^_^ Coucou ! Ce fan fic est un petit délire de ma part et de celle de Kineko. On a eu l'idée générale ensemble, mais c'est moi qui me suis chargée de la rédaction et de la mise en ordre de nos gags débiles (j'en ai inventé quelques uns au passage).
PS ne vous étonnez pas si je laisse un peu toute la bande sauf Kura-chan et Hieï dans l'ombre, ce sont mes petits chouchous (surtout Hieï !) (mais j'avoue que là, il fait un peu trop gentil par rapport à la version du manga… Pas grave, c'est plus drôle !)
RePS, les persos, sauf Aka-chan, ne sont pas du tout à moi (et c'est bien dommage… Rhââ, Hieï !) mais à Togashi ou à je sais pas qui. Bon, tant pis… Et vive Yu Yu Hakusho !

Joyeux anniversaire Kurama!

Kurama ouvrit la porte coulissante du temple de Genkaï d'un mouvement brusque, la faisant claquer dans son cadre. Yusuke, qui s'amusait à tenir en équilibre sur deux doigts, en perdit l'équilibre de surprise, et son postérieur entra rudement en contact avec le tatami, lui arrachant un grognement de douleur. Kuwabara, assis en tailleur à ses côtés, se retourna vivement, et regarda fixement le Yohko.
-Ben, Kurama, ça ne va pas ? T'as pas l'air de bonne humeur, dit Yusuke.
-Ouais, ajouta Kuwa, t'as pas l'habitude d'être aussi brutal. Quelque chose ne va pas ?
Sans répondre tout de suite, Kurama referma la porte derrière lui, la refaisant claquer, avant de se retourner vers ses amis. Il fronçait les sourcils, l'air à la fois énervé et soucieux. Genkaï lui adressa un regard inquisiteur, se levant pour se diriger vers lui. Il prit une profonde inspiration, se passa les mains dans les cheveux, puis se lança.
- J'ai un petit problème...

Flash-back
Kurama se leva vers les huit heures et demie, tranquillement, pas pressé, comme il aurait aimé toujours se lever - et comme il l'aurait fait s'il n'y avait pas eu l'école. Mais on était samedi, aujourd'hui, et il était bien décidé à se reposer. Peut-être même à se mettre enfin à s'occuper de ce petit cerisier qui ne prenait pas bien.
Il sortit de sa chambre, et se dirigea vers la cuisine pour déjeuner. Il ne s'attendait pas à rencontrer son beau-père- il était en déplacement pour son travail- ni Shuichi-kun. En effet, son demi-frère ne se levait jamais avant onze heures quand il le pouvait- et même des fois quand il était censé ne pas pouvoir, d'ailleurs...
Mais la cuisine n'était pas vide. Sa mère, dos tourné à la porte, déjeunait, attablée face à un grand bol de café et à des tartines à la confiture - miam miam… Kurama se dirigea vers elle en silence, et se pencha pour déposer un baiser sur sa joue. Elle ne sursauta même pas.
-Je ne t'ai pas fait peur, Kaasan ?
-Penses-tu, quand il s'agit de mon fils chéri, je peux deviner sa présence sans problèmes… J'ai senti que tu arrivais quand tu étais déjà dans le salon… Tu veux une tartine ?
Kurama lui sourit et s'installa en face d'elle, après s'être rempli un bol de lait chocolaté. Il adorait ces petits moments tranquilles, si loin du stress des batailles, des inquiétudes quand l'un d'entre eux était blessé et qu'il devait le soigner, des " prises de tête " d'énigmes à résoudre, et même des petits soucis de lycéen comme les devoirs… Ou la manière de semer les filles qui lui couraient après sans en faire pleurer une --- rude tâche.
-Shuichi… lui dit soudain sa mère, un sourire radieux sur le visage.
Il leva les yeux de son bol, surpris par le ton de bonheur et de bonne humeur qu'elle avait pris.
-Tu ne te rappelles pas de ce qu'il y a demain ?
Kurama se creusa la cervelle, mais il ne se rappela rien. Ce n'était pas l'anniversaire de Shiori, ni la fête des mères, ni son anniversaire de mariage - ça ne faisait que six mois qu'elle était remariée. Ils n'étaient pas invités non plus, il n'y avait pas de fête ou autre chose…
-Pour être franc, non… Je ne me rappelle rien d'exceptionnel. Mais c'est peut-être que je ne suis pas encore réveillé, dit-il avec diplomatie.
-Demain c'est ton anniversaire, mon chéri. Tu vas avoir dix-sept ans. Tu ne t'en souvenais réellement pas ?
Kurama se donna une claque sur le front, se maudissant pour sa bêtise. Ca lui était complètement sorti de la tête. Pourtant, avec tous les cadeaux et les cartes de vœux qu'il avait reçus de sa classe…
- Eh bien, tu es le seul garçon que je connaisse qui soit capable d'oublier la date de son anniversaire… ("Normal, chez les Yohko, on la fête tous les cent ans.") J'avais pensé que tu aimerais peut-être recevoir tes amis, faire une petite fête… Enfin, pas vraiment une fête, on n'a pas le temps d'organiser ça, mais au moins inviter tes amis proches… Et puis, ce serait l'occasion pour moi de faire leur connaissance. Je suis si contente que tu te sois fait de vrais amis, et pas juste de simples relations, comme avant… Je voudrais vraiment les rencontrer… Shuichi ? ça ne va pas ?
-Si, si, ça va, Kaasan, répondit Kurama en tentant de recracher discrètement la gorgée qu'il avait avalée de travers et avec laquelle il s'étouffait. Mais, mes amis… De qui tu parles ?
-Eh, bien, de ces jeunes gens avec qui tu sors, par exemple celui qui était venu avec toi à l'hôpital, celui qui est venu te chercher une fois pour aller vous promener en ville, tu te rappelles ? Yu… quelque chose.
-Yusuke, compléta Kurama.
En effet, Yusuke était venu le chercher à la maison une fois- " promenade en ville " était un euphémisme poli pour dire qu'ils avaient couru derrière un ogre dévoreur de jeunes filles toute la journée pour essayer de lui casser la gueule. Finalement, après toute une nuit de poursuites, Hieï avait réussi à lui trancher une jambe, et Yusuke l'avait éclaté au Reigun - quand à lui, il avait gaspillé une bonne part de son énergie à soigner Kuwabara.
-Oui, Yusuke, c'est ça. Je t'ai déjà vu discuter avec lui plusieurs fois à la sortie des cours, et puis avec un autre garçon, grand, avec des cheveux roux…
-Kuwabara-kun.
-Invite-les donc ! Et aussi tes autres amis, par exemple la jeune fille avec les cheveux bleus…
-Elle s'appelle Botan, mais je ne crois pas qu'elle pourra, ni les autres d'ailleurs… Ils sont peut-être prévu quelque chose d'autre, tu sais…
-Ca ne coûte rien de demander… Dis-moi, cette Botan…demanda sa mère avec un sourire plein de sous-entendus. C'est la seule jeune fille avec laquelle je te vois…
-Ce n'est pas ma petite amie, rit Kurama, je te préviens tout de suite.
Moi, sortir avec Botan ? pensa-t-il. Elle est gentille, mais bien trop tête en l'air pour être autre chose qu'une amie… Et puis, ce n'est pas elle que j'aime.
-Et aussi le petit garçon… continua Shiori en comptant sur ses doigts.
-Le petit garçon ? Quel petit garçon ? demanda Kurama, surpris, sans voir de qui elle voulait parler.
-Je ne l'ai vu que de loin… Tu sais, celui qui t'accompagne quelquefois sur le chemin de l'école … Un garçon aux cheveux noirs, ébouriffés, qui porte toujours une espèce de grand manteau noir… Il doit avoir dix ou douze ans…
-Pffffrrr ! ! ! fit Kurama en recrachant sa gorgée de lait, les yeux écarquillés.
Dix ou douze ans ? ! Si Hieï entendait ça, sa mère était morte. Et en attendant, lui, il était mort de rire. Il tenta de dissimuler son fou rire sous un ton calme, mais il ne pouvait empêcher une étincelle de rire de danser dans ses yeux.
- J'ai dit quelque chose ?
-Rien, Kaasan, rit Kurama en épongeant le lait avec une serviette, c'est juste qu'il est un peu plus vieux qu'il n'en a l'air et qu'il est assez susceptible là-dessus.
-Vraiment ? Quel âge a-t-il ?
-Euh … Ben… hésita Kurama, ne sachant quoi dire. Treize ans ?
De quoi se plaignait-il ? Au moins il passait pour un préado, maintenant… C'était mieux que de passer pour un enfant. Et sa mère n'aurait jamais avalé le fait qu'il soit adulte -d'ailleurs il ne l'était pas, pas pour un Youkaï ; il n'était encore qu'un adolescent. De toute façon, il n'y avait pas une chance sur trois milliards que Hieï entende ça de la bouche de sa mère, quand à la sienne, il tenait trop à sa vie pour mentionner ce fait en sa présence.
-Invite-le donc aussi. Il a l'air gentil, mais un peu solitaire… Ca lui ferait du bien d'être avec des gens, continua Shiori d'un ton méditatif. Je le vois quelquefois errer dans les rues du parc, il doit s'ennuyer…
S'il l'invitait, pensa Kurama, c'est sûr, ils ne s'ennuieraient pas… Hieï avait autant de savoir-vivre, de self-contrôle et de bonne éducation qu'un chat sauvage affamé dont on essaye de piquer la souris. Et avec Kuwabara dans les parages, ce n'était même pas la peine de penser à finir la soirée avec seulement un maximum de un ou deux petits pansements, il épuiserait tout son stock de plantes de guérison… Si ce stock n'était pas détruit en même temps que la maison.
-Kaasan… gémit Kurama, atrocement mal à l'aise et ne sachant quoi faire pour lui sortir cette idée de la tête.
-Je t'en prie Shuichi… Je suis tellement contente que tu te sois enfin trouvé des gens que tu aimes bien, des gens qui te comprennent… Tu as eu si peu de vrais amis jusqu'à présent…
Elle le regardait avec de ces yeux…Plus le choix.
-Bon… Je verrai ce que je peux faire. Mais je ne promets rien. Je vais aller les voir et je te dirai ça ce soir, d'accord ?

Kurama, assis sur le tatami à côté des autres, acheva son résumé de la situation.
-Eh bien, où est le problème ? demanda Yusuke. On n'a pas de mission, on n'a rien à faire… Si ça fait plaisir à ta mère… Tu pourrais inviter aussi Keiko et Yukina…
La jeune fille des glaces, qui venait de les rejoindre avec le thé, acquiesça, heureuse.
-Oh, oui ! ! S'il vous plaît Kurama-san, j'en serais si ravie ! s'exclama-t-elle en battant des mains comme un enfant. Je peux venir ?
-Bien sûr…
- Y aura du saké? demanda Genkaï.
- Euh… Malheureusement, non, je ne pense pas que ma mère voudra me permettre l'alcool.
- Bon, je ne pense pas que je viendrai, alors, excuse-moi… Mais je ne crois pas que ta mère me connaisse.
- Comme vous voulez, Genkaï-shihan. Le problème… continua le Yohko, revenant à la question de Yusuke. Tu veux que je te fasse un dessin, Yusuke ?
-Oh, tu ne nous fais pas confiance ou quoi ? On sait se tenir, et on fera très attention à ne rien dire à ta mère qui pourrait l'inquiéter. Bon, c'est d'accord ! Ne fais pas cette tête, tout se passera très bien, tu verras, on va bien s'amuser !
-Ouais, ajouta Kuwabara, on ne fera pas de bêtises, on ne mettra pas les pieds sur la table, on ne dira pas de gros mots… Où est donc ce problème ?
Kurama entortilla une mèche autour de son doigt, encore mal à l'aise.
-Le problème, c'est que ma mère veut que Hieï vienne aussi.
Un grand fracas de branches brisées retentit dans la cour, suivi du bruit sourd d'un corps heurtant le sol et d'une bordée de jurons plutôt - très - grossiers, et assez pittoresques pour le monde des humains (les humains jurant rarement " par les couilles d'Emma "). Genkaï ouvrit calmement la porte coulissante, et, sur le côté de la cour, sous un arbre dont une branche était brisée, ils purent voir Hieï qui se relevait, s'époussetant, l'air totalement incrédule.
- J'ai mal entendu, interpella-t-il Kurama en s'avançant vers lui, sa voix basse grondant sourdement. Ta mère veut QUOI ?
-Que tu viennes à ma fête d'anniversaire, soupira Kurama.
-Une fête de quoi ? demanda Hieï en levant un sourcil.
-La fête que les humains font chaque année pour célébrer la date de leur naissance.
-Une fête… répéta Hieï, l'air surpris et un peu désemparé.
-Un truc où on se réunit pour s'amuser, manger…
- J'avais compris. Je ne viens pas, déclara-t-il d'un ton définitivement décidé.
-Mais ma mère t'a vu, elle veut que tu viennes, je vais avoir des ennuis…
-Je m'en fiche, dit-il sèchement en faisant demi-tour.
-Ne compte plus sur moi pour te soigner après la bataille si tu n'es même pas capable de me rendre un petit service, déclara Kurama, sa voix durcie par l'urgence de faire changer le petit démon du feu d'avis avant qu'il ne fiche le camp.
-Je pourrais demander à Botan… ou à Yukina, répondit Hieï en jetant un coup d'œil à sa sœur, mais il s'arrêta toutefois au milieu de la cour.
-Je transformerai en plantes carnivores tous les arbres sur lesquels tu dormiras, dit Kurama.
-Des menaces maintenant ? releva Hieï, agacé mais plus surpris que véritablement en colère.
-Tu ne me laisses pas le choix. Il faut absolument que tu viennes. S'il te plaît… Tu ne veux quand même pas que je te supplie à genoux ?!
-Hn ! Ce serait amusant, mais ça ne me ferait pas changer d'avis.
-Oh, je vous en prie, Hieï-san ! s'exclama Yukina, les mains enlacées sur sa poitrine en une attitude de prière. Ce sera amusant ! Ce ne serait pas bien de nous amuser sans vous, vous faites partie du groupe aussi… Je vous en prie, je ne pourrai pas profiter de la fête si je sais que vous être tout seul dehors…
Elle s'avança vers le démon du feu qui la fixait en rougissant, figé au milieu de la cour, et le saisit par sa cape.
-Je vous en prie… Pour me faire plaisir , demanda-t-elle, un sourire plein d'espoir sur le visage.
Hieï grommela dans sa barbe, très mal à l'aise, mais sans oser se dégager. Il tourna les yeux, rougissant quelque peu, incapable de soutenir plus longtemps le regard de Yukina. Il tira doucement sur le bord de sa cape pour qu'elle le lâche, puis, s'écartant de quelques pas, sur un ton rendu furieux par sa défaite, avec un grand geste coléreux, il dit :
-Très bien, je viendrai ! Mais si quelque chose ou quelqu'un m'ennuie, ajouta-t-il avec un coup d'œil suspicieux en direction du grand rouquin, je fiche le camp aussitôt !
Kuwabara fronça les sourcils, les yeux écarquillés par la surprise, stupéfait de ce que sa douce amie ait réussi à faire plier ce nain hystérique et pyromane sans y laisser la vie - alors que lui ne pouvait même pas le regarder de travers sans se retrouver à " profiter " des soins de Kurama. Yusuke dut se mordre les lèvres pour ne pas rire de la déconfiture du petit démon et de la manière dont sa sœur l'entortillait autour de son petit doigt pour lui faire faire ses quatre volontés, même si elle ne se rendait probablement pas compte de l'influence qu'elle avait sur lui. Genkaï se contenta de secouer la tête, avec un petit sourire amusé au coin des lèvres.
Kurama soupira, soulagé.
-Merci, Hieï. Tu ne le regretteras pas, promis.
-Je regrette déjà, grogna-t-il.
Il se détourna pour partir, mais au dernier moment, Kurama se souvint de quelque chose, et le rappela.
-Hieï, attends ! Il y a encore un léger petit détail …
-Hein ? ronchonna le Youkaï.
-Ma mère ne t'a vu que de loin, et chez les humains, on n'a pas autant de variété dans les tailles que…
-Arrête de tourner autour du pot, déclara sèchement le Koorime en se plantant face à lui, mains sur les hanches.
-Elle croit que tu as douze ans. Il va falloir que tu te fasses passer pour un jeune garçon.
-NANI ?!?!! Jamais !! Tu m'entends ?!
-Et il va falloir que tu changes de vêtements, tu n'es pas vraiment à la mode…
-TU BLAGUES ?! PLUTOT CREVER ! ! !

Kuwabara se mordit violemment les joues pour éviter d'éclater de rire, mais ça ne lui servit pas à grand-chose ; c'était vraiment trop drôle. La vue du démon du feu, vêtu non plus de sa cape sombre mais d'une très jolie salopette en jeans, aux jambes roulées pour s'accorder à sa taille, et d'un t-shirt (tenez-vous bien) Pikachu, les poings serrés et les mâchoires crispées à s'en faire péter l'émail, lui donnait l'air non plus d'un redoutable adversaire sadique et sans pitié - mais d'un sale gosse faisant un caprice. Yusuke regarda fixement le démon de feu quelques secondes, puis tourna lentement ses yeux vers Genkaï. Elle s'éclaircissait la gorge en regardant le sol. Kurama se mordait les lèvres, les joues rouges à la fois de gêne pour lui et d'envie presque irrésistible de s'exclamer : " Kawaï ! " -à laquelle il ne résistait que parce que Hieï avait gardé à portée de main son inséparable katana.
Kuwabara échangea un regard avec Yusuke, et ils éclatèrent de rire ensemble, incapables de se retenir. Ils s'étouffaient à force de s'esclaffer, et plus ils riaient, plus les joues du démon devenait d'un rouge profond, et plus ses poings se crispaient. Kurama ne put résister au fou rire général et se mit à pouffer sans pouvoir s'arrêter. Genkaï suivit d'un petit ricanement sec, puis (goutte d'eau qui fait déborder le vase pour l'humeur déjà monstrueusement mauvaise de Hieï) Yukina, entraînée par les autres, gloussa, bien qu'elle fasse vraiment tous ses efforts pour s'en empêcher. Une fois seulement, mais le mal était fait.
-Arrêtez ! ! ! hurla Hieï, furieux.
Mais son cri de rage n'eut comme effet que de décupler l'hilarité des spectateurs.
-Désolé, hoqueta Kurama entre deux gloussements, mais tu es trop…
-Trop quoi ? gronda le démon, une menace clairement audible dans sa voix rageuse.
-Mignon… lâcha Kuwabara, carrément asphyxié.
-Grrrr… rugit le petit démon, ses yeux écarlates fixés sur le stupide Ningen qui avait eu l'incroyable bêtise de lâcher le mot.
-Oh oh… souffla Kurama, son envie de rire instantanément disparue en entendant le grondement que son instinct lui indiquait comme annonciateur d'ennuis.
L'énergie de Hieï augmentait de façon inquiétante…
Soudain, Kuwabara poussa un hurlement et se précipita de toute sa vitesse vers le petit étang au fond du jardin, où il se jeta les fesses en premier. Un petit filet de fumée marquait la trajectoire qu'il avait empruntée, et de la vapeur s'éleva de l'eau en sifflant, tandis que des bulles d'ébullition commençaient à se former. Hieï se retourna lentement vers les autres, ses yeux rouge sang flamboyant de rage et de menace.
-Y en a un autre que ça fait rire ? demanda-t-il d'une voix dangereusement douce, sa main enveloppée de flammes.
-Moi je trouve que ça vous va bien, dit doucement Yukina en lui souriant gentiment, le faisant perdre sa maîtrise du feu qui s'éteignit tout seul. Ce qui est sûr, c'est qu'on ne vous remarquera pas, vous avez l'air d'un humain totalement normal. Par contre, les cheveux…
- C'est vrai, déclara Kurama d'un ton méditatif en se grattant le menton. Il faudrait quelque chose…
-Je sais, dit Genkaï en partant d'un bond vers le temple.
Elle revint quelques secondes plus tard, et s'avança vers Hieï. En se plaçant devant lui, elle le cacha à la vue des autres, et ils ne purent voir ce qu'elle faisait qu'une fois qu'elle se fut écartée.
Le pire, c'est que la casquette lui allait bien. Un parfait, adorable, irrésistible sale gosse.
-Pffr… pouffa Yusuke.


Le lendemain, quatre heures

-Ding Dong !
- J'y vais Kaasan ! s'exclama Kurama en se dirigeant vers la porte.
Keiko et Yusuke se tenaient sur le seuil. Ils étaient les derniers attendus, Kuwabara, Yukina et Botan étaient arrivés quelques minutes plus tôt.
- Konnichi wa ! Entrez, tous les deux, invita Kurama.
-Salut Kura… Shuichi, rectifia vivement le Mazoku sous le regard sombre du Yohko.
-Evite de gaffer, Yusuke… lui chuchota Kurama d'un ton menaçant, en lui passant dans le dos une main, apparemment amicale, mais à la pression rien moins que préventive.
Le Kitsune les précéda jusque dans le salon, où sa mère servait une assiette de petits gâteaux aux trois autres invités.
-Je vous présente ma mère, Shiori.
-Bonjour, madame, très heureux de vous rencontrer !
Yusuke se tourna vers Kurama et lui donna ce qu'il tenait à la main.
-Tiens, ton cadeau… Désolé, on n'a pas eu le temps de chercher un truc un peu plus...
-Un rosier… dit Kurama, et il pouffa en même temps que sa mère.
Derrière eux, sur la table du salon, il y avait trois rosiers miniatures. Yukina, Kuwabara et Botan se mirent à rire aussi. Ils avaient tous eu la même idée.
-On, ça me va très bien, arigato ! Bon, eh bien… Il est quatre heures, on pourrait goûter ?
-Le petit garçon n'est pas venu ? demanda Shiori.
Kuwabara et Yusuke pouffèrent dans leur gâteau, postillonnant des miettes un peu partout.. Kurama leur jeta un regard mauvais.
-Je ne pense pas qu'il pourra venir, je ne sais pas…
Shiori soupira, déçue, et se dirigea vers la cuisine pour aller vérifier où en étaient ses gâteaux. A ce moment, la sonnerie retentit.
Hieï se tenait sur le pas de la porte, renfrogné… Mais bel et bien vêtu de la salopette et de la casquette. Il avança lentement, comme malgré lui, et se planta face à Kurama.
-Je suis venu, déclara-t-il sèchement, sous-entendant par là que Kurama lui en devait une belle, à présent, et qu'il n'allait pas lui laisser l'oublier de sitôt.
-Merci…lui dit Kurama, vraiment ravi et stupéfait que Hieï ait fait cet effort incroyable.
De toutes façons, pensa-t-il, il était toujours prêt à tout pour aider son ami, alors… Une dette ne changeait pas grand-chose.
A ce moment il aperçut la bosse curieuse qui déformait le devant de la salopette. Il allait demander ce que c'était quand elle bougea, et une petite tête au museau pointu, recouverte de poils roux duveteux, émergea de l'ouverture, une de ses oreilles pliée en arrière d'une manière irrésistiblement adorable.
-Oooh ! s'exclamèrent en chœur les trois filles. Kawaïï ! !
Hieï extirpa la boule de poils de sa salopette par la peau du cou, et la tendit à Kurama.
-Cadeau, grogna-t-il avec un petit reniflement qui montrait qu'il était heureux de s'en débarrasser.
-Mais, c'est un renardeau ? ! s'exclama Kurama, stupéfait, quand il l'eut vu en entier. Tu l'as trouvé où ?
-J'l'ai pas trouvé, j'suis passé à côté.
-Quelle différence ? demanda Kuwabara.
Hieï lui jeta un regard mauvais, déposa la boule de poils au sol, et fit mine de s'éloigner.
Gnap !
Le renardeau s'était dandiné vers lui de toute la vitesse dont étaient capables ses petites pattes mal coordonnées et l'avait agrippé par le bas de sa salopette, plantant ses crocs dedans. Hieï tenta d'avancer, mais le renardeau ne le lâchait pas, se laissant traîner. Il poussait de petits gémissements, mi-jeu, mi-peur d'être abandonné.
- C'était moins fatiguant de le porter que de le traîner comme un boulet.
- C'est gentil, Hieï, déclara vivement Kurama pour étouffer les envies de rire de Kuwa, mais… Je ne sais pas si je peux le garder… Et sa mère alors ?
-Morte. J'croyais que t'aimais les renards… ajouta le démon du feu avec un reniflement moqueur et plein de sous-entendus.
Kurama accepta donc le renardeau, mais il en fut vite délesté par Keiko, qui tenait absolument à câliner un peu (beaucoup) cette adorable peluche gigotant.
De l'humble avis de Kurama, Hieï lui avait " offert " ce renardeau pour une seule raison : se débarrasser de lui. Mais le fait qu'il ne l'ait pas tué ou l'ait forcé à lâcher prise pour partir était plutôt étrange… Ca ne cadrait pas avec le Hieï qu'il connaissait. Est-ce que, finalement, l'habit faisait le moine ? Ou était-ce un côté qu'il dissimulait habituellement, mais qui existait en lui ? Ou l'influence de sa sœur, peut-être… Bizarre, totalement inattendu, mais… Kurama était content. Même si ce cadeau était un peu empoisonné… Le renardeau était bien jeune pour être facile à élever.
A ce moment, Shiori sortit de la cuisine. En voyant Hieï, elle eut un grand sourire et s'avança vers lui vivement. Il lui jeta un regard suspicieux et recula d'un pas, mais trop tard.
Kurama hoqueta de surprise en voyant sa mère se pencher sur Hieï pour lui faire la bise, comme aux autres invités. Il ne s'était, bêtement, pas du tout attendu à ce que sa mère le traite comme ça, et ne put que prier que l'habit faisait VRAIMENT le moine, et que Shiori n'allait pas se retrouver incrustée dans le mur.
Le démon de feu se figea, indécis, et prit une jolie couleur écrevisse ébouillantée en sentant le contact de la mère de Kurama. Il ne savait pas quoi faire, partagé entre le besoin de s'écarter- ou de l'écarter elle, et pas en douceur- et la nécessité de se faire passer pour un garçon normal- et de ne pas mettre Kurama très très en colère en envoyant balader sa mère… Et peut-être aussi le dérangeait le constat, difficile à admettre, que ce n'était pas désagréable…
Shiori s'écarta légèrement du petit démon, et le prit par les épaules pour le tourner vers elle, sans noter qu'il se crispait- son instinct de Youkaï ayant grandi dans un monde extrêmement dangereux lui interdisait de laisser quelqu'un porter la main sur lui et envahir son espace vital. Il n'avait pas survécu aussi longtemps seul étant enfant en se laissant tripoter par le premier venu, après tout. Le moins qu'on puisse dire, c'est que la situation lui était difficile à gérer…
-Alors c'est à ça que tu ressembles… sourit Shiori. Je suis contente de te rencontrer.
Il lui jeta un coup d'œil presque affolé, très mal à l'aise, et baissa la tête, marmonnant on ne savait quoi dans sa barbe. Shiori vit qu'il était gêné et, gentiment, elle reporta son attention ailleurs… Sur la boule de poils que Keiko avait déposée à terre sur laquelle étaient penchées Botan et Yukina.
-Oh, qu'est-ce que c'est ? demanda-t-elle au " petit garçon ".
-Un chiot, Kaasan, répondit Kurama à la place du démon du feu, lui arrachant un coup d'œil soulagé. Il l'a trouvé sur la route, il ne peut pas s'en occuper et il veut me le donner… Je peux le garder ?
-Oui, bien sûr, nous avons un grand jardin… Et il est si mignon ! s'exclama-t-elle en s'agenouillant au-dessus du bébé qui mordillait affectueusement les doigts de la fille des glaces. Je vais lui faire chauffer du lait, il a l'air d'être trop jeune pour se nourrir seul…
Elle fila à la cuisine, laissant à Kurama le soin de les amener dans le salon. Le Yohko haussa les épaules et leur fit signe de les suivre. Ils s'installèrent sur le canapé et les fauteuils, Yusuke à côté de Keiko, et Kuwabara à côté de Yukina - Hieï poussa un grognement bas, énervé de le voir coller sa sœur, mais il ne dit rien de plus - il savait qu'il n'avait pas le droit d'intervenir dans la vie de Yukina sans prétexte et sans lui dire pourquoi il se mêlait de ses affaires. Il s'assit d'un bond sur la fenêtre ouverte, derrière le fauteuil de Botan, et se mit à regarder fixement l'arbre dans le jardin.
Ne sachant trop de quoi parler, les garçons commencèrent sur un sujet sans risques, l'école. Les filles, pendant ce temps, mettaient en pratique leur instinct maternel sur la pauvre petite bête, qui essayait désespérément d'échapper à leurs caresses, cajoleries, gratouilles, agaceries, etc. .. et poussait de petits gémissements incessants en se tortillant comme un ver coupé, sans réussir à se dégager ; à chaque fois qu'il échappait à l'une, l'autre le rattrapait…Pauvre petite chose, pensa Kurama, compatissant.
Shiori revint quelques minutes plus tard avec un biberon de lait chaud et une assiette remplie à ras bord de muffins, de brownies et autres petits gâteaux. Les filles se chamaillèrent quelque temps pour savoir qui allait nourrir le renardeau, puis Yukina l'emporta. Le bébé Kitsune poussa encore quelques petits glapissements agacés, puis sentit le lait et se mit à téter avidement, sa petite queue se balançant en cadence.
- C'est pas trop tôt, soupira Kuwabara en mordant dans son muffin. Je me demandais s'il allait se taire un jour… Y a pas, c'est imparable le biberon !
-Oui, ça avait cet effet aussi sur Shuichi, déclara sa mère en riant. C'est son biberon, après tout ! Qui sait, il a peut-être une vertu spéciale !
- Kaasan ! Ne me dis pas que tu as gardé ce biberon !
-Bien sûr que si ! Tu étais si mignon avec…
Yusuke riait ouvertement, malgré le regard menaçant de Kurama. Il lui fit une grimace malicieuse et demanda à sa mère, avec un grand sourire :
-Mais dites-moi, madame, vous devez bien avoir encore des photos de lui, non ?
-Bien sûr, j'en ai au moins trois volumes… Ca vous intéresse ?
-Oui ! répondirent-ils tous en chœur, des sourires jusqu'aux oreilles.
-Non ! cria Kurama, les joues écarlates. Kaasan, s'il te plaît, pas ça !
-Pourquoi donc ? demanda-t-elle en saisissant dans le buffet un tas d'albums photos. Tu étais vraiment très mignon !
-Kaasan, non ! J'veux pas ! Il n'est pas question que tu leur montres mes photos de bébé!

La photo de Kurama à deux ans pataugeant dans la gadoue, constellé de taches de boue, riant aux éclats, remporta un franc succès, tout comme celle de lui à sept ans tout barbouillé de confiture, ou celle, à quatre ans, où il était installé sur trois bottins sur la chaise du bureau de son père, les lunettes de celui-ci sur le nez, en train de " lire " le journal; mais la préférée de toute l'équipe était sans conteste celle où, vers ses trois ans, il pataugeait tout nu dans la baignoire, en train de faire couler un canard en plastique dans les profondeurs sans nom du bain moussant, à l'aide d'un redoutable avion de chasse-porte-savon.
- J'ai hooooonte…

-Mais dites-moi, les enfants, demanda la mère de Kurama une fois qu'ils eurent fini de scruter les photos de son fils, je ne connais pas tous vos noms je crois ?
Elle se tourna vers la jeune Guide des morts.
-Vous vous appelez Botan, n'est-ce pas ? Un joli nom, original… Il signifie la pivoine, si je me souviens bien ?
-Haï !
-Yusuke, intervint l'intéressé, ça signifie le fantôme- quelque chose, mais j'sais pas quoi… Ma mère était bourrée quand elle m'a baptisé… Oops, dit-il en croisant le regard agacé de Kurama-- exact, Shiori n'avait pas à savoir que sa mère était complètement alcoolo.
- Kazuma, c'est… bonne fraîcheur… avoua l'intéressé avec un sourire gêné, et un petit froncement de sourcils qui prévenait qu'il prendrait assez mal ne serait-ce que le moindre petit sourire.
Kurama- qui personnellement mettait bien à profit son grand self-control- crut qu'il rêvait quand il entendit pouffer du côté de Botan. Il lui jeta un regard suspicieux, mais elle ne disait rien, il avait bien entendu ce qu'il croyait… Le bruit venait de derrière elle… De Hieï. Il se mit à ricaner ouvertement, de son air si moqueur qui donnait envie à n'importe qui de rentrer sous terre.
Kurama aurait préféré apprendre que Hieï avait le sens de l'humour à un autre moment que devant sa mère et aux dépens d'un de ses invités les plus colériques. Kuwabara siffla de colère, prêt à attaquer, mais se retint en surprenant le regard plein de menaces du Yohko.
-Et toi, c'est pas mieux ! se contenta-t-il de répondre, sa voix pleine d'agressivité contenue.
- C'est loin d'être pire… ricana le Youkaï. Bonne fraîcheur… Pfrr…
- C'est vrai, intervint Shiori, je ne connais même pas ton nom, jeune homme…
-Euh… Hieï.
-Quels Kanji ?
-Ombre et Voler, répondit simplement le Koorime.
Etrange, se dit Kurama, je pensais qu'il ne savait même pas lire. Comment les connaît-il?
-Joli, décida Shiori après un instant de réflexion ; joli, très évocateur, mais pas très joyeux… Et ton nom de famille ?
-Euh … dit Hieï, cherchant frénétiquement un nom à donner à Shiori.
Il n'avait pas de nom de famille, il n'en avait jamais eu. Même son prénom, il se l'était donné lui-même, d'après les qualificatifs que lui lançaient les voleurs avec qui il traînait était enfant, et ses propres désirs- en effet ils n'avaient pas jugé utile de le baptiser autrement que " le gamin " (quand ce n'était pas " le petit emmerdeur " ou " le nain ", ou encore " l'autre hystérique "…). Et sa mère évidemment ne lui avait pas donné de nom de famille, d'ailleurs, les femmes des glaces n'en utilisaient pas… Les femmes des glaces…
-Koorime. Hieï Koorime, lâcha Hieï, presque affolé par l'urgence de combler la brèche avant que Shiori ne commence à se poser des questions.
Il baissa les yeux, gêné, et ne surprit donc pas le regard stupéfait que lui lança Yukina … Elle était une Koorime, une femme des glaces ; Hieï était un démon du feu. Elle avait beau réfléchir, elle ne comprenait pas pourquoi Hieï avait pensé à donner sa race à elle pour son nom. Et puis elle, maintenant, elle allait dire quoi si on le lui demandait? Elle ne pouvait pas dire qu'elle s'appelait Yukina Kuwabara, quand même, pensa-t-elle en rougissant.
-Et vous Yukina-chan ? demanda Shiori, réalisant sans le savoir la crainte de la fille des glaces.
-Mon nom signifie la fille des Neiges… dit-elle en souriant, espérant que la mère de Kurama ne lui en réclamerait pas plus.
-Yukina Koorime, c'est très joli… sourit Shiori.
-Hein ? ! s'exclama Yukina avec confusion. Mais je ne…
-Vous n'êtes pas frère et sœur ? demanda poliment la mère de Kurama, légèrement surprise. Vous vous ressemblez tellement… Surtout les yeux.
Les réactions de ceux qui étaient au courant furent remarquablement synchrones. Yusuke lâcha la tasse de café qu'il tenait, que Kurama rattrapa au vol uniquement par réflexe, se brûlant la main au passage sans y prendre garde. Botan s'étouffa avec son gâteau et se mit à tousser comme une tuberculeuse en phase terminale.
Quand à Hieï, il ne devait qu'au fait d'avoir une jambe calée de l'autre côté de la fenêtre de n'être pas purement et simplement tombé comme une masse sur le parquet.
-K'sooo… souffla Yusuke en lançant à Kurama un regard affolé, que celui-ci ne put que lui rendre.
Quand à Kuwabara, il renifla de dégoût à cette idée- la femme de sa vie, si mignonne et si douce, apparentée avec ce petit gnome teigneux et tout ébouriffé, aux yeux brûlant sans raison de rage permanente... Berk ! ! Keiko se contenta de les regarder l'un après l'autre, sentant instinctivement qu'il y avait quelque chose qui lui échappait dans cette affaire.
Yukina jeta un regard indécis au démon de feu. Il n'était plus à demi tourné vers l'extérieur, l'air indifférent et ennuyé, il fixait la mère de Kurama d'un œil stupéfait, penché en avant, les mains crispées si fort sur le rebord que ses phalanges en devenaient blanches. Yukina vit qu'il avait l'air incroyablement mal à l'aise. Elle se laissa aller à son instinct et répondit avec un sourire innocent :
- C'est exact, nous sommes frère et sœur, dit-elle, espérant que le démon du feu ne mettrait pas son petit mensonge en l'air. Mon nom est donc : Fille des Neiges des Femmes des Glaces. Ca fait un peu une répétition.
-Et Hieï est l'Ombre Volante des Femmes des Glaces, ajouta la mère de Kurama d'un ton pensif et amusé.
L'Ombre Volante poussa un grognement indécis, lui lança un regard indéchiffrable, puis détourna vivement les yeux, et s'assit en tournant carrément le dos aux autres. Yukina se demanda pourquoi il était aussi rouge, et pourquoi il avait l'air aussi atrocement mal à l'aise. Elle lui semblait si indésirable que ça dans le rôle de la sœur ? C'était dommage, elle, elle aimait bien ce petit démon têtu… Elle ne savait pas du tout à quoi son vrai frère ressemblait, et elle l'aimait tel qu'il était même sans le connaître, mais si elle avait pu choisir, elle aurait volontiers accepté Hieï… Il était si gentil sous son air bourru, au fond…
-Ta mère est admirablement perspicace, souffla Yusuke à Kurama.
-Oui, grimaça le Yohko, je me demande si mon influence ne lui a pas fait développer des dons de médium.
-Je me demande quels secrets vous échangez, tous les deux … intervint sa mère, le faisant déglutir convulsivement. Bon, je vais chercher le gâteau.
Shiori retourna vers la cuisine, et au bruit qu'elle fit en reculant sa chaise, le renardeau qui s'était endormi sur les genoux de Keiko se réveilla, et se mit à gémir. Kurama lui fut très reconnaissant de cette diversion bienvenue.
Le renardeau réussit à force de se tortiller à échapper à Keiko, et glissa sur le parquet. Il se mit à déambuler dans la pièce, suivi du regard par tout le monde (à défaut d'un sujet de conversation sans risques…).
Soudain, Botan s'exclama :
-Tiens, et si on lui trouvait un nom ?
Elle se pencha sur le renardeau et essaya de l'attraper. Mais avant qu'elle ait pu refermer ses mains entièrement sur lui, il se retourna, et lui lança un vif coup de crocs, de ses petites dents pointues comme des aiguilles.
-Aïe ! !cria-t-elle en reculant vivement la main.
Le renardeau en profita pour se faufiler entre ses jambes et alla se camoufler sous la table basse. Instantanément, les filles se penchèrent de tous les côtés pour essayer de le rattraper, mais il se terrait, effrayé, et il refusa de sortir, malgré les doux appels, murmurés d'une voix apaisante, lui demandant de sortir, les promesses de câlins, et les morceaux de chocolat tendus vers lui.
Kurama tenta de décourager les filles de le faire sortir, comprenant fort bien l'angoisse de la petite bête (eh, il avait eu cet âge, lui aussi, et s'il avait été coincé étant enfant par une bande d'humains, il se serait caché tout aussi bien.) . Mais les filles insistèrent, et Yusuke lança :
- Il faut bien qu'il s'habitue aux êtres humains, ton bestiau, il va devenir sauvage… Essaye, toi, après tout, il est à toi !
Kurama s'agenouilla près de la table, et lança un coup d'œil vers la boule de poils. Elle était roulée en boule, la queue ramenée sous le ventre, et elle tremblait. Le Yohko jeta un coup d'œil vers la cuisine, mais sa mère ne faisait pas mine de sortir. Il allait pouvoir essayer...
Il s'allongea sur le côté pour pouvoir voir le petit, et se mit à pousser un étrange cri de gorge, un gémissement comme ceux qu'en poussent les chiens… Et les renards évidemment. Ce cri signifiait, en gros : N'aie pas peur, je te protège. N'importe quel canidé pouvait le comprendre, c'était un cri universel, pas besoin d'être un Yohko. Le sens en était évident.
Pas pour la boule de poils.
Il se recula encore plus, et poussa un gémissement plaintif. Suivi par beaucoup d'autres. Sa voix perçante et aiguë semblait capable de briser les vitres, et Kuwabara et Yusuke appuyèrent vivement leurs mains sur les oreilles avec une grimace de douleur.
-Il pleure sa mère, déclara Kurama en se relevant. Il ne comprend pas pourquoi elle ne vient pas. Il faut lui laisser le temps de s'habituer, c'est tout.
-Dis-moi, Hieï, demanda Kuwabara d'un ton soupçonneux, t'es sûr que sa mère était morte ? Sinon, faut le lui rendre en vitesse, il est insupportable…
-Si elle ne l'était pas, faut qu'elle me donne la recette, répondit sèchement le démon du feu. Sauf si elle a pas la formule pour recoller les morceaux. Vivre en pièces détachées ne doit pas être pratique.
- Eeeerk… T'es dégueu ! s'exclama Kuwa en s'imaginant la scène.
- C'est toi qui m'as demandé, répliqua Hieï avec un reniflement de mépris.
- Vous êtes très gentil d'avoir pris si bien soin de lui, dit Yukina d'une voix douce ; le pauvre petit bébé…
Hieï se crispa et ses joues devinrent de la même couleur que ses prunelles.
-Euh… Ben… dit-il en baissant vivement les yeux au sol. C'est juste que j'arrivais pas à le détacher… C'est tout…
- T'as pas pensé à lui casser la mâchoire pour te dégager ? demanda Yusuke, soulevant des protestations de toutes les filles et une tape de Keiko. Mais Aïeuh ! Ben quoi ? C'est pas un truc que j'ferais, mais ce s'rait bien du genre de Hieï… Pas vrai ?
- Hn… J'devais amener un truc pour Kurama, déclara le Youkaï en s'absorbant dans la contemplation des lames du parquet. J'ai pris la première chose qui m'est tombée sous la main…
Il jeta soudain un regard suspicieux à sa jambe qui pendait du rebord de la fenêtre, puis la releva lentement.
-Ou plutôt, qui s'est agrippée à mon pied, ajouta-t-il d'une voix grondante en amenant à la vue de tous le petit renardeau suspendu à son talon.
-Iiiiii… Iiii, gémit le renardeau, les mâchoires crispées sur la chaussure de Hieï, les pattes à vingt centimètres du sol.
Le démon du feu ramena son pied devant lui, sur le rebord de la fenêtre, et détacha difficilement les dents de la petite bête de sa basket. Le renardeau se retrouva assis assez brusquement sur le large rebord, en face de Hieï. Celui-ci détourna son regard de la boule de poils et se tourna vers les autres.
-Botan… dit-il lentement en indiquant le bestiau du pouce, lui signifiant par là qu'il verrait d'un assez bon œil qu'elle l'en débarrasse.
Mais avant que la Guide des Morts ait eu le temps d'obtempérer, le renardeau se décida à bouger. Il s'approcha encore du Koorime et posa une patte sur sa cuisse, gémissant pitoyablement. Hieï le regarda, surpris. Le renardeau referma ses dents sur le bord de sa salopette et tira dessus, piaillant d'un ton suppliant.
- J'ai une hypothèse, annonça très sérieusement Kurama au milieu du silence général. Tu es la première chose qu'il a vu et il t'a " imprimé " en tant que sa mère. Tu sais, comme les canards…
Tout le monde se mit à rire. Le Youkaï lança à Kurama un regard brûlant qui prédisait une brûlure plus réelle, énervé comme il était toujours qu'on se moque de lui. Le Yohko se hâta de rectifier le tir avant de n'avoir plus comme seule option que d'appeler les pompiers en urgence.
-Non, sans rire, il a dû avoir très peur quand sa mère a été tuée, et tu es celui qui l'a mis à l'abri… Dans ta salopette. C'est pour ça qu'il veut y retourner. Il te fait confiance, Hieï, ajouta Kurama après un instant d'hésitation.
C'était une chose bizarre à dire, trouvait-il. Il n'avait pas pensé mettre un jour ces deux mots dans la même phrase…
-Hn ! grogna le démon du feu en fronçant les sourcils.
- Franchement, il a un jugement assez bizarre ! s'exclama Kuwabara, clamant tout haut ce que tout le monde pensait tout bas, sous des formulations légèrement différentes. S'il y a quelqu'un avec qui il ne devrait pas être en confiance, c'est bien Hieï !
-Ta gueule, Haleine Fraîche, lança vivement le démon du feu. Ningen no baka !!
Il saisit le renardeau par la peau du cou, et, à la surprise des spectateurs, qui s'attendaient à le voir effectuer un lancer de renardeau à une distance olympique, le remit dans sa salopette. Puis il leur tourna le dos, les deux jambes pendant par la fenêtre, prêt à bondir.
Kurama tendit une main en avant, se demandant si le Youkaï avait réellement l'intention de partir, mais il n'eut pas le temps de faire plus.
-Ca y est, le gâteau est cuit, les enfants ! Asseyez-vous, déclara Shiori en entrant dans la pièce.
Les invités s'installèrent autour de la table, légèrement confus de cette interruption. Yusuke profita du moment où ils s'installaient pour échanger un regard de soulagement avec Kurama.
-Ta mère a un sens du timing à toute épreuve…
-Elle a aussi un sens de l'hospitalité assez développé… Tu crois qu'après les petits gâteaux et les muffins, tu as encore assez faim ? Je te préviens que celui-là n'est pas le dernier…
-Encore combien de gâteaux ?
-Connaissant Kaasan… T'auras plus envie de manger pendant trois ou quatre jours.
- Encore vos messes basses ! Qu'est-ce que vous marmonnez les garçons ?
-Rien m'dame ! s'exclama Yusuke, l'air aussi innocent qu'un agneau qui vient de naître (mais qui se rappelle un tas de trucs vachement intéressants de ses vies antérieures).
La mère de Kurama commença à distribuer les parts, mais elle se tourna soudain vers Hieï qui était resté perché sur sa fenêtre, toujours aussi crispé.
-Eh bien, tu ne viens pas mon petit? Tu n'aimes pas les gâteaux ?
Hieï lui jeta par-dessus son épaule un regard expectatif, et se décida à se tourner lentement vers elle et à se laisser glisser doucement du rebord.
-Tu as l'air bien prudent…
-Si j'le réveille, y va me bouffer ma salopette, s'expliqua le Koorime d'un ton à la fois bourru et timide en montrant à Shiori la petit bête endormie dans ses vêtements.
-Oooh , que c'est mignon ! s'exclama Shiori en joignant les mains. Je vais chercher l'appareil, ne bouge pas !
- L'appareil… ? demanda Hieï en jetant un regard inquiet à Kurama.
-Oh, rien de bien méchant, lui assura Kurama en se mordant les joues pour ne pas exploser de rire.
Kaasan avant raison, Hieï était… Tout simplement adorable. C'était une image qui méritait cent fois d'être classée dans les annales, ne serait-ce que pour garder pour la postérité un moment aussi unique et inattendu…
Hieï, adorable… Encore deux autres mots que la bande n'aurait jamais pensé employer un jour dans la même phrase. Ils le regardaient tous, figés, essayant désespérément de s'empêcher de bouger pour ne pas risquer de briser cet instant si exceptionnel.

Kuwabara pouffa.

Quel andouille, il fallait croire que l'autre fois ne lui avait pas servi de leçon. Yukina poussa un glapissement surpris, puis un cri affolé, en voyant monter des cheveux de son ami un filet de fumée. Kuwabara leva les yeux, intrigué, et se releva vivement en sentant la chaleur, bousculant sa chaise qui bascula en arrière.
-Hyaaa ! Ce malade mental a mis le feu à mes cheveux !
-Bah… Ca sera pas une grande perte, souffla le démon du feu. T'as vraiment une coupe gerbante.
Yusuke se releva lui aussi et essaya d'éteindre les cheveux de son ami, mais Kuwabara était totalement affolé, et il se mit à courir à travers la pièce sans regarder où il allait, cherchant désespérément une mare où plonger comme il faisait d'habitude. Yusuke le poursuivit sans réussir à le rattraper. Botan et Keiko les regardaient courir, dans l'expectative, sans savoir comment elles pouvaient les aider.
-Mais attends, espèce de crétin !
-Hyaaaa ! répondit Kuwabara en trébuchant sur un tabouret.
Kurama jeta un regard assassin à Hieï. Et voilà, il n'avait pas pu se retenir ! C'était à attendre… Pourvu que le démon du feu n'ait pas tout fichu en l'air… Celui-ci leva sur le Yohko de grands yeux innocents, et lui lança un sourire candide qui le pétrifia de surprise. Hieï… candide ? Quel comédien, ce type, mine de rien !
Avant que cet idiot de Kuwabara ait renversé quelque chose, à courir partout comme un poulet sans tête, Hieï lança négligemment une jambe en travers de sa trajectoire, et, tout aussi négligemment, il saisit le pot d'eau sur la table pour le verser sur la tête du rouquin étalé au sol, qui était en train de se frotter la mâchoire à l'endroit où elle avait rencontré le parquet. Kuwabara toussa en respirant l'eau, surpris, et se retourna vers le démon avec un air furieux.
-Espèce de sale petit nain psychotique… commença-t-il.
Kurama s'interposa vivement, certain que Hieï allait répondre violemment à cette insulte, mais la seule réponse qu'il eut fut un grand sourire innocent... Et le lâcher du pot d'eau qu'il tenait encore au-dessus de la tête du Ningen. (" shboong ! ")
- Tu ne t'es pas fait mal au moins ? Je me demande vraiment comment tu as réussi à tomber de cette manière… Le pot ne t'a pas blessé ?
La réaction fut unanime.
-Hein ? !
Yusuke ouvrait la bouche pour demander au Youkaï s'il allait bien quand il entendit Shiori entrer dans la pièce, son appareil à la main.
-Oh ! Mais, que s'est-il passé ? Tu vas bien Kazuma ? demanda-t-elle en voyant les dégâts.
-Euh… Oui, oui, madame, répondit celui-ci, honteux. Je… J'ai trébuché et le pot m'est tombé sur la tête.
Tandis que Shiori immortalisait le Youkaï et son renardeau sans que celui-ci la remarque, Kuwabara se releva, jetant à Hieï un regard assassin que celui-ci ne lui rendit pas. Le démon du feu se dirigea posément vers la table et prit place à la seule chaise encore libre, à côté de Yukina. Il accepta le gâteau que lui tendait la mère de Kurama avec un petit hochement de tête en remerciement, sous les regards ébahis de l'assemblée, et commença à manger.
Kurama se gratta le crâne tout en s'installant en face de lui, perplexe. Hieï avait VRAIMENT un comportement très inhabituel.
-Tu crois qu'il est possédé ? lui chuchota Botan à l'oreille.
- Botaaann… soupira le Yohko en fixant discrètement le petit démon.
-J'dirais bien qu'il a ses ragnagnas, mais d'habitude ça énerve plus qu'autre chose… Ou alors il est malade. Oui, ça doit être ça…
Le Youkaï surprit le regard que Kurama lui lançait, et lui souffla par-dessus le gâteau :
-Ben quoi, tu voulais que j'me comporte correctement, non ?
Kurama ne put s'empêcher de cligner plusieurs fois des yeux.
Incroyable.
Hieï faisait des efforts pour se comporter correctement. Etonnant, surprenant, inconcevable, prodigieux, extraordinaire... etc. Il FAISAIT DES EFFORTS. Des efforts. Kurama, Yusuke et les autres en étaient, pardonnez-moi l'expression, sur le cul. Et ils avaient du mal à saisir le sens de la phrase. Il semblait…
Normal. Presque…Innocent.
" Non, quand même, faut pas pousser, "pensa Kurama, en le surprenant en train de lancer un regard narquois à Kuwabara avant de retourner à son gâteau.
Ils mangèrent presque en silence, chacun concentré sur l'éclaircissement de cet incroyable mystère. Mais le principal intéressé de leurs cogitations se fichait pas mal des regards dont il était la cible. Il se goinfrait de gâteau au chocolat, se constellant de miettes, comme s'il n'en avait jamais mangé de sa vie … Ce qui devait effectivement être le cas, se dit le Yohko. Le chocolat, et les mères aimantes préparatrices de gâteaux, étaient déjà une denrée fort rare dans le Makaï, alors pour un enfant abandonné comme il l'avait été… " Je me demande si c'est le premier qu'il mange. Sûrement. Qu'est-ce qu'il est kawaï avec toutes ces miettes de partout. Un vrai gosse. Ca donne une de ces envies de les essuyer…"

-Tiens, on ne lui a toujours pas trouvé un nom, à lui…
Yukina se pencha sur son frère- il lui lança un coup d'œil suspicieux et gêné- extirpa le renardeau de sa cachette en douceur, malgré ses grognements de protestation, et le déposa au milieu de la table. Il n'eut rien de plus pressé que de retourner vers Hieï, en gémissant pour que celui-ci le reprenne. Le démon du feu se contenta de passer un bras autour de la petite bête pour la tranquilliser et l'empêcher de bouger.
-Boule de Poils, proposa Botan.
-Grrnnn… ronfla le renardeau.
- Ca ne lui plaît pas, remarqua Kurama.
-Médor, lâcha Kuwabara dédaigneusement- il n'aimait pas les canidés, seulement les chats.
Hieï lui jeta un coup d'œil apparemment indifférent, et lâcha, sans avoir l'air d'y penser, le renardeau, qui traversa toute la table en se dandinant sur ses petites pattes. La main de Kuwa traînait sur la nappe…
-Gnap !
-Wouaïe ! Saloperie ! s'exclama le rouquin en dégageant tant bien que mal sa main des petites dents.
-Kazuma-san, enfin ! lui reprocha Yukina, d'une voix douce, comme d'habitude, mais en fronçant les sourcils d'un air réprobateur qui fit naître un petit sourire moqueur sur le visage de son frère.
-Kit, proposa Yusuke- une fois qu'il eut cessé de rire de la morsure qu'il avait infligée à Kuwabara.
-Hein ?
-Kitsune. Renard.
-Kit, Kitty, appelèrent les filles.
Le renardeau se mit à jouer avec une cuiller qui traînait sans s'intéresser à elles.
-Ca n'a pas l'air de l'inspirer, remarqua Kurama. Rouquin ?
- Rrrr… grogna le petit Kitsune.
-Ca lui plaît pas non plus, lâcha Hieï.
-Eh bien, trouve, toi, puisque tu as l'air de le comprendre… Remarque, entre bêtes sauvages…
-Kazuma-Kun, mon cher, lança négligemment le Youkaï en souriant- d'un sourire qu'on aurait dû photographier pour le mettre à côté du mot 'ironique' dans le dictionnaire. Je crois que tes cheveux recommencent à fumer…
-Les garçons, enfin ! s'exclama Yukina. Ca suffit… soupira-t-elle, fatiguée de leurs chamailleries incessantes. Et si on l'appelait Peluche ? Il y ressemble, non ?
Le renardeau grogna et se dirigea vivement vers Yukina, dans l'intention de faire subir à sa main le même traitement qu'à celle de son ami.
-NON ! ordonna Hieï, d'une voix forte qui l'étonna lui-même, tout en le rattrapant par la queue. On ne mord pas ! dit-il, levant un doigt, comme pour faire la morale au petit renard qui le regardait attentivement, assis sur son arrière-train.
Kurama appuya le plus doucement possible sur le déclencheur de l'appareil photo pour ne pas donner l'éveil au démon.
- C'est quoi ce bruit ?
-Rien, rien, sourit Kurama en mettant l'appareil à l'abri sur ses genoux.
Rien au monde ne lui ferait lâcher cet appareil, se jura-t-il, et surtout la pellicule qu'il renfermait. Comme il était kawaaïïïï… On aurait dit qu'il rattrapait avec son comportement de sale gosse l'enfance qu'il n'avait pas eu.
Hieï poussa un grognement, enfourna le renard dans sa salopette, et retourna à son gâteau. Il le finit en quelques secondes sous les regards ébahis des autres. Yusuke poussa un sifflement admiratif devant la contenance inattendue de l'estomac du démon du feu. Il avait abandonné sa part au bout de cinq bouchées, repu, quand aux autres, Kurama et Kuwabara s'étaient contentés d'y donner un petit coup de dents, et les filles n'y avaient même pas touché.
Le démon du feu repoussa son assiette et jeta un regard au plat, qui était malheureusement vide.
-Y en a p'us ? demanda-t-il en se léchant les doigts.
-Vous pouvez… Tu peux prendre le mien… 'Niisan, dit Yukina, butant sur les mots. Je n'y ai pas touché.
Elle avait l'habitude de les vouvoyer tous, mais comme il passait pour son frère… Elle pouvait bien l'appeler grand frère, non ?
Elle ne s'attendait pas à le voir changer de couleur aussi vite.
-Hieï-san ? Ca ne va pas ? demanda-t-elle, inquiète de sa pâleur et de son regard fixe.
- Si, si… Merci pour le gâteau, répondit-il vivement en saisissant le gâteau que lui tendait sa sœur et en le portant tout aussi vivement à sa bouche pour éviter de lui répondre.
-Vache, dit Yusuke pour changer de sujet, t'avais pas mangé depuis deux jours ou quoi ?
-Non, trois, répliqua le Koorime en lui lançant un regard méprisant.
On entendit soudain le carillon de la porte d'entrée. Kurama commençait à se lever pour aller ouvrir, se demandant qui cela pouvait être, mais sa mère, de la cuisine, lui cria qu'elle s'en chargeait. Il retourna à ses invités.
Il proposa un pansement à Kuwabara, qui s'occupait de sa main percée de deux petits trous, poussant des jurons dans sa barbe, et jetant des regards agressifs au Jaganshi qu'il semblait tenir responsable des actes du renardeau. " Mais c'est vrai qu'il l'est un peu. Il avait très bien compris qu'il voulait le mordre… On dirait qu'il le comprend. Amusant"
Botan sirotait tranquillement son verre, sans rien dire pour une fois car elle se méfiait de sa propension au bavardage inconsidéré et ne voulait pas risquer de faire exploser la situation quelque peu " à risques ".
Keiko observait pensivement une reproduction de tableau suspendue au mur, qui figurait une jungle verdoyante envahissant une ville, tout en essayant de reconstituant les morceaux de ce qu'elle avait appris sur les " épisodes " qu'elle avait loupés.
Yukina, quand à elle, réfléchissait sur les réactions pour le moins bizarres de Hieï. Il y avait quelque chose de pas normal dans sa manière de se comporter, quelque chose qui lui mettait la puce à l'oreille, mais elle n'arrivait pas à mettre le doigt dessus. Il avait donné le nom de sa race à elle pour son nom de famille, il avait eu l'air gêné que Shiori la croie sa sœur… Il avait eu l'air surpris qu'elle l'appelle grand frère… Non, pas surpris. Stupéfait, gêné, choqué, et même atrocement mal à l'aise. Il était gentil avec elle, plus qu'avec les autres…
Yusuke mordit courageusement dans sa part, ne voulant pas laisser croire à Shiori qu'elle cuisinait mal. Les filles pouvaient prétendre qu'elles faisaient un régime, pas lui, se rappela-t-il pour s'encourager.
- C'est bon, Yusuke ? demanda Koemma, qui était adossé nonchalamment au cadre de la porte juste derrière lui.
-Waaaaah !!! hurla Yusuke en faisant un bond sur sa chaise, postillonnant des miettes de gâteaux jusque sur Kuwabara qui était assis en face de lui. Mais c'est pas vrai, tu le fais exprès ? Tu veux me faire mourir d'une crise cardiaque ou quoi ? Qu'est-ce que tu fous là d'abord ?
(Le hurlement fit perdre à Yukina le fil de ses pensées juste comme elle était sur le point d'arriver à une conclusion.)
- Koemma -sama ! s'exclama Botan. Mais…
Elle se bâillonna vivement sous le regard plein de menaces du Yohko.
- Il m'a dit qu'il faisait partie de tes amis, Shuichi… déclara Shiori.
-Euh, oui, c'est exact… Vous… Tu as pu te libérer finalement ? Prends donc une part de gâteau…
-Comment t'appelles-tu ? Koemma ?
-Euh… Oui, madame, c'est ça.
-Koemma- SAMA ? demanda-t-elle, en insistant bien sur le Sama.
- C'est une vieille blague entre nous, Kaasan, intervint Kurama en épongeant discrètement une sueur froide, parce que son nom veut dire Fils d'Emma, et le fils du Juge des Morts mérite bien d'être appelé seigneur !
-Oh, je vois… Amusant ! Assieds-toi, je vais ramener du gâteau.
Koemma s'assit à la table, et la mère de Kurama les laissa pour retourner à la cuisine. Il jeta un coup d'œil prudent par-dessus son épaule pour se rendre compte s'il pouvait être entendu, puis se tourna vers la petite bande.
-Koemma, râla Yusuke à voix basse, on avait dit pas de missions aujourd'hui… C'est l'anniversaire de Kurama !
-Je sais, je suis désolé, mais... C'est une mission très rapide, elle ne nécessite qu'un seul d'entre vous… Et absolument pas dangereuse. C'est juste un petit problème à régler en vitesse, mais on ne peut pas agir dans le Ningenkaï directement, c'est tout. Et puis je suis très pressé. Et comme c'était dans le quartier…
-Tu vas finir de tourner autour du pot et nous dire ce que c'est ? demanda Yusuke en se balançant sur sa chaise.
-Voilà… Kurama, ça te concerne un peu. Vous savez (ou vous ne savez pas) que les Yohko, les Esprits du Renard, ont tous été avant leur transformation des renards tout à fait normaux. Chaque renard naît avec un potentiel plus ou moins grand pour devenir un Yohko, c'est tout. Il y a peu est né un renard qui a un potentiel extrêmement grand. Pour comparer, disons qu'à l'âge adulte et en pleine possession de ses pouvoirs, il surpassera Kurama. (" ooops " fut la réaction de tout le monde) Evidemment, nous ne pouvons laisser se développer un tel monstre sur Terre. Dans le Makaï, ce ne serait pas un problème…
-Tu veux qu'on aille l'attraper et le lâcher dans le Makaï ?
-Non… De toute façons il est trop jeune pour survivre seul. Le problème, c'est que les projections du carnet d'Emma prédisaient pratiquement toutes qu'il devait se faire dévorer par un chien aujourd'hui, après que sa mère ait été écrasée par un camion. Mais on n'a retrouvé que le cadavre de la mère et celui du chien, coupé en deux comme par un sabr… Qu'est-ce qu'il y a?
Les regards de toutes les personnes s'étaient fixées lentement sur Hieï. Il abandonna sa part de gâteau, et leur renvoya un regard furibond.
-Pour une fois, Koemma, tu auras eu raison en parlant de mission rapide, déclara Yusuke. Hieï ?
-Quoi ? demanda-t-il d'un ton rogue.
Il fit du regard le tour de l'assemblée, et, avec un soupir agacé, il renonça à prétendre ne pas comprendre ce qu'on attendait de lui, extirpa de sa salopette le petit renardeau qui s'était rendormi, et le déposa devant lui. La boule de poils s'étira en bâillant, découvrant ses petites dents-aiguilles d'une manière qui fit frémir Kuwabara.
-NANI ? ! s'exclama Koemma en manquant tomber de sa chaise. Alors c'est TOI qui as modifié le destin ? !
-Ben quoi ? Ce clebs avait vraiment une trop sale gueule, se justifia Hieï, son ton bourru et agressif lui servant d'écran pour masquer sa gêne.
Koemma se redressa et se rassit correctement, tirant sur son écharpe d'un air gêné. Il était Dieu, d'accord, mais le Jaganshi avait un de ces regards... Brr !
- Je comprends, je comprends… déclara-t-il d'un ton pensif, le menton dans sa main. Cet événement était tellement improbable qu'il n'avait même pas été pris en compte…
-Pfffr… pouffa Kuwabara dans sa main.
Hieï lui jeta un regard mauvais, agacé que la remarque en apparence si sérieuse de Koemma fasse naître des gloussements étouffés chez tout le monde. Son innocence et sa ressemblance avec un petit garçon avaient entièrement disparu avec le retour de sa maussaderie, même si la salopette était un cadre inattendu pour une telle concentration de mauvaise humeur, se dit Yusuke, avant de se mordre la main pour contenir son rire- il ne tenait pas à finir en brochette.
-Et alors ? demanda-t-il. On en fait quoi ?
- J'ai bien peur qu'il n'y ait qu'une seule solution… D'abord, sa mère est morte, et puis il deviendra vite dangereux…
La proposition de Koemma souleva un tollé chez les filles… Et chez Hieï.
Il n'aimait pas spécialement les animaux, en fait, il s'en fichait, comme de tout mis à part la bagarre. Mais ce renardeau… Il lui faisait confiance. Il venait vers lui quand il avait peur. La boule de poils avait besoin de lui, elle se mettait délibérément sous sa protection à lui; et c'était une situation qu'il n'avait jamais connue qu'une seule fois avant. D'une manière ou d'une autre, ça lui rappelait la première mission qu'il avait effectuée avec Yusuke, quand celui-ci avait remis le sort de toute l'équipe entre ses mains. Le porche de la Trahison. Et sa réaction était la même à présent. Il ne pouvait pas, il n'était absolument pas capable de trahir une confiance si absolue.
Il laissa tomber toute trace de sa réserve habituelle, se releva vivement, repoussant sa chaise, et se pencha en avant vers Koemma.
-Kurama peut s'en occuper, il a dit, clama le Koorime, et puis il s'y connaît en Yohko, il saura l'élever !
Koemma le regarda fixement, stupéfait de l'intervention de la dernière personne qu'il se serait attendu à voir parler, et se décida à répondre.
-Hieï… Je ne sais pas pourquoi tu tiens à cette bestiole, mais… Sans une excellente raison, je ne peux pas le laisser vivre.
Hieï chercha désespérément un argument raisonnable, mais eut du mal à trouver- en effet, il avait rarement l'habitude de régler ça par des mots quand quelqu'un lui disait quelque chose qui ne lui plaisait pas. Soudain, une idée lui vint.
- S'il est élevé depuis tout petit pour être Reikaitantei… Tu as dit qu'il sera plus puissant que Kurama. Tu crois pas que ce serait vachement pratique un monstre aussi balèze du côté du Royaume ?
-Là, j'avoue que tu marques un point…
-Et tu pourras le surveiller tout au long de sa croissance pour vérifier qu'il ne devient pas cinglé ou kek'chose comme ça.
-Ce serait comme un apprenti détective, c'est ça ? Hm…
Yusuke réussit à sortir de sa stupeur pour renchérir.
-Oh, allez, ça serait cool ! On lui apprendrait toutes nos techniques et tout…
-Et puis si on s'occupe bien de lui depuis tout petit, renchérit Keiko, il ne risque pas de devenir mal élevé et de finir voyou… Enfin, à condition que Yusuke ne se mêle pas trop de son éducation. ("méheu!!")
-Oui, et puis… intervint Yukina, sa voix douce, comme toujours, mais résolue. Il est hors de question de s'abaisser à tuer un petit bébé comme lui. On ne peut pas faire ça. S'il a une enfance heureuse, ce n'est pas comme s'il est livré à lui-même, il ne risquera pas de devenir bagarreur (" hem ", soupira Hieï ), voleur (" ips "), ou violent et agressif (" ergl ! "), ou grossier et mal élevé( " hiii… "), ou…
Kurama se rendait compte que Hieï clignait des yeux et poussait un petit hoquet à chaque nouveau qualificatif, les mots de Yukina le touchant en plein dans le mille. Et le fait que ce jugement vienne de la seule personne dont l'avis avait de l'importance à ses yeux le mettait encore plus mal à l'aise. Le démon du feu déglutit convulsivement, gêné, puis se ressaisit et fixa Koemma dans les yeux.
-Il aura une dette envers le Royaume qui l'a laissé vivre, il sera lié par cela. Même s'il le veut, il ne vous désobéira pas.
-Bon, c'est d'accord, céda Koemma, ne voulant pas discuter plus avec le Youkaï qui, il devait se l'avouer, l'effrayait quelque peu maintenant qu'il se mettait à contester les ordres. Kurama, tu peux le garder jusqu'à ce qu'il atteigne sa forme de Yohko, ensuite, on avisera. Quel branle-bas pour une boule de poils…
Keiko regarda la fille des glaces, et elles eurent un regard complice. Avant que les garçons aient eu le temps de réagir, Keiko avait attrapé le renardeau par la peau du cou, l'arrachant à la poigne de Hieï, et elle le passa à Yukina, qui le déposa innocemment sur les genoux du fils du Juge des Morts.
Koemma cligna des yeux, surpris, et considéra, surpris, le bébé qui geignait, effrayé par son brutal déplacement. Il le retint par réflexe quand il commença à glisser de ses genoux, et le petit renardeau le regarda. Ses yeux étaient brun clair aux reflets cuivrés.
Les filles avaient raison, il était si mignon! Koemma avança une main hésitante et se mit à le gratouiller derrière les oreilles. Le renardeau poussa un petit gémissement de plaisir et se serra contre le ventre du garçon, essayant de se faire un nid dans ses vêtements.
-Tu vois Koemma, il est trop adorable pour qu'on lui fasse du mal…
- Moui… grommela l'intéressé, se reprochant d'avoir été si visiblement touché par la petite bête- Botan allait le raconter à tout le monde en enfer, et sa réputation naissante serait définitivement foutue.
- Il est… Mignon…
Il baissa la tête, encore attendri malgré lui par la manière qu'avait la boule de poils de réclamer de l'affection- échappant par là même au regard meurtrier du Koorime, jaloux. Pourquoi la boule de poils ne le mordait pas, comme les autres? Bon, ça ne pouvait qu'arranger ses affaires, de s'insinuer dans les bonnes grâces de Koemma-Sama, mais… Ca l'ennuyait un peu, quand même… C'était SON renard, à lui!
Koemma ne s'occupait pas de tout ça, mais seulement de la balle de fourrure rousse sur ses genoux. Il était mignon… Et puis il avait l'air intelligent, et affectueux… Et il était si doux à caresser, si chaud… Si… Humide?
Pris d'un doute affreux, le jeune dieu souleva lentement le renardeau, le faisant glapir de surprise.
C'était bien ce qu'il avait craint.
La charmante, adorable petite bête, si tendre, si affectueuse, venait de lui pisser dessus.
-Espèèèèce de…
Les amis les fixèrent, horrifiés. Koemma était vraiment contrarié, ça allait mal finir pour la pauvre bête!!!
Soudain, le renardeau lui fut ôté des mains, avant qu'il ait pu le punir comme il en avait l'intention.
-Vilaine bête! le gronda Hieï en le tenant suspendu par la peau du cou. T'es dégoûtant, c'est pas bien!
Il lui donna une tape sur les fesses et le déposa dans un large pot de fleurs. Kurama soupira. Bah, ça les fertiliserait.
Le chiot geignit, repentant, puis se mit à farfouiller dans la terre du pot, mettant à nu les racines et envoyant du terreau sur la moquette, histoire de se creuser un trou convenable pour y faire sa grosse commission.
Koemma, pris de court, cligna deux ou trois fois des yeux avant de se calmer un peu. Sa réaction avait été un peu disproportionnée… Ce n'était qu'un bébé.
-Kurama, tu ferais bien de donner des vêtements propres à Koemma, déclara Hieï sans tourner la tête, surveillant de près la boule de poils.
-Euh, oui, bien sûr! Koemma, suis-moi…
-Mmm… acquiesça l'intéressé.
Seuls dans l'escalier, ils n'échangèrent qu'un regard surpris devant la manière dont Hieï prenait les choses en main quand sa boule de poils était impliquée, avant de retourner à leurs cogitations personnelles sur la cause de cet attachement inattendu.

Habillé de propre, le fils du Juge des Morts prit congé de ses amis et de la mère de Kurama, et voulut partir.
-Mais tu viens juste d'arriver…protesta la mère.
-Oui, mais j'ai du travail à finir…
-Oh, très bien. Mais tu prendras bien une part de gâteau, ne serait-ce que pour la manger sur le chemin…
Koemma fixa la part de gâteau qu'elle lui tendait, puis finit, poussé par le regard mais-si-tu-as-très-faim de Kurama, par la prendre d'une main hésitante.
-Je vous remercie, madame, dit-il en s'inclinant devant elle.
Kurama, regardant par la vitre, s'aperçut que Koemma, une fois dans le jardin, mordait prudemment dans le gâteau, puis, l'ayant apparemment trouvé à son goût, se mettait à le dévorer à belles dents. " On aurait dû lui demander de rester, " pensa-t-il. " S'il aime, il aurait pu finir nos parts… Kaasan va encore s'inquiéter pendant je sais pas combien de temps en croyant qu'elle a raté sa recette. Elle ne comprend pas que son problème, ce n'est pas la qualité mais la quantité… "
Koemma parti, tout le monde se tourna vers le démon du feu. Ils avaient fait front commun avec lui tant qu'il y avait eu urgence pour sauver cette boule de poils que tout le monde avait adoptée, mais à présent que le danger était écarté, leur stupéfaction devant ses actes refaisait surface.
Le Youkaï baissa les yeux sur la boule de poils qui couinait dans ses bras, et souffla, apparemment perdu dans ses pensées mais assez fort pour être entendu de tous :
- Mais si c'est moi qui t'élèves, c'est à moi que tu devras quelque chose, pas au Royaume…
-Ah, je vois ! Tu t'es débrouillé pour qu'il reste libre ! s'exclama Yusuke. Pas bête ! C'est vrai, il n'a rien promis lui-même !
Hieï lui lança un petit sourire moqueur en coin, et se tourna vers Kurama. Il lui jeta un regard embarrassé avant de baisser les yeux, feignant d'être fabuleusement absorbé par la manière dont ses lacets arrivaient à se croiser sans jamais se tromper de trou pour ressortir.
-Désolé de te le mettre sur les bras, Kurama…
Le Yohko lui lança un regard accompagné d'un doux sourire. Il était si adorable quand il avait l'air gêné… Et c'était bien la première fois de sa vie qu'il l'entendait s'excuser… Au moins, s'excuser en croyant à ce qu'il disait.
-Oh, c'est pas gra…
-Je m'en occuperai, continua le Koorime, sa gêne le rendant volubile. Après tout, c'est moi qui l'ai trouvé, c'est moi qui ai insisté pour le garder, et...
-On y tient tous, ici, Hieï, le coupa Yusuke. On aime tous bien cette boule de poils(" oui ben pas moi " " Tais-toi Kuwabara "), et on va s'en occuper ensemble, OK ? (" oui ben sans moi " " TAIS-TOI KUWABARA ! ").Tu ne t'en chargeras pas seul (" oui ben sans moi " " vlan!! " " AÏE ! " " joli coup, Botan " " merci, Keiko, j'ai copié ta technique "). Et puis tu voudrais le mettre où ? Quand tu dormiras sur tes arbres, tu ne pourras pas le mettre indéfiniment dans tes vêtements.
-Et les renards ne sont pas doués pour l'escalade, crois-moi sur parole, intervint Kurama. Laisse-le moi tant qu'il ressemble encore à un renardeau banal, il sera bien ici. Tu me fais confiance, non ?
-Hnn… souffla le démon du feu. OK, je te le laisse… Après tout, c'est ton cadeau d'anniversaire, sourit-il.
Un très petit sourire, mais un sourire quand même. Un vrai sourire, pas une grimace moqueuse ou un prélude à un éclat de rire cruel, pas quelque chose plein de crocs. Un sourire… légèrement ironique, il était vrai, mais…
- Clic, fit l'appareil photo.
-Kurama, qu'est-ce que c'est que ce truc ? demanda le Koorime d'un air soupçonneux. Ca fait plusieurs fois que tu me braques avec…
-Non, c'est rien !
- T'as l'air trop sincère pour être honnête… Donne-moi ça ! ordonna-t-il en déposant le renardeau sur la table et en s'avançant lentement vers lui.
- Ah, non alors ! Pas question !
- Donne, je t'ai dit !
Sous les rires de la bande, Hieï se mit à pourchasser Kurama tout autour de la pièce, essayant de lui arracher l'appareil que le Yohko serrait désespérément contre son cœur.
-Donne !
-Jamais ! Yusuke, au secours ! cria un Kurama essoufflé et riant, en se réfugiant derrière le Mazoku.
Yusuke s'interposa, explosé de rire. Hieï s'immobilisa face à lui, mais avant de décider de ce qu'il allait faire (contourner Yusuke ou l'envoyer embrasser le mur- de qui se mêlait-il, d'abord? Il avait bien le droit de trucider un peu Kurama, quand même!!) il fut interrompu par un glapissement de détresse.
-Aaah ! Botan, le tiens pas comme ça ! Sa patte, abrutie !s'exclama-t-il avant de se précipiter sur elle pour lui arracher le renardeau, qu'il serra contre lui d'un air possessif.
Botan cligna des yeux, à mi-chemin entre la peur et la surprise. Elle avait été sûre que le Youkaï allait la frapper… Il était si possessif envers la boule de poils, on aurait dit une mère renard défendant son petit, pensa-t-elle…
Elle dut se mordre la joue pour ne pas exploser de rire en se représentant le démon du feu à quatre pattes, avec des oreilles pointues, une queue touffue, en train de lécher le renardeau pour faire sa toilette.
-Et il a toujours pas de nom, remarqua Keiko. D'ailleurs, on ne sait même pas si c'est un mâle ou une femelle…
Aussi sec, Hieï saisit la boule de poils par la peau du cou et la retourna sur le dos.
- Mâle. Un renard rouge… Un nom pour un Yohko rouge… marmonna Hieï, absorbé dans ses pensées. C'est la pleine lune ce soir, non ? Akatsuki.
-Hein ?
-Lune Rouge. T'en penses quoi Aka-chan ?
-Yip ! aboya l'intéressé en remuant la queue.
-Ca a l'air de lui plaire! s'exclama Yusuke. Tant mieux ! C'est pas pour dire, mais il est plutôt difficile, celui-là ! Ouais, AkaTsuki, ça a de la classe…
-Yip ! confirma Aka-chan en léchant vigoureusement la figure du démon du feu.
-Aah ! Arrête, t'es dégoûtant ! s'exclama le Youkaï en tentant de se détourner.
Ce faisant son regard tomba sur l'autre Yohko.
-Eh, Kurama, je rêve ou tu t'es encore servi de ton machin ?

Vers les sept heures et demie, les invités de Kurama se décidèrent à partir. Il fallait bien rentrer, et se décider à terminer ce qui avait été, en fin de compte, un excellent moment. Yusuke se leva le premier.
-Il faut que j'y aille, sinon mon ivrogne de mère va siffler toute la réserve de saké sans m'en laisser une goutte… Ouille, Keiko ! Arrête ou je te raccompagne pas !
Hieï ébouriffa une dernière fois les oreilles d'Aka-chan et le déposa dans les bras de Kurama, puis se dirigea résolument vers la porte. Mais il avait tout juste passé l'entrée du vestibule qu'un hurlement perçant le faisait se retourner.
AkaTsuki se tortillait désespérément dans les bras du Yohko debout à côté de sa mère, pleurant et gémissant d'un ton à faire pitié à un ogre affamé.
-Iiii Iiiii Iiii…
-Silence, Aka-chan ! T'es pas si petit ! s'exclama Hieï en faisant mine de repartir.
-Aouououh ! !
-Tu le fais exprès, c'est ça ? Tu veux me donner mauvaise conscience? Ca ne marche pas !
- Wououououh ! Wouf wouaououh ! ! !
-Grr… OK, donne-le moi, grogna Hieï en faisant demi-tour.
- J'ai l'impression qu'il ne veut pas te laisser partir, Hieï, pouffa Yusuke. Tu vas être obligé de rester le temps qu'il s'habitue à Shuichi…
-Oh oui, ça serait une bonne idée… Tu crois que tu peux, Hieï ? demanda Kurama.
-Ben…
-Je préviendrai maman, dit Yukina en lui lançant un clin d'œil complice. Tu peux bien rester quelque temps, grand frère.
-Euh… D'accord, toussa Hieï en baissant les yeux, pris de court par la proposition. Ca vous dérange pas, Shiori- san ?
-Oh, non, pas le moins du monde ! Tu dormiras dans la chambre de Shuichi- Kun.
-Euh… dit encore le petit Youkaï en regardant fixement le Yohko.
-Ben quoi, t'as peur de moi ? lui chuchota-t-il à l'oreille.
-Pas du tout !
Le groupe se dirigea vers le vestibule, après avoir pris congé de la mère de Kurama. Celui-ci les raccompagna jusqu'à l'entrée. Yusuke et Keiko furent les premiers à sortir, suivis de Botan. Kuwabara suivit, accompagné de Yukina. Hieï, le renardeau sous le bras comme un paquet, resta à côté de Kurama dans l'embrasure.
Yukina stoppa en plein milieu de l'allée, dit à Kuwabara qu'elle avait oublié une chose, et se dirigea vers la porte d'entrée qui n'était pas entièrement refermée.
- Shuichi-San, attendez ! J'ai oublié quelque chose de très important !
-Vraiment ? demanda Kurama en rouvrant la porte pour laisser le passage à la fille des glaces.
Pourtant, il était sûr que personne n'avait rien laissé derrière lui…
Elle se glissa à l'intérieur, avança vivement vers le démon du feu, et, avant qu'il ait pu faire quoi que ce soit, elle l'avait attrapé par le cou et lui avait laissé un gros baiser sur la joue.
-Bonne nuit grand frère…
Elle était partie depuis trente secondes déjà quand Kurama vit la main de Hieï se lever lentement jusqu'à son visage et frôler l'endroit qu'elle avait embrassé.
-Bonne nuit petite sœur…

[Cauchemar]