Deux jours plus tard, Ashram lui proposa de venir en ville avec lui. S'ennuyant
un peu, et pensant qu'il n'y avait pas trop de risques (il n'allait pas la violer
devant tout le monde quand même!), elle accepta. Et puis, ce serait l'occasion
de rencontrer son cousin Reiyel, dont les deux frères lui parlaient très
souvent.
Reiyel était cousin lointain et ami proche d'Ashram. Lui aussi avait
une famille pas ordinaire, même pour cette ville de métissages.
Sa mère était un ange déchu (privé de ses droits
en tant qu'ange et de la possibilité d'entrer dans une ville d'anges
et de fréquenter ceux de sa race), et son père, un démon
des Glaces, frère de sang du père d'Ashram.
Le démon lui expliquait tout ça sur son cousin, tout en descendant
une rue assez peuplée, majoritairement de démons, mais aussi d'orques,
de trolls, de centaures
Qui tous lorgnaient Alizea d'un il concupiscent,
mais n'avaient pas osé s'approcher. Encore heureux pour eux!! pensait-elle
en écoutant Ashram. Elle venait d'apprendre d'Uriel qu'un certain sort
de protection physique individuelle de gros diamètre, lancé vite
tout près d'une personne, avait tendance à projeter ladite personne
assez brutalement à plusieurs mètres de distance. Sort qu'elle
avait très bien mémorisé.
Ashram avait donné rendez-vous à son cousin à la terrasse
d'une taverne. Ils s'assirent donc pour l'attendre, prêts à y passer
une petite heure ou deux, l'exactitude, selon Ashram, ne faisant pas partie
de la culture des démons et encore moins de celle de Reiyel. Ash commanda
un pichet d'une sorte de vin, et se mit en devoir de le descendre tout seul
pour passer le temps, Alizea lui ayant rappelé qu'elle n'aimait pas l'alcool.
Quand Alizea lui demanda quelle était la part d'ange que Reiyel avait
en lui, Ashram répondit avec un petit rire:
-Ce qu'il a d'un ange? Les plumes.
-Et?
-C'est tout. Et encore, elles sont pas de la bonne couleur. Mis à part
qu'il a des plumes au lieu de cuir, il a toutes les tendances du parfait démon,
de ceux dont on parle dans votre Bible. Il a presque tous les défauts,
j'te jure! Il est voleur comme un pilleur de tombes, menteur comme un arracheur
de dents de vampire, aussi bagarreur que moi et trois fois plus vicieux.
-Ca, c'est pas possible, s'exclama Alizea, moqueuse. Et comment il ferait ça?
Question vice, t'en connais pourtant un rayon
-Mais moi, je me limite aux jeunes filles.
En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, Alizea était devenue
écarlate.
-Oh, non
Tu veux dire qu'il est
-Aussi bisexuel qu'un troupeau de phoques hétéros! Et gros, rajouta-t-il
pour enfoncer le clou, tant qu'y a un trou, il bourre!
Choquée par les paroles crues d'Ashram, Alizea se détourna. Ashram
devait encore exagérer rien que pour la voir rougir, c'était son
petit jeu favori
Elle ne le croyait pas vraiment.
-Tiens, quand on parle du démon
ajouta Ashram en vidant son verre.
-On en voit la queue! termina pour lui un jeune homme, qui devait descendre
du ciel car Alizea ne l'avait pas vu approcher.
Ce devait être, Reiyel, se dit-elle en voyant les ailes étroites
aux fines plumes noires qu'il faisait disparaître.
-C'est une proposition sérieuse que tu me fais, Ashounet? ajouta-t-il
avec un sourire encore plus moqueur et vicieux que celui d'Ashram dans ses grands
jours.
Il esquiva en riant le coup de poing qu'Ashram faisait mine de lui donner, puis
se tourna vers Alizea, l'examinant de bas en haut, la déshabillant du
regard, avec sur le visage une expression de loup affamé qui se demande
si la brebis qu'il vient de trouver vaut vraiment la peine d'être mangée.
Puis il eut un grand sourire, méchant, moqueur
Beau.
C'était vrai que l'ange noir était indubitablement séduisant.
Ses yeux étaient allongés vers les tempes, presque bridés,
bordés de cils noirs et fournis fabuleusement longs, et ses iris étaient
d'un bleu clair froid qu'on ne peut voir qu'au cur des glaciers. Ses cheveux
couleur aile de corbeau étaient fins, très longs, jusqu'aux reins
s'ils n'avaient pas été attachés en une queue de cheval
haute qui dégageait sa nuque, tirant tous ses cheveux en arrière
sauf quelques mèches devant les oreilles et en travers de son visage,
qui donnaient encore plus de malice à son regard. Il était beaucoup
plus grand qu'Ashram, dans les 1M85 environ, et plus large d'épaules
aussi.
-Miam miam! s'exclama-t-il en passant sa langue sur ses lèvres. T'as
ramené un souvenir de voyage, à ce que j'vois, mon chéri!!
-Va te faire foutre!! J'suis pas ton chéri et écarte-toi d'elle!!
râla Ashram, énervé qu'il se penche sur Alizea.
-Elle est à toi, c'est ça? répliqua Reiyel d'un ton moqueur,
sans bouger d'un pouce.
-Oui, elle est à moi!!! Ecarte-toi vite, sinon
Ashram se leva à demi de sa chaise, arborant un air menaçant que
Reiyel ne prit visiblement pas au sérieux. Il ne s'écarta pas
le moins du monde, loin de là, et passa même un bras autour de
la taille d'Alizea, qui ne savait que faire et était devenue écarlate,
gênée autant par sa conduite que par la réponse d'Ashram.
-Reiyel, je te le dis pour la dernière fois.
Reiyel se pencha sur Alizea sans faire mine d'avoir entendu, ravi de pouvoir
à la fois lutiner une fille et ennuyer son cousin.
L'ange noir avait fait là une belle connerie. Avant qu'Alizea ait eu
le temps de voir quoi que ce soit, le démon avait frappé son cousin
d'une droite au menton qui le précipita à terre. Reiyel atterrit
sur les fesses, entre deux chaises, renversant une table au passage, et faisant
tomber de son tabouret une très belle démone dont il profita de
la position pour lorgner sous sa robe. Ashram, excédé, prit une
chaise par le pied et la lui lança, espérant attirer son attention.
Reiyel adressa un grand sourire amical à Ashram, et fit éclater
la chaise à vingt centimètres de son visage d'un sort de protection
de l'Eau. Il avait l'air très doué en magie, vue la facilité
qu'il avait eue à sortir le sort, et Alizea fut très surprise
et un peu effrayée de la puissance qu'il se mettait à dégager
Il était nettement plus fort qu'Ashram. Elle s'éloigna précipitamment
d'une bonne dizaine de mètres, comme tous les spectateurs.
Il se releva, s'époussetant distraitement, souriant toujours, et leva
négligemment la main. Une aura bleue en émanait. D'une intensité
qu'elle n'avait jamais encore ressentie. Brutalement, sans avertissement, il
la lança sur Ashram. A mi-chemin, l'aura prit la forme d'une douzaine
d'éclats de glace acérés comme des rasoirs, fonçant
droit sur le démon.
Ashram saisit une table par le pied et s'en servit comme d'un bouclier, puis,
une fois que les éclats de glace s'y furent incrustés jusqu'à
la traverser presque, il la jeta sur Reiyel, et comme celui-ci la déviait
sans même la toucher, il se jeta sur lui et le renversa. Ils roulèrent
à terre, se battant comme des chiffonniers, échangeant des coups
de poing, de griffes, de genoux, comme ils le pouvaient, frappant comme des
brutes.
Cette fois, Reiyel était désavantagé, ayant moins de force
purement physique, et il saisit la première occasion pour se séparer
de son cousin et pour s'écarte d'une roulade.
Ils se relevèrent ensemble, d'un bond, et se préparaient chacun
à utiliser un sort, quand le tavernier intervint. Il se précipita
sur eux pour leur demander de dégager et d'aller se battre ailleurs,
après, bien entendu, avoir payé les dégâts et les
consommations. Son fils, qui l'accompagnait, prit très mal l'éclat
de rire de Reiyel et se précipita sur lui pour "le lui faire rentrer
dans la gorge".
L'ange noir prouva à Alizea qu'Ashram n'avait pas exagéré
tant que ça sur ses murs. En clair, il saisit le jeune homme par
la taille d'une main, le plaquant contre lui, tandis que, profitant de son déséquilibre,
il lui roulait une pelle, et lui pelotait les fesses bien comme il faut de sa
main libre. Puis, avant qu'il ne soit revenu de sa surprise, il l'envoya valdinguer
à quelques mètres, accompagné d'une tape sur le postérieur.
Le père, outré, allait à son tour se précipiter,
quand Ashram lui lança sous le nez un joli petit mur de flammes. Le tavernier
stoppa net. Il semblait avoir enfin réalisé de quelle caste de
pouvoir étaient ses deux clients, et se mit à trembler.
-Pitié, nobles seigneurs, ne faites pas de mal à mon fils!! Sinon,
qui m'aidera à la taverne? Et ne détruisez pas mon établissement!!
-Si t'as plus de taverne, suggéra Reiyel en riant, t'as qu'à te
reconvertir dans la maison close!! T'as déjà un employé
plus qu'appétissant! ajouta-t-il en lorgnant le fils, qui devint écarlate
quand l'ange noir lui lança un baiser et un clin d'il.
Il regarda Ashram, puis laissa s'évanouir son sort.
-Tavernier, ajouta celui-ci, mains sur les hanches, il n'est pas question de
te payer les réparations, mais si tu nous sers du vrai vin et pas de
cette piquette, peut-être qu'on te laissera un pourboire
Il chercha Alizea du regard, puis lui fit signe de les suivre au fond de la
salle, où ils s'assirent.
Pendant des heures, elle les regarda se saouler en racontant toutes les histoires
de cul les plus scabreuses dont ils avaient entendu parler, ou qu'ils avaient
commis eux-mêmes, se disputer sporadiquement, s'insulter, se réconcilier,
avaler bien plus de litres d'alcools divers que l'estomac pouvait censément
contenir, chanter les chansons paillardes les plus choquantes qu'on ait jamais
chanté dans les bouges les plus mal fréquentés, draguer
toutes les serveuses et les clientes, et, dans le cas de Reiyel, les serveurs
et les clients aussi
Quand Ashram fut presque par terre, il fit, très sérieusement,
jurer à Alizea qu'elle ferait tout pour le défendre si l'ange
noir voulait profiter de son état pour tenter de le violer. Reiyel, quand
à lui, le remercia de l'idée qui ne lui était pas venue,
puis promit tout aussi sérieusement à Ashram que dès que
celui-ci serait majeur, il l'épouserait, puis, à Alizea, qu'il
la dépucellerait, et bien mieux que ne saurait le faire Ashram, lequel
était encore un gamin ne connaissant rien au sexe. Ledit gamin, se levant
pour le frapper, tout en beuglant qu'Alizea était à lui et qu'il
arracherait les couilles du premier qui poserait la main sur elle, s'écroula
par terre, vaincu par l'alcool, et malgré tous ses efforts, ne put se
relever, assommé pour le compte, sur quoi Reiyel déclara enfin
qu'ils avaient assez bu pour aujourd'hui.
Quand le tavernier se présenta pour leur demander de régler l'addition,
Reiyel (qui tenait apparemment mieux l'alcool qu'Ashram, lequel se débrouillait
déjà pas mal) lui déclara tout net:
-Il n'est pas question que je paye si c'est toi qui présentes la note.
Le père hésita longuement, déchiré entre son amour
pour son fils et son besoin d'argent pour réparer les dégâts,
et finit par se résigner à appeler son rejeton. Le pauvre jeune
homme s'approcha avec une réticence compréhensible, et une tête
de condamné à mort, pour recevoir l'argent. Avec un grand sourire
quelque peu aviné, Reiyel fouilla quelques instants dans sa bourse, puis
il en eut assez de ne pas trouver ce qu'il voulait et la lui donna carrément,
la jetant sur la table. Quand elle s'ouvrit et que son contenu se répandit
sur la table, Alizea put constater qu'elle était bourrée de pièce
d'or. Et vu la tête des tavernier, c'était bien plus que ce qu'ils
attendaient.
Reiyel se releva difficilement, se raccrochant à Alizea pour ne pas tomber
-tout en en profitant pour glisser sa main sur sa taille-, puis déclara
avec l'éloquence pompeuse du type qui commençait à être
considérablement habitué aux éléphants roses -ou
aux dragons à pois, comme on disait ici:
- C'est assez pour que vous nous appeliez un coche, je suppose?
Il ne fit pas mine d'entendre la répartie du fils ("c'est assez
pour vous en acheter trois, oui!!"). Mais il lui laissa quand même
un "pourboire".
Sa main aux fesses.
Reiyel, qui faisait partie des très rares personnes chez qui la magie
noire n'annulait pas la blanche, avait grâce à son ascendance d'ange
accès à quelques sorts mineurs de guérison, et entre autres
à un sort dont Alizea n'aurait jamais imaginé l'existence, et
qui avait comme fonction de faire disparaître les symptômes désagréables
de l'ivresse.
Malheureusement, ce sort, il ne pouvait le faire marcher que sur lui. Il arriva
donc à marcher à peu près droit.
Quand à Ashram, il était tellement bourré qu'il ne tenait
presque plus sur ses jambes. Reiyel voulait bien l'héberger pour ce soir
dans sa propre maison, mais pour le mettre au lit, ce fut le problème
d'Alizea. L'ange noir était quand même trop mal en point pour saisir
sa chance de concrétiser ce dont il menaçait son cousin toute
la journée.
Le conducteur du coche, moyennant un petit pourboire, l'aida à porter
le démon jusque dans le salon. Elle réussit ensuite toute seule
à le tirer vers la chambre d'amis et à le hisser tant bien que
mal sur le lit.
Mais elle ne s'attendait pas à ce que, dans son état, il lui restât
assez de force pour la retenir contre lui quand elle voulut se dégager,
grâce au bras qu'il avait passé autour de sa taille quand elle
l'aidait.
-Ashram, ça suffit, lâche, demanda-t-elle d'une voix lasse tandis
qu'il l'attirait contre lui.
Il tira sur sa chemisette et posa une main sur sa cuisse, et elle tenta de se
dégager.
-Ashram, arrête!!!
Sa bouche se posa sur son cou, et il lui mordilla l'épaule. Elle savait
bien que mordiller, ça pouvait être un jeu assez agréable,
mais pas aussi fort!! Pour un peu ses crocs allaient lui percer la peau
-Tu me fais mal, arrête!!
Elle se débattit, mais il refusa de la lâcher.
Et soudain, elle eut peur.
Son regard avait perdu toute sa tendresse, tout son humour. Il était
devenu froid et agressif, et bien déterminé à aller jusqu'au
bout.
Il la serrait si fort qu'il lui fit mal. Elle tenta de le repousser, mais il
ne fit même pas mine de s'en apercevoir. Uriel avait eu raison, il était
bien trop fort pour elle
Elle commençait à avoir vraiment
très peur. Le type qui la serrait contre lui à l'en faire hurler
n'était pas l'Ashram qu'elle connaissait. On aurait dit que l'ivresse
faisait disparaître tout son côté ange. Le vrai démon
prenait le contrôle, et il était bien déterminé à
la violer, comprit-elle avec un début de panique.
-LACHE-MOI!!! cria-t-elle en le bourrant de coups de poing, mais il ne semblait
pas entendre ni ressentir quoi que ce soit.
Il arracha son chemisier, le déchirant de haut en bas.
-NOOON!!! ARRETE!!! hurla-t-elle, paniquée, se débattant de toutes
ses forces.
Peine perdue. Ses gestes n'étaient pas très précis ni très
vifs, mais suffisants pour lui interdire le moindre mouvement tandis qu'il déchirait
ses vêtements, n'ayant pas la patience de la déshabiller plus doucement.
Et il ne lui donnait pas la moindre occasion d'échapper à son
étreinte, à demi couché sur elle
Il se collait à
elle en se débarrassant comme il pouvait de ses propres habits, l'embrassant
jusqu'à la morsure, la caressant si violemment qu'il la meurtrissait
Alizea était totalement paniquée et il lui sembla qu'elle allait
s'évanouir. Se débattre n'avançait à rien, juste
à ce qu'il soit plus brutal
Et elle était si faible à
côté de lui
Elle se rendit compte soudain, à travers sa terreur, qu'il avait cessé
de bouger. Au bout de longues minutes où elle attendait la fin du répit,
elle osa remuer. Il l'étouffait sous son poids, totalement inerte. Elle
se tortilla, puis réussit à le repousser suffisamment pour se
glisser d'en dessous de lui, sa panique lui donnant des forces.
Il s'était endormi, assommé par tout l'alcool qu'il avait ingurgité
dans la soirée. Il ronflait.
Elle s'enfuit de la chambre en pleurant, seulement vêtue de sa culotte
et de la chemise déchirée. Elle passa la nuit dans le couloir,
recroquevillée dans un angle pour échapper aux courants d'air
qui faisaient baisser la température déjà glaciale que
Reiyel semblait adorer. Elle n'avait pas très envie d'aller le trouver
en pleine nuit pour lui demander quoi que ce soit. Il serait comme Ashram
Quoique peut-être moins brutal. Mais pour le même résultat.
Le lendemain matin, elle se réveilla en sursaut. Ashram venait de sortir
de sa chambre et avançait vers elle d'un pas incertain, se tenait le
crâne comme s'il craignait que sa tête ne tombe. Il devait s'appuyer
sur le mur pour ne pas tomber. Il l'aperçut et la dévisagea, surpris.
-Bah, kestufous là? T'as pas passé la nuit dans le couloir quand
même?!
Elle se redressa, le dévisageant pendant cinq bonnes minutes avant de
se décider à lui répondre. Il avait essayé de la
violer et maintenant il la regardait comme s'il la trouvait folle
Comme
s'il n'avait pas la moindre idée de ce qui lui avait pris de dormir dans
un endroit aussi inconfortable. On aurait dit qu'il avait tout oublié
-Tu ne te souviens pas de ce que tu as fait hier? demanda-t-elle d'une voix
à l'hystérie difficilement maîtrisée.
-Ben
J'me suis bourré la gueule, mais à part ça
soupira-t-il. J'ai encore fait une connerie?
-Tu as voulu me violer, répondit-elle avec une violence contenue. Et
si tu t'étais pas endormi tellement t'étais bourré, j'y
serais passée.
-Quoi?! s'exclama-t-il. Mais, j'ai pas réussi, t'as dit?!
-Non, mais c'était juste, soupira-t-elle, commençant à
se calmer.
S'il ne se souvenait plus de ce qu'il avait fait, c'était qu'il n'était
pas vraiment responsable
-Tant mieux
franchement, j'ai fait des trucs cons, mais te dépuceler
et pas m'en souvenir, j'l'aurais regretté toute ma vie!
Il aurait REGRETTE DE NE PAS S'EN SOUVENIR. Elle cria, révoltée
:
-Et me violer, tu l'aurais pas regretté?!! Enfoiré!!!
Il se redressa, la toisant d'un air froid.
-Non, pas vraiment. C'est vrai que j'aimerais mieux que tu sois consentante,
mais si tu me fais trop attendre
J'éviterai toujours au maximum
de te brutaliser, mais ne compte pas que j'attende toute ta vie.
Pendant longtemps, elle le fixa, abasourdie, entendant presque ses illusions
sur lui s'écrouler avec fracas. Au fond, il était bien un démon
comme les autres, dans le vrai sens du terme
Seulement, quand il était
ivre, il ne le cachait pas.
La claque n'avait pas fini de résonner sous le haut plafond qu'elle avait
tourné les talons, se dirigeant au pas de course vers la chambre de Reiyel.
Elle entra en faisant taper la porte dans le mur, et arracha ses couvertures
pour le réveiller. Il dormait nu, mais ce n'était pas ce qui allait
la gêner, dans l'état d'esprit où elle était.
-Oh, charmant réveil, bâilla-t-il en souriant à sa tenue
pour le moins déshabillée.
-Trouve-moi des habits et dis-moi comment rentrer chez Uriel.
-Hein? demanda-t-il, encore à moitié endormi. Pourquoi, des habits?
J'te trouve bien comme ça
commença-t-il à plaisanter.
Mais un regard à son expression l'arrêta net. Elle serrait les
dents et son regard était d'une fixité effrayante.
-OK, mettons que je n'aie rien dit
Y a des habits de femme dans le placard
du fond, tu devrais en avoir à ta taille sans problèmes si j'ai
bien noté les mensurati
OoooKay. Patapé, hein? Habille-toi,
conseilla-t-il en tentant de changer de sujet, une sueur froide au front devant
son regard meurtrier. J'te raccompagnerai.
Il s'assit au bord du lit pour la regarder fouiller dans son placard, y mettant
au passage un bordel pas possible. Quand elle eut trouvé une robe moins
déshabillée que les autres- mais très sexy quand même-
elle se retourna vers lui et le regarda en soupirant.
-Reiyel, s'il te plaît
-Quoi? Oh, excuse-moi
Et il se tourna.
- J'aime bien le miroir que tu as collé derrière ta porte, Reiyel
dit-elle avec un sourire forcé sur les lèvres qui prédisait
que le sourire n'allait pas tarder à se changer en rictus de fou homicide.
Tu peux pas plutôt "sortir"? demanda-t-elle en insistant lourdement
sur le "sortir".
-Oh, franchement, t'es pas sympa, dit-il en obtempérant, ses propres
habits sur le bras.
La robe était faite de tissu, assez large, mais ouverte jusqu'en haut
des cuisses; quand au dos, il était ouvert jusqu'aux reins
Mais
à comparé des autres, on aurait dit un habit de nonne. Une fois
habillée, elle sortit de la pièce, et fut accueillie par un Reiyel
admiratif, mais qui se tint à distance quand il eut constaté que
son expression n'avait pas changé.
-Dis, Reiyel, simple curiosité
Qu'est-ce que tu fous avec autant
de robes dans ton placard?
-Oh, j'en fais collection
En général, je les ai trouvées
tellement sexy sur la fille qui les portait que je les ai gardé en souvenir.
Elle lui jeta un regard affligé, se demandant avec quoi sur le dos la
fille en question repartait, puis sortit. Il la raccompagna, la guidant dans
la ville. Mais à un moment, il la laissa seule, au cri de "Wahou,
mais j'l'avais jamais vue cette vendeuse ici!!". Elle haussa les épaules,
affligée, et continua lentement, espérant qu'il la rattrape avant
la fin de cette rue pour lui dire où il fallait tourner.
Un mouvement d'énergie derrière elle l'alerta et elle se retourna
lentement. Six démons commençaient à l'encercler. Elle
ressentait leur puissance au moins de haute bourgeoisie, peut-être même
de basse noblesse, comme Ashram. Elle aurait pu crier pour alerter Reiyel, mais
elle était bien trop en colère pour ça. Elle les laissa
approcher à moins de deux mètres, puis, souriant sadiquement,
elle déploya son sort de protection le plus vite qu'elle put, en envoyant
voler la moitié dans les murs. Mais les trois autres résistèrent,
reculant tout au plus de quelques pas.
Elle les observa de bas en haut, toujours avec le sourire. Et laissa jaillir
toute sa puissance, prête à en découdre, en leur déclarant
d'une voix faussement douce:
-Vous voulez vous battre, mes chéris? A votre service!
Les démons échangèrent un regard, puis s'enfuirent à
toute allure. Elle les regarda partir avec un mépris absolu. Bande de
lâches!! Quel dommage, se bastonner lui aurait fait tant de bien
Reiyel alerté -un peu tard- par son aura, se dirigeait en courant vers
elle, l'air abasourdi. Elle se rendit compte que ce n'était pas elle
qu'il fixait, mais quelque chose au-dessus. Se calmant, elle se rendit enfin
compte qu'il y avait une chose de bizarre dans sa perception de son corps
Dans son dos. Elle ramena lentement une aile devant son visage, et passa la
main sur les plumes si blanches, le visage sans expression.
-On y va, Reiyel.
Il lui obéit sans discuter.