si elle était
pacifique par nature, mais la magie du type qui avançait, bien qu'à
peu près aussi étendue, n'était formée que de Flammes
et de Ténèbres. C'était un archidémon
-Tiens, Astaroth, salua Uriel avec mauvaise volonté. J'aurais dû
ne pas compter sur le fait qu'il serait trop ivre pour venir
chuchota-t-il
en aparté.
-Tiens tiens
Une jolie petite humaine mignonne à croquer (sourire
tous crocs dehors) et un emplumé avec un balai dans le cul, drôle
de couple
-Je croyais qu'il était convenu que nous ne nous disputerions pas aux
réunions de famille, Astaroth, déclara Uriel d'un ton toujours
aussi calme, mais un peu sec quand même.
-Je me dispute, moi? Première nouvelle
déclara l'archidémon
d'un air détaché. C'est le balai qui te choque? T'as tort, tu
devrais essayer, tu sais, en vrai c'est plutôt un ustensile intéressant
Puis, ignorant délibérément l'archange, il regarda Alizea,
la détaillant de bas en haut avec un sourire charmeur qui aidait beaucoup
la jeune fille à comprendre d'où venait celui d'Ashram
Astaroth
était séduisant, s'aperçut-elle avec surprise, même
s'il était bizarrement formé. Mais un peu - très - effrayant
aussi, avec ce regard brûlant
On comprenait pourquoi les humains
en avaient fait le démon de la luxure, il avait un charisme d'un puissance
effrayante. Ses pensées étaient clairement lisibles dans les yeux
d'or qui la détaillaient de font en comble et elle sut qu'elle rougissait
violemment. A ce moment, Uriel fils de Killian arriva, et elle se sentit sauvée.
-Allons, seigneur, le réprimanda gentiment le jeune homme, vous savez
bien que cette fille appartient à votre filleul, vous ne comptez pas
la lui voler!
-Elle est vierge
Ashram est une honte pour moi, déclara-t-il théâtralement,
avec un grand geste de la main qui montrait l'étendue de sa déception.
-Papa dit pareil! rit le jeune Uriel.
-Une si jolie pucelle! continua-t-il en soulevant son menton d'une main sans
la regarder, prenant le garçon à témoin. Il aurait viré
strictement homo, ou quoi?
Alizea rougit encore plus et se mit à tousser violemment.
-Euh, à vrai dire, c'est pas qu'il ait pas essayé
lâcha-t-elle
d'une petite voix gênée.
Les crocs de l'homme étaient vraiment impressionnants, surtout quand
il souriait comme ça, se dit Alizea.
-Hou la petite sauvageonne
Mais c'est que j'adore ça, moi, les
filles qui ne se laissent pas faire!
-Oui, ben Ashram aussi, et si c'est à vous qu'il le doit, je ne vous
en fais pas compliment! répliqua Alizea sans réfléchir.
Je suis humaine, moi! J'ai pas assez de force pour lui faire suffisamment mal
quand il m'embête!
Alizea se tut, mortifiée. Elle était folle!!! Elle venait de critiquer
un archidémon! Et pas très poliment, en plus!!
Mais Astaroth avait vraiment un faible pour les jeunes filles avec un fort caractère
et se contenta, à son énorme soulagement, d'éclater de
rire.
Quand les danses débutèrent, Alizea alla se cacher sur le balcon.
Danser n'aurait pas seulement été risqué vue sa 'cote de
popularité', mais lui aurait rappelé trop de souvenirs. Sa danse
avec Ashram, par exemple, du temps où elle
L'aimait bien. Elle
fit donc de son mieux pour ne pas entendre la musique. Elle s'accouda à
la balustrade, admirant la nuit, la ville endormie. C'était peut-être
dû à l'air plus pur et à l'absence de néons, mais
la nuit était bien plus sombre. Deux lunes brillaient dans le ciel, l'une
jaune, à l'horizon, l'autre bleue et presque au zénith.
Une dizaine de danses passèrent, puis quelqu'un vint s'accouder à
côté d'elle. Elle tourna la tête, lentement. Si c'était
Ashram, elle allait le jeter en vitesse
C'était Reiyel. Accoudé les bras croisés, il regardait
les lunes. Ses cheveux noirs et ses ailes étaient agités par le
vent, et il jouait distraitement avec une de ses plumes d'ébène,
la faisant rouler entre ses doigts -comme Ashram avec sa plume à elle
- Alizea rougit: elle venait de se surprendre à le trouver séduisant,
et certaines de ses murs lui étaient revenues à l'esprit.
Il se retourna vers elle, souriant d'un air moqueur, comme s'il avait entendu
ses pensées
Mais elle avait tort de le prendre comme ça,
il souriait toujours ainsi.
-Ne reste pas toute seule ici, viens danser avec moi.
-Merci, soupira-t-elle, mais si je suis venue ici, c'est que je n'avais pas
envie qu'on m'invite à danser, justement.
-Si tu y tiens, je suis d'accord pour que tu m'invites toi-même.
-Crétin!! Je ne veux pas danser, c'est tout.
-Oh, je comprends
Tu as peur de te retrouver face à Ashram
-Pas du tout! Je me fiche bien de lui, et de ce qu'il pense!! C'est pas mon
petit copain!!
-Tu t'en fiches? répéta-t-il.
-Oui!!
-Tu pourrais danser avec quelqu'un d'autre, ça ne dérangerait
ni lui, ni toi?
-Lui, je m'en fiche que ça le dérange, moi certainement pas!
-Eh bien, prouve-le
dit-il d'un air goguenard en lui tendant la main.
Là, il l'avait eue
Il lui sourit, charmeur.
-
Bon, mais juste une. Et si tu essayes de faire autre chose que danser,
je t'arrache les yeux!!
Il lui sourit sans lui répondre, et l'entraîna vers la piste.
Il dansait remarquablement bien, il était très souple, avec un
excellent sens du rythme - mais il avait de l'entraînement grâce
à autre chose sans doute
Argh! Pourquoi pensait-elle toujours à
ça en sa présence? Mais il exsudait une telle sensualité
qu'il était dur de ne pas avoir de pensées de ce genre en sa présence,
malheureusement.
Elle se laissait aller, commençant à se détendre et même
à apprécier la danse. Jusqu'au moment où elle vit de quel
côté il l'avait entraînée.
Adossé au mur, Ashram les regardait danser. Il tentait de rester sans
expression, mais ne pouvait s'empêcher de paraître furieux et blessé
à la fois. Et même de là où ils étaient, elle
pouvait voir jouer les muscles de sa mâchoire.
-Reiyel, tu l'as fait exprès, pas vrai?! Eloignons-nous!!
-Pourquoi? Tu l'as dit toi-même, tu n'appartiens pas à Ashram.
Qu'est-ce que ça peut te faire, qu'il nous voie ou non?
Et il laissa glisser la main qui était sur sa taille pour lui caresser
lentement la hanche.
Il fallut à Alizea quelques minutes pour comprendre ce qui s'était
passé.
Ils étaient par terre, tous les deux, au milieu d'un cercle de spectateurs,
et se battaient sauvagement. Il y avait du sang sur le parquet. Et ils se taisaient.
En un flash, elle revit le combat le jour de la beuverie. Ils n'avaient pas
cessé de se lancer des défis amicaux et des injures bon enfant
Mais déjà là, ils se battaient à cause d'elle
Ashram était complètement fou de rage. Il étranglait Reiyel
d'une main en tentant de l'éventrer avec ses griffes. Reiyel, écarlate
de ne pouvoir respirer, bourrait Ashram de coups de poing qui ne le faisaient
pas s'écarter d'un pouce et rassemblait sa magie pour un sort de ténèbres
extrêmement puissant. Ils avaient bien l'intention de s'entretuer
Alizea se précipita vers eux, bousculant sans ménagement les spectateurs
ravis à l'annonce d'une bagarre. Elle leur hurla de s'arrêter,
mais ils n'entendaient pas.
Reiyel posa sa main à plat sur le ventre d'Ashram et lança son
sort. Le plafond explosa sous le rayon d'énergie, tandis qu'un geyser
de sang giclait et retombait en pluie sur les spectateurs les plus proches.
Alizea sentit qu'elle allait s'évanouir. Mais elle résista assez
longtemps pour s'apercevoir qu'Ashram n'avait été touché
qu'au côté, moins profondément que le sang pouvait le faire
croire
Et qu'il avait fait jaillir de sa main une longue épée
noire gravée de runes rouges. Et s'apprêtait à s'en servir
pour clouer Reiyel au plancher.
Elle se jeta en avant, à demi évanouie sous la terreur qu'elle
ressentait pour eux deux, et lança instinctivement les mains vers eux.
Elle sentit cette fois le moment précis où les ailes apparurent
et se déployèrent. Elle réussit à les séparer
en les enfermant chacun dans une bulle de protection différente. Ashram,
arraché à sa proie, tentait vainement de briser sa sphère,
furieux, y mettant toute son énergie. Sous le choc, il avait lâché
son épée, qu'un spectateur avait ramassée. Reiyel s'assit
tant bien que mal, épuisé, et tenta de reprendre son souffle.
Lui aussi était blessé, et en beaucoup d'endroits, mais moins
profondément.
Alizea tremblait de tous ses membres en mobilisant toute son énergie
pour maintenir la sphère d'Ashram, libérant Reiyel qui s'était
calmé. Il tentait de la détruire de toute sa force magique et
de tous ses contre -sorts, et elle avait un mal incroyable à ne pas laisser
sa sphère être détruite. Elle devait la recréer toutes
les deux secondes en moyenne, elle espérait qu'elle ne se fatiguerait
pas avant lui
Au bout de cinq minutes d'une rage meurtrière totale et incontrôlée,
il se calma un peu, cessant de tempêter, mais il lançait des regards
tellement assassins à son cousin qu'il ne faisait aucun doute que dès
qu'il serait libre, il lui sauterait dessus de nouveau, malgré ses blessures.
Uriel s'était frayé un chemin jusqu'à elle, suivi de son
parrain toujours aussi imperturbable. Elle voyait du coin de l'il qu'Astaroth
aussi s'était approché et regardait la scène, sourcils
froncés.
-Je vais maintenir la sphère, jeune fille, lui dit Uriel calmement, déployant
une protection d'un niveau bien supérieur autour de la sienne. Laissez-vous
aller.
Ashram, qui avait compris qu'on ne le laisserait pas sortir de sitôt,
hurlait à s'en arracher les cordes vocales à l'adresse de son
cousin, entre autres les très classique "fils de pute", "bâtard"
et autre "enculé". Mais son cousin ne le regardait même
pas, occupé à détailler ses blessures tout en sifflant
entre ses dents d'un air vexé.
-Putaaaaaiiiiin, y m'a bien eu le môme! Il était pas si balaise
la dernière fois
Uriel se pencha sur lui pour le guérir tout en le houspillant de reproches.
-Bien fait, andouille!! Tu le sais, toi, qu'il y tient, à cette fille!!
Tu n'avais pas à la draguer devant lui!! Pour ce qui est du sexe, t'es
le roi, mais quand il s'agit des sentiments, t'es vraiment un crétin!!
Tu n'as pas encore compris qu'il l'aime?
Alizea se retourna comme si la salle venait de s'effondrer derrière elle.
-QUOI?!!?!
Ashram avait soudain cessé de crier. Il était aussi surpris qu'elle,
et aussi gêné.
- C'est
C'est pas vrai!!! recommença-t-il à rager. Je suis
un démon!!! Je n'aime personne!!! Personne!
Mais il n'avait pas l'air sûr à cent pour cent de ce qu'il disait.
Ses joues, constata Alizea avec stupeur, étaient rouges, et ses insultes
plus hésitantes
L'archange Uriel, le jugeant calmé, leva
le sort et s'approcha de lui pour guérir la plaie qui saignait toujours.
Ashram le repoussa sans le regarder, n'accordant aucun intérêt
aux cris horrifiés des spectateurs devant cet irrespect inconscient,
et encore moins à la personne offensée.
-Que je l'aime ou non, cria-t-il à l'ange noir, elle est à moi,
Reiyel!!! Et si tu la retouches, dit-il avec un calme soudain et glacé,
je te jure que je te tuerai.
Alizea, pétrifiée, ne savait plus que penser. Cet imbécile
d'Ashram était prêt à se faire tuer pour établir
son droit de possession sur elle
Avant qu'elle ait pu se ressaisir, un brouhaha d'exclamations stupéfaites
courut dans toute la salle, depuis la porte d'entrée. Ca n'avait donc
rien à voir avec la bagarre
Elle parvint à saisir des bribes de la rumeur qui courait dans la salle.
-Gabriel?
-Oui, c'est lui, j't'assure!!! L'archange du vent en personne!!
-GABRIEL!? Que fait-il là?!
Astaroth se redressa de toute sa hauteur et plissa les yeux. Alizea le sentait,
elle aussi, une puissance magique exceptionnelle, encore supérieure à
celle d'Uriel, qui avançait dans la salle
La foule se fendait devant
lui comme la mer Rouge devant Moïse. L'archange Uriel le regardait approcher,
perplexe devant cet invité inattendu.
Alizea, les ailes toujours déployées, chercha à apercevoir
la cause de ce remue-ménage tout en avançant vers Ashram. Elle
laissa tomber ses indécisions pour l'instant, et commença à
le guérir avant qu'il n'ait perdu tout son sang, tournée vers
l'archange inconnu.
On avait expliqué à Alizea que les très puissants magiciens
avaient tendance à cesser de vieillir à l'apogée de leur
puissance. Celui-là devait être extrêmement puissant, alors
Il avait l'apparence d'un enfant de treize ans
Il était petit,
mince, mignon encore, et vêtu à la mode du coin, pantalon bouffant
et tunique fendue pour laisser passer les aile.
Mais quelque chose mettait Alizea mal à l'aise quand elle le regardait
comme il avançait vers leur petit groupe, dédaignant les autres
personnes présentes. Il lui rappelait quelqu'un. C'était son visage
Il était blond doré- comme elle. Et ses yeux azur avaient la même
forme que les siens
Elle connaissait ce visage.
C'était le sien.
Tel qu'il aurait été si elle avait été un garçon
de treize ans, certes, mais à part ça
Semblable au sien, exactement, jusque dans les moindres détails. Elle
n'avait jamais rencontré quelqu'un qui lui ressemble à ce point-là.
C'était peut-être l'ancêtre à qui elle devait ses
pouvoirs
? se demandait-elle, hésitante, et ne voulant pas admettre
ce que son cur avait compris.
Elle n'avait jamais connu qu'une seule personne qui lui ressemble à ce
point. Et cette démarche, ce regard
Son père, Gabe Guérin.
L'archange Gabriel était son père.
Il la regardait d'un air penaud et soulagé à la fois, se dandinant
d'une jambe sur l'autre devant elle, comme un gamin pris en faute -comme il
l'avait toujours fait.
-Bonsoir, ma petite fille, déclara-t-il lentement, et elle se rendit
compte que si la voix était passée de basse à alto, les
intonations étaient les mêmes. Tu es devenue très forte,
à ce que j'ai senti
- C'est un rêve, n'est-ce pas? demanda-t-elle en riant nerveusement, au
bord de la crise, pensant qu'elle allait devenir folle si ce n'était
pas déjà le cas. On m'a dit que tu étais mort
-Je n'ai pas eu le choix, lui dit-il en souriant timidement, sans la regarder.
Je suis désolé, ma chérie
Mais il y avait un très
grave problème, il y avait un début de guerre civile
Je
n'ai pas eu le choix, j'ai dû rentrer le plus vite que j'ai pu. Je croyais
que tu étais encore en sécurité dans le monde des humains,
sinon, je serais venu te chercher
Mais je ne savais pas que tu avais dû
vivre chez un démon, sinon, je serais venu tout de suite!! continua-t-il
en fixant Ashram d'un regard méprisant et menaçant.
Alizea explosa.
-JE CROYAIS QUE TU ETAIS MORT ET TOUT CE QUE TU TROUVES A ME DIRE C'EST "JE
SUIS DESOLE?" PAS EN DANGER CHEZ LES HUMAINS?! ET L'ONCLE RUDY, C'EST PAS
UN DANGER?! IL M'A FRAPPE, IL ME TRAITAIT COMME UN CHIEN, IL ME TORTURAIT EN
ME REPETANT QUE TU ETAIS MORT ET TOI TU OSES CRITIQUER ASHRAM QUI LUI ETAIT
LA POUR S'OCCUPER DE MOI ALORS QUE TU M'AVAIS ABANDONNEE??!!!
Elle s'approcha de son archange de père et le gifla le plus fort qu'elle
put, puis, le regardant fixement, elle lui dit doucement:
-Je te déteste.
Et, tournant les talons, elle se précipita hors de la pièce, semant
derrière elle des plumes échappées de ses ailes qui avaient
brusquement disparu.